Critiques musicales par Edwood

2001

 


2008
2009
2010
2011
2004
2005
2006
2007
2003
2002
2001
2000
1999
1998
Petite discothèque idéale
Discothèque idéale étendue
Les artistes détaillés
Edwood VS MTV
Index de The Web's Worst Page
Ecrire à Edwood

 


Aphex Twin / Bogdan Raczynski

   

Britney Spears : Britney

Pulp : We Love Life

Eels : Souljacker

Bjork : Vespertine

Plaid : Double Figure

Frank Black & the Catholics : Dog In The Sand

Mayhem : A Grand Declaration of War

Green Day

Kraftwerk


 

aphex-twin6.jpg (43704 octets)     Aphex Twin VS Bogdan Raczynski     bogdan8.jpg (39787 octets)

 

        C'est la dure loi de la nature, le cycle inévitable de l'évolution, l'ancienne espèce dominante est peu à peu remplacée par une autre, plus faible a priori, mais mieux adaptée, plus maligne, plus en phase avec son ère. Le diplodocus Aphex Twin se voit donc grignoté par la souris Bogdan Raczynski. A la base, Bogdan est un "clone" de l'Aphex, signé par le monsieur lui-même, sur son label à lui, Rephlex, où d'ailleurs il ne signe que ses clones. Bogdan débute donc en faisant de l'Aphex, comme beaucoup d'autres (et pas seulement Radiohead). Mais, mais, mais. Il y a quelque chose d'autre chez Bogdan, dès le début on le sent, ce petit en veut, il y a d'immenses espoirs cachés derrière ses beats en délire. Petit à petit, dans le grand mouvement de l'évolution, Bogdan fait de l'Aphex, mieux que l'Aphex. Et en cette fin d'année 2001, au moment où tous les deux sortent un album acclamé par la critique, on ne peut que constater un fait tout simple : Bogdan Raczynski écrabouille Richard D. James.

aphex-twin-druqs1 (26938 octets)        L'album d'Aphex Twin, le sur-médiatisé Drukqs (qui doit signifier "best of" ou "greatest hits" ou "je me la foule pas" en langage Lourd, n'oublions pas que ce Drukqs est une compilation d'anciens morceaux !) est un hénaurme pétard mouillé qui dégouline de la cime aux racines (c'est pour la rime). 1/2 d'Aphex Twin qui s'auto-parodie (voire qui imite Bogdan, allez comprendre !) et 1/2 de remplissage. Ca nous donne un double album qui pisse dans un violon et dont on se fout éperdument dès la première écoute. A la seconde, cependant, on se rend compte qu'il y a de bonnes choses là-dedans. Sans la moindre once d'originalité ou de prises de risques, mais on discerne au moins 4 ou 5 bons, voire très bons, morceaux dans la masse. Ca fait peu, je vous l'accorde. Surtout que c'est son premier opus depuis 1996 et l'angulaire Richard D. James Lp. Ne vous attendez pas à retrouver le grand frisson de Ventolin, Girl/Boy Song ou des Selected Ambient Works (ici repris par moments note par note). Richard James est mort avec les années 90. C'est finalement bien logique. Drukqs est son chant du cygne, l'album de trop qu'il fallait pour tuer la légende. Monsieur James avait besoin de tunes, il va en avoir, il a rappelé au monde entier que sans lui il n'y aurait pas de Kid A, de Destiny's Child & co (et finalement ça serait pas un mal), maintenant il va falloir qu'il se bouge, il en est capable. Ou pas.

bogdan-myloveilove.jpg (15594 octets)        A l'inverse, l'album de Bogdan Raczynski, MyloveIlove, est une merveille du début à la fin. Expérimental tout en restant abordable, novateur en permanence même lorsqu'il paye tribu à ses inspirateurs (cf la fusion incroyable de Plaid et d'Aphex Twin sur le morceau 12), touchant, drôle, triste, bizarre, inclassable, brillant. Et pourtant on sent bien que ce n'est là qu'un disque de transition et que le petit (devenu grand) nous réserve des monuments pour dans peu de temps. L'ère 2000 lui appartient, car il vient de nous offrir là le disque le plus original de l'année. 17 morceaux et autant de prises de risque (ne serait-ce que le grandiose single, casé en toute fin d'album). Bogdan bidouille, essaie, triture, invente, ne se laisse jamais enfermer dans une formule toute faite, il touche à tout et lorsque l'on croit qu'il se repose sur ses lauriers, il fait surgir de la piste une imprévisible idée géniale. Chants désincarnés, instruments inattendus, sonorités fascinantes, mystères et humour... MyloveIlove est un album calme, apaisé, léger même dans ses touches sombres, il ne fait pas de bruit, il ne paye pas de mine. Mais il vient confirmer le talent d'un élève qui vient de dépasser son maître. L'Aphex Twin s'est arrêté sur le bord de la route, Bogdan Raczynski est désormais bien loin devant lui, et il sera bien difficile de le rattraper. Jusqu'à la prochaine passation de pouvoir ("le vrai pouvoir ne se donne pas, il se prend", n'est-ce pas ?). MyloveIlove est un disque presque bouleversant et certainement rassurant, il nous prouve que la musique ne cesse d'évoluer et que nous n'avons décidément aucune raison d'être blasés. Ouf !

 

bogdanraczynski.com - bogdan raczynski buddy world

WARP RECORDS

 

 


 

Britney Spears : Britney

        Que peut-on attendre d'un album de Britney Spears ? Essentiellement de la pop surproduite qui explose dans tous les coins des enceintes. De la petite pop pyrotechnique à la manière de Oops I Did It Again. Mais je n'attendais certainement de la miss Spears qu'elle vienne oeuvrer dans le monde du r'n'b hautement sexuel. Aidé à la production par The Neptunes, deux chansons, I'm a Slave 4 U et Boys, laissent bouche bée. On vient de dépasser les limites de l'indécent et les oeuvres humides de Madonna viennent soudain de prendre un coup de vieux (oui, même Justify My Love !). Ca minaude, ça murmure, ça susurre, ça gémit. Britney vient de découvrir la pornographie musicale et croyez-moi, elle le fait bien. C'est du classé X pyrotechnique, un incroyable travail de producteurs. Sur ces deux chansons, Britney parvient à créer un équivalent contemporain aux perles des Shangri-Las. Le reste de l'album n'est pas de ce niveau. Mais la musique de Britney est devenue plus dure, plus mâture, déjà plus adulte. Même les pièces-montées pop d'autrefois ont acquis une nouvelle agressivité (Overprotected, Cinderella, Lonely...). L'obligatoire reprise n'est toujours pas du niveau du The Beat Goes On du premier album, mais se laisse écouter (I Love Rock'n'Roll). 

        Dans l'ensemble, indéniablement, on pense à Madonna, à Janet Jackson dans sa période Rythm Nation, et énormément au grand frère Michael (Jackson). Même si l'inévitable ballade est toujours assez lourde (I'm not a girl, not yet a woman), les 12 morceaux de Britney s'enchaînent avec un vrai panache. Dès la première écoute, chaque chanson paraît très familière et surtout très accrocheuse. Car le super pouvoir de Britney, c'est de s'immiscer dans le cerveau pour ne plus en sortir. Même avec trois fois rien (le fantastique Bombastic Love, Anticipating, les chansons qui se rapprochent le plus de la Bit-Bit d'autrefois), elle nous réduit... en esclavage. Le grand disque pop de l'année 2001 et un chef-d'œuvre du genre. Très grand album. Impressionnant. Si vous en avez la possibilité faites l'acquisition d'une version qui contient le grandiose Before the Goodbye, surprenante synthèse entre r'n'b et eurodance (!). Bien sûr, vous pouvez aussi détester le genre et d'autant plus détester Britney. Je le conçois. Mais essayez de résister à I'm a Slave 4 U et à Boys. Oui, écoutez juste cela au casque, tout seul, sans fausse honte et sans a priori. Et nous en reparlerons après... (get it, get it, get it, get it....)

 


 

Pulp : We Love Life

pulp-we-love-life.jpg (7928 octets)

We Love Life de Pulp est le meilleur album de l'année 2001. Voilà.

        J'avais rédigé une longue chronique ayant pour but de comparer cet album avec le Plaid et le Eels. Mais aussi avec le reste de la discographie du plus grand groupe de rock anglais (Pulp, donc, faut suivre les enfants !). Mais oui, mais non. J'en ai vraiment marre de radoter toujours la même chose. A force de hurler au Chef-d'Œuvre à tout bout de champ, à mettre des 20/20 partout (euh... 4 disques 20/20 sur un an ? Finalement c'est pas tant que ça), à force de superlatifs et de références pour nerds, j'ai dû lasser tout le monde. Et là il faut être raisonnable et direct :

We Love Life de Pulp est le meilleur album de l'année 2001.

Et c'est un chef-d'œuvre.

Ils reviennent pour sauver le monde (non ce ne sont pas les Pixies !)

        Dedans il y a l'énergie folle de Weeds, l'errance réaliste et fascinante de Origin of the Species, la douleur nue de Minnie Timperley, la poésie gracieuse de The Trees, les souvenirs bouleversants de Wickerman, la puissance traumatisante de I Love Life, la légèreté jouissive de The Birds In Your Garden, la magie de Bob Lind, la magnificence pop de Bad Cover Version, la souffrance sublime de Roadkill et le final hallucinant et génial de Sunrise. En clair, il y a un This Is Hardcore (le duo tétanisant Wickerman/I Love Life), il y a un Something Changed (le traumatisant Roadkill, depuis quand une chanson ne vous a pas fait pleurer ?), il y a un Disco 2000 (Bad Cover Version), il y a des murmures (Origin Of The Species) et des histoires lyriques (Wickerman)... Tout ce qu'on aime chez Pulp est dans We Love Life. Et Dieu sait que l'on aime Pulp. Le groupe le plus cher à notre cœur, le groupe à jamais à part, incomparable, unique.

        Et les rumeurs ont tort, définitivement tort. Ce n'est pas le dernier album de Pulp. Ca ne se peut pas. Jamais Jarvis ne nous laissera tomber, de toute façon. Le meilleur parolier (et de loin) de la planète ne pourra jamais nous laisser orphelin. Il nous a offert 11 textes d'une force extraordinaire, 11 chansons qui sont toutes (toutes !) des sommets et qui parviennent toutes (toutes !) à être émouvantes d'une façon ou d'une autre. Affolant, trop grand, trop fort, ah zut ça y est je repars dans les superlatifs. Mais enfin ! Cet album est produit par LE Scott Walker (Tilt !!), 53 minutes qui semblent n'en durer que 15, il y a des cordes, des chœurs, des riffs hénaurmes, des rythmiques irrésistibles, de l'humour et des larmes. Il y a Jarvis Cocker, sa voix, ses paroles, son charisme, sa vie. Tout simplement.

        Pulp a toujours été une "different class" des autres, de tous les autres. Avec cet album aussi bon que leurs précédents (il suffit de se rapporter à ma page dédiée au groupe pour bien comprendre), ils nous offrent une nouvelle échelle vers le paradis. Largement du niveau de This Is Hardcore, si ce n'est supérieur (!!!). We Love Life (titre choisi après les attentats du 11 septembre) risque fort, si, je vous assure, de rentrer dans mon top 10 de nerd. Dans mon top 10 des disques. De tous les temps. Là où il y a London Calling et Trompe Le Monde, Brassens et Siouxsie, si si, entre Phil Spector et Plaid. Et oui. Aussi bien que cela ? Bien mieux que cela. Les mots d'Edwood ne sont pas à la hauteur.  We Love Life est un disque vital. Vous pouvez ne plus me croire, après tous les torrents d'enthousiasme que j'ai déjà déversé à tort et de travers. Mais si vous passez à côté du meilleur album depuis au moins trois ans (depuis... hum... This Is Hardcore), j'en suis plus que désolé pour vous.

        Wickerman déverse la rivière de la mémoire, la rivière de la vie, dans les enceintes. On se sent minuscule, on se sent protégé, on se sent en compagnie d'un ami si cher, on se sent bien. Au moment où le monde semble s'effondrer dans la guerre, le malaise généralisé, la violence, la bêtise, le cynisme, la déprime, We Love Life est la lueur au bout du long, long, long tunnel. Oui monsieur Cocker, on se battra jusqu'à la mort pour avoir le droit de vivre notre vie.

non, pas "bye", non !

Bar Italia : A Pulp Resource

PULP(Edwood)

This is Hardcore(Edwood)

 


 

Eels : Souljacker

eels-souljacker (28026 octets)

        Non, faut arrêter, là, ça va plus du tout ça, enfin, quand même, les enfants, c'est pas raisonnable ! Cela fait déjà des mois que j'ai épuisé mon quota de superlatifs et de "chefs-d'œuvre" pour l'année 2001, et non, franchement, ça va pas être possible, quoi ! Mayhem, Frank Black, Plaid, nous avons déjà deux 20/20 et un "disque de l'année". Et je tremblais déjà à l'annonce du Pulp produit par Scott Walker que tous les critiques trouvent fabuleux, grandiose et intimiste tout à la fois. Sans évoquer le double Aphex Twin que je n'ose imaginer, celui-là il va nous enterrer tous et toutes. C'était déjà trop, trop, trop, après une année 2000 pas transcendante (heureusement il y avait... Eels...), 2001 était épuisante à force de coups de génie à tous les étages. Et puis voilà, wam bam, un album pas prévu au programme qui s'affirme comme le plus grand disque de rock depuis la mort des Pixies (hein ? quoi ? kessekil nous raconte là ???). Si si !

        Et aller ! Nouveau Eels et Edwood va nous dire : "c'est un chef-d'œuvre, c'est génial, c'est bouleversant, c'est le meilleur groupe américain, achetez ce disque, vous ne pouvez pas vivre sans, etc...". Et bien, oui, je vais vous le dire et si vous ne vous précipitez pas sur Souljacker, je vais vous le répéter jusqu'à ce que vous arrêtiez de lire ce site (ou que vous achetiez l'album, certes). Pourquoi un tel enthousiasme ? Allons-y simplement. Souljacker Part 1, déjà le meilleur single de 2001. Depuis quand n'avait-on pas entendu un morceau rock aussi décomplexé et efficace ? Depuis Frank Black, sans aucun doute, et encore ! On se surprend à taper du pied et les plus atteints se retrouveront rapidement à mimer le riff sur une guitare imaginaire. Hein ? Quoi ? Mimer le riff ? Comme sur Smoke On The Water ? Comme sur Sweet Jane ? Comme sur Like A Hurricane ? Comme sur The Blitzkrieg Bop ? Comme sur Head On par les Pixies ?? Comme sur le Mottö de Judy And Mary ??? Oui ! C'est aussi hénaurmissime que cela !

        Car à côté de l'efficacité rock et du son monstrueux parfaitement décrit dans des notes de pochette fort malignes (et une pochette épastrouillante, encore une fois), donc, il n'y a pas que ce retour à l'essence du rock dans Souljacker, il y a aussi tout ce qui fait que l'on adore monsieur E. Les paroles touchantes, les petits sons qui partent dans tous les sens, les chansons qui entrent peu à peu dans notre cœur pour ne plus jamais en sortir. Tout est là, avec ce qui est sûrement, à défaut d'être l'album le plus émouvant du groupe, leur disque le plus riche, le plus maîtrisé, le plus directement impressionnant. 12 morceaux, chacun avec sa propre personnalité et son propre univers, 40 minutes, la durée "idéale" d'un album de rock.

        Cela débute avec le riff et la rythmique formidables de Dog Faced Boy (paroles sans grande surprise, entre Tim Burton, le clip de Da Funk et une chanson de... Eels). Et déjà on comprend, le voilà le fameux son "urbain", "the encyclopedia of love, God, Satan, pain and heartbreak". Inutile de cacher l'influence immense de John Parish sur le tournant adopté par monsieur E (grandiose avec la barbe et les ongles géants façon Howard Hugues).

        Je n'ai pas le courage de faire un "track by track" de cet album ultra cohérent où chaque chanson possède sa propre ambiance et où chaque ambiance est indissociable de toutes les autres. Mais l'on ne peut rester qu'émerveillé par un Fresh Feeling dans lequel E sample son Selective Memory pour nous émouvoir joyeusement avec une chanson d'amour innocente et simple. Et comment ne pas rester bouche bée à l'écoute Woman Driving Man Sleeping et son atmosphère enveloppante, fascinante comme le plus beau des Lynch. Et ce Friendly Ghost tout droit sorti d'un album solo de E ?? Et ce Bus Stop Boxer douloureux et délicat ?? Et ce Jungle Telegraph franchement parfait ?? Et ce final avec la plus grandiose chanson d'amour que l'on ait entendu depuis... foulalala... un bon bout de temps. What Is This Note ? que ça s'appelle. Et c'est du hardcore, pur et dur. Et c'est magnifique, original, brillant. Et sur les dernières secondes de Souljacker on réalise à quel point on a entre les mains non seulement l'essence du rock, mais surtout un nouveau chef-d'œuvre de monsieur E, simple et touchant, dur et tendre, triste et joyeux. Humain.

        Bon, bah, voilà, voilà. Vous allez tous acheter ce disque. D'ailleurs c'est déjà fait, vu qu'il cartonne dans les tops Fnac et "indépendants". Je n'ai donc pas grand chose à ajouter. Tout le monde aime Eels maintenant, c'est l'effet Tim Burton. Et c'est tant mieux ! Car à l'instar de La Planète des Singes, Souljacker est le contre-poison au cynisme ambiant. Monsieur E et monsieur Tim n'ont jamais été aussi grands. Fichtre !

 

Eels Official Site -- ARTISTdirect Network

 


 

Bjork : Vespertine

bjork-vespertine (32518 octets)

        On la laisse vivre sa vie, finalement, maintenant que Dancer In The Dark n'est plus qu'un lointain souvenir, on sait qu'elle ne nous veut pas (plus ?) de mal. La sorcière islandaise peut reposer en paix et nous offre son grand disque valiumesque. Au programme, 12 fois la même chanson, pas franchement désagréable. Un tendre beat électronique pompé sur un morceau quelconque du Selected Ambient Works 2 d'Aphex Twin, une plage de synthés pompée sur un morceau quelconque du Selected Ambient Works 1 d'Aphex Twin (remercié dans les notes de pochette, ce qui prouve l'humour de la miss), la voix familière et sans surprise, des chœurs sur la dernière partie de la chanson et hop ! Voilà un disque "sans", sans la moindre prise de risques, sans rien, tout vide, tout blanc, doté d'une pochette de toute beauté (la plus belle de sa carrière), calme, peinard, en paix, qui suivant votre humeur sera un monument de réconfort ou une fresque d'ennui poli. En parlant d'un autre disque blanc (mais chef-d'œuvre absolu, celui-là), on pourrait rapprocher Vespertine de la dernière chanson du Paris 1919 de John Cale. Antarctica Starts Here. C'est bien là un compliment disproportionné, mais Bjork lève le drapeau blanc, et on fait la paix. I Need Peace, ça c'est une chanson de Frank Black, c'est aussi un titre possible pour le nouveau non-événement de Bjork. Vespertine est un sommet de prévisibilité imprévue, aussi agréable qu'immédiatement oublié, une vacuité bien jolie. La pochette est vraiment sublime, oui, je sais, on trouve son bonheur où on le peut.

 


 

Plaid : Double Figure

Plaid-Double-Figure (14282 octets)

        Mieux que Not For Threes ? Mieux que Not For Threes ??? De tous les albums ultra attendus par votre serviteur en cette année 2001 (Frank Black, Pulp, les Creatures...), le Plaid était peut-être le premier de la liste, celui dont j'espérais le plus (mais bon, l'année est loin d'être achevée, il va sans dire). Et dès la première écoute, mon Dieu, on comprend, on sait, on vit. En fait on avait déjà compris dès la pochette, ce blanc, ce bleu, 19 morceaux, il y a déjà quelque chose d'infiniment rassurant dans le visuel de Plaid. Que l'on se souvienne du vert de Not For Threes pour bien réaliser à quel point Plaid est le groupe de musique électronique le plus "affectueux" qui soit, le plus proche, le plus cher à notre cœur. Et avec ce Double Figure, il est désormais temps d'arrêter de faire des distinctions de genres et d'étiquettes. Plaid n'est plus le plus grand groupe de musiques électroniques de la planète. Il est tout simplement le plus grand groupe de la planète. Mieux que les Creatures ? Mieux que les Catholics ? Mieux que Eels ? Mieux que Pulp ? Oui et non, bien sûr. Disons que messieurs Ed (non pas Wood !) et Andy (non pas Kaufman !) se sont définitivement offerts une place à part, dans un autre univers. Ne le cachons pas, Double Figure a tout pour devenir le chef-d'œuvre de l'année 2001. Sa sortie presque simultanée avec le dernier Radiohead est d'autant plus symbolique, c'est un peu comme si Luc Besson sortait son nouveau film en même temps que Tim Burton ou que David Lynch.

        De la douce montée du sublime Eyen, jusqu'au final "out of this world" de Manyme, Double Figure ne faiblit pas une seule seconde. Plaid retrouve la même cohérence dans la richesse, la même tendresse dans la débauche technologique, la même évidence dans l'exigence, la même poésie des sons que dans Not For Threes. Double Figure dure 70 minutes pile poil, on ne les entend pas passer, et c'est un euphémisme. L'album pourra et va tourner en boucles pendant des heures et des jours, des semaines, des mois, des années, des siècles et des siècles. Seul Plaid pouvait dépasser Plaid, c'est peut-être bien chose faite. Je garde toujours une affection particulière pour le grand disque vert, pour Prague Radio et pour Milh, mais là, là, il faut l'avouer, ils sont allés plus loin. Frank Black a fait mieux que Frank Black. Plaid fait mieux que Plaid. On ose à peine imaginer, si la logique se poursuit, ce que vont nous offrir Pulp et les Creatures.

 

Ed et Andy

 

        Mais revenons à Double Figure encore un instant. Donc il y a Eyen, doux comme un duvet au cœur de l'hiver, beau comme un coucher de soleil estival au pied des montagnes. Squance, c'est le "tube" plaqué or. Assault On Precint Zero (en hommage à l'Assault On Precint 13, l'un des grands chefs-d'œuvre de John Carpenter), règle définitivement les comptes avec l'ancêtre trop étouffant qu'était Not For Threes, la synthèse est accomplie, la place est libre, le futur commence ici. Avec Zamami, une superbe errance rêveuse qui touche en pleine âme. Puis vient Silversum, qui prouvera (s'il était encore besoin) que la musique électronique n'a pas besoin d'être vampirisée, contrefaite, gnangnantisée, plagiée, bavouillée pour être la plus belle de la planète. Qui a besoin d'un chanteur pleurnichard, qui a besoin de guitares incontinentes, qui a besoin de "songwritters" égocentriques, qui a besoin de musiciens onanistes ? Personne, et surtout pas moi. En particulier lorsque que s'avance Ooh Be Do et son insidieux appel d'air. Light Rain porte si bien son nom que l'on reste bouleversé sur place. Mieux que Not For Threes ? Nous ne sommes pas tout à fait à la moitié de l'album que la réponse se fait déjà évidente.

        Cinq interludes du nom de Tak nous accompagneront au fil de la seconde partie de Double Figure. Le génie de Plaid s'offre en une minute aussi sûrement qu'en cinq (et jamais plus de cinq minutes ! Ces gens ont tout compris). Justement, voilà cinq minutes et 18 secondes, sur New Family, qui rappellera inévitablement Not For Threes, mais on ne va pas se plaindre, fichtre, non, car lorsque la rythmique arrive, l'illumination est totale. Plaid est le groupe qui réussit aussi bien à s'adresser à notre esprit qu'à notre cœur. Raison et sentiments, en un seul morceau, en un seul disque. Si c'est inestimable ? Voilà le plus grand des euphémismes. On laisse à peine le temps à Zala de nous décrire un monde de robots dingues qui s'offriraient une fête avec les lutins et les elfes que déjà Twin Home nous emporte loin dans une stratosphère liquide. Sommes-nous dans l'espace ? Sous la mer ? Dans un voyage au centre de la Terre ? Au-delà de l'infini ? Pas le temps de s'appesantir sur la question car le plus beau morceau de 2001, Sincetta, nous apporte la réponse. Nous sommes dans les territoires du rêve. Cinq minutes qui peuvent en durer aussi bien 1000 que 0.0002. Le langage n'existe plus, dans un brouillard de sensations, dans un flou de pensées, Plaid nous conduit encore plus loin que ne l'avaient fait Rakimou ou Dead Sea. On pleure avec un sourire aux lèvres, on rit avec les anges, Fire Walk With Them, Fire Walk With Us.

 

Plaid, rois de la musique et du visuel

 

        Le Tak 3 semble sortir des Innocents et nous amène vers Porn Coconut Co. Méfiez-vous de ce titre trompeur et de l'intro fort "space", c'est une nouvelle claque qui nous attend (la 15e, bah voyons !). Tout Plaid est là, aussi généreusement drôle que miraculeusement touchant. Passant des larmes aux rires d'une plage à l'autre, d'un instant à l'autre, épousant mieux que quiconque le rythme de la vie. Tak 4 nous fait croire pendant 2 secondes que Lilith est revenu, mais non, mais non, encore un trompe-l'œil (enfin, un "trompe-l'oreille" (un trompe le monde ??). Et c'est Ti Bom qui nous prend la main pour nous faire entrer dans un univers de film noir qui aurait trouvé la clef pour dépasser aussi bien Le Faucon Maltais que Blade Runner. Le temps d'un Tak 5 et c'est déjà, et oui, déjà, Manyme. La soul post-apocalyptique, et Plaid s'offre encore un chef-d'œuvre, le sommet d'un genre qu'ils viennent juste de créer du néant. Il ne reste vraiment plus rien aux autres. Pas la peine d'essayer de suivre, encore moins la peine d'essayer de photocopier. Il n'y a qu'un Plaid et c'est tant mieux, mille fois tant mieux. Le plus grand groupe du monde nous offre son chef-d'œuvre (jusqu'au prochain album, on croise les doigts), et fait enfin entrer la musique dans le nouveau millénaire. J'ai écrit quelque part, je ne sais plus où, que l'on pouvait très bien n'avoir qu'un seul album dans sa discothèque, et cet album c'était Not For Threes. Ah bah c'était une andouillerie. Maintenant il faut avoir deux albums dans sa discothèque.

WARP RECORDS

       


 

Greenday : Réhabilitation en quelques lignes

       De tous les nécrophiles nécrophages du punk, et en particulier de la vague néo-punk ricain de sinistre mémoire (aussi nommée "punk californien", ce qui veut tout dire...), Greenday est souvent, et à très juste titre, considéré comme l'avatar le plus doué, voir le plus touchant. Certes, Greenday est une photocopie ensoleillée (et donc très paradoxale) des Clash. Un cliché, donc. Mais dans cette visée de devenir le nouveau Last Band In Town, Greenday a trouvé les bonnes portes et surtout (surtout !) les bonnes clefs. Ils ont compris que ce qui faisait le génie des Clash était leur aspect "magma en ébullition perpétuelle". Avec une sincérité sans failles, les Clash mélangeaient les genre, les idées, les émotions. Avec une bonne dose d'intelligence et de maturité, ils nous ont donné les chefs-d'œuvre que l'on sait (cf ma page Clash, on sait jamais finalement). Et Greenday dans tout ça ? Et bien ces ptits gars n'ont pas le génie de la bande à Joe, mais, avec l'âge, l'expérience, le temps, ils ont suivi un parcours exemplaire, une courbe ascendante, sur laquelle (et c'est fichtrement rare !) chaque nouvel album est plus réussi que le précédent. Greenday n'est pas le genre de groupes à avoir tout déballé dès le début, à avoir tout gaspillé plus ou moins à raison, au contraire. Les chefs-d'œuvre sont à venir, c'est pour cela que l'on ne peut parler pour l'instant "que" de "très grands disques" en évoquant Nimrod et Warning. Alors y a quoi donc de bien dans Greenday ? Et bien, une fois éliminés les tics punks lourdauds et la jeunesse, certes attachante mais aussi limitée, des très sympathiques Dookie et Insomniac, il reste des merveilles power pop, punk pop, pop pop ou je ne sais quoi, telles que Redundant et Time Of Your Life. Et des Warning, des Hold On, des Misery... Oh, bien sûr, difficile de classer Green Day auprès de groupes tels que les Pixies ou les Beatles, mais... sait-on jamais ?

 


 

Kraftwerk : Trans Europe Express (1977)

Trans Europe Express

        Cet album historique est une bonne définition du terme : fascinant. Inventant une techno-pop minimaliste et envoûtante, les génies de Kraftwerk venaient tout bonnement de révolutionner la musique. Car c'est la techno qui est en train de naître dans nos oreilles émerveillées à l'écoute de cet album magique. Deux chefs-d'œuvre légendaire dominent le disque. Le tétanisant The Hall Of Mirrors, intriguant, sublime. Et bien sûr Trans Europe Express, merveille absolue d'un groupe inégalable. Indispensable. Et on ne saura trop conseillé l'intégrale de Kraftwerk, au fil de laquelle on reconnaîtra aussi bien Aphex Twin que la techno de Détroit, et à peu près toute la musique électronique de ces 15 dernières années. De Autobahn (qui serait le véritable acte de naissance de la musique électronique, ou du moins son premier chef-d'œuvre populaire) à The Man-Machine (et ses ambiances de villes nocturnes à pleurer d'émerveillement) en passant par Radioactivity (Nine Inch Nails en 1975) et le fastueux Computer World (le Not For Threes de l'époque), tout est en avance de plusieurs millénaires sur son temps. Seul Kraftwerk savait (sait ?) faire du Kraftwerk. Et ils sont  toujours les meilleurs. En tout.

 


 

Frank Black and the Catholics : Dog In The Sand   

publicity1.jpg (36408 octets)

               La pochette est de couleur sable. Il y a Scott, Rich, David, Eric et Frank, les Catholics plus un. Et ce un en plus, le retour de l'enfant bénit (non ce n'est PAS Joey Santiago) est bien le miracle de cet album. Eric Drew Feldman débarque dans le monde de Pistolero et transcende tout l'album. Avouons-le, il est loin de faire tout tout seul, bien sûr. S'il n'y avait pas comme base quelques unes des plus belles compositions de Frank Black en solo, il n'irait pas bien loin le Eric. S'il n'y avait pas la production affolante de Nick Vincent, les discussions entre piano, guitare et voix ne seraient pas aussi splendides. Si Rich Gilbert n'avait pas progressé, ça partirait vite fait dans le fossé. Et même, là, tenez, l'autre fils prodigue, Joey, il est là aussi, sur trois morceaux, mais il faudra y revenir. L'album fait 47 minutes, ni trop court, ni trop long, la durée parfaite, comme au temps des Pixies. 12 morceaux, et on tremble en découvrant la durée du premier, Blast Off, 7 minutes 15. Ce qui en fait la plus longue chanson de la carrière de Frank Black (exception faite de Surf Epic, donc nous allons reparler aussi (décidément)). On s'inquiète, comment va-t-il faire pour tenir la longueur, comme ça, en ouverture d'album de surcroît ? Et bien mes enfants, il la tient la longueur, il l'écrase la longueur, il ne lui laisse aucune chance. A la force du riff (Joey Santiago ? Joey Santiago !!!), de guitare, de piano, de basse, Frank Black assomme, Frank Black fait dans la démonstration de force, Frank Black nous en met plein la figure. Il nous dit : "l'essence du rock, c'est moi qui l'ai, sous clef, je ne la ressors qu'une fois tous les ans et encore." Et dès le deuxième morceau, on comprend. Après avoir dépouillé sa musique jusqu'à la moelle sur les deux premiers Catholics (il suffit de réécouter I Need Peace ou Bad Harmony pour s'en rendre compte), Frank Black reconstruit, peu à peu. Et Dog In The Sand est l'histoire passionnante, ni plus ni moins, que de la résurrection du rock, à l'ancienne, mais dans sa quintessence même. On parle là du Charles Thompson qui avait tué cette musique, toute cette musique qu'il aime, avec ses Pixies. Plaçant une pierre tombale digne de la pyramide de Kheops (Trompe Le Monde) sur le cadavre d'un genre tellement amoché, que cette dernière étincelle de vie n'avait que précipité sa tombée en poussières. Après les autres pouvaient toujours jouer à la nuit des morts-vivants, il ne restait que... du sable... Et c'est avec les cendres du rock que les Catholics font des châteaux aujourd'hui.

        Avec Blast Off et I've Seen Your Picture on est en territoire connu. Frank Black nous assomme et en même temps nous rassure. Pour mieux nous trucider avec St Francis Dam Disaster... Attaque acoustique, voix belle à pleurer (le monsieur a pris des cours de chant !! Affolant... Le meilleur chanteur du monde a pris des cours de chant, et ça s'entend !), banjo déjanté et magnifique, et puis l'Idée, la Notion d'Efficacité, là, juste dans vos conduits auditifs, prenez des notes, et passez des dizaines d'écoutes en boucles avant de comprendre pourquoi nous tenons là l'une des plus parfaites chansons qui soient. Pourquoi tout s'agence de façon miraculeuse, les paroles (merveilleuses, la rupture d'un barrage, mais racontée selon le point de vue de l'eau filant vers la mer et la liberté), tous les instruments, la structure très narrative du morceau. Tout se complète. Et on est pris au piège, on se retrouve ému sans bien comprendre pourquoi, comme quand Black Francis nous racontait des histoires grotesques de E.T.s sur Bossanova. Dans son classicisme bouleversant, St Francis Dam Disaster possède déjà tout pour marquer l'an 2001. Robert Onion, le single qui signe le "grand retour" de Joey Santiago, souffre un peu de l'enchaînement. Très carré, très efficace, mais moins touchant, Robert Onion contribue à cette reconstruction du rock qu'est Dog In The Sand. Mais on s'attendait à être plus impressionné, même si, bien entendu, l'énergie réjouissante du bidule nous transporte juste comme il le faut. Mais déjà, tout est oublié avec l'arrivée de Stupid Me, une ballade piano-voix (avec un écho de guitare surf), qui n'est pas une reprise des Platters. On pense au remake frissonnant de Duke Of Earl, mais on n'a encore rien entendu (faisons durer le suspens et admirons déjà la perfection obsolète de ce si joli Stupid Me).

        Et préparons-nous pour un enchaînement de baffes monumentales. Sur Bullet, cette fois on s'incline, on tombe au sol, en larmes, achevé, détruit, obligé de se rendre à l'évidence. Frank Black est Dieu, la Nature, le Grand Tout. On se fera toujours avoir comme des gosses par ses chansons. On pourra être blasés, vieux, cyniques et fatigués. Quand on tombera devant un morceau comme Bullet, on ne pourra jamais résister. Tout est là (et même un peu plus, forcément, on ne demandait pas à Eric Drew Feldman de sauver l'univers à ce point). Que se passe-t-il ? Où allons-nous ? Dans quel état j'erre ? Revolution Comes ? Nous sommes là, assis sur le sol en ciment, un peu perdu, un peu plus fou, terriblement heureux, et il nous colle son The Swimmer sans nous laisser une seule chance de reprendre notre souffle. Et pendant que se déroule une folie qui renvoie Where Is My Mind au rayon des antiquités, on se dit, soulagé, qu'il ne pourra pas aller plus loin, la seconde moitié de l'album ne pourra pas relever le gant, impossible. Mais impossible n'est pas Frank Black ! Mes enfants je vous préviens, il va aller plus loin que The Swimmer, mais peut-être n'en reviendrons-nous pas. Pause gros rock rustique avec le dantesque Hermaphroditos, qui nous offre, débordant de générosité, le temps d'essuyer les larmes de tristesse et de béatitude qui roulent sur notre visage. Et I'll Be Blue nous ouvre les portes du 7e ciel, l'extase mystique en direct, là, maintenant, surgissant de manière déchirante, prévisible et imprévisible, Frank Black l'a fait. C'est sublime, trop grand, trop fort, trop simple et en même temps, des milliers d'apprentis artistes et de stars encensées n'approcheront jamais la perfection de ces 3 minutes là. Ce I'll Be Blue est là comme une confirmation, il nous confirme qu'au lieu de s'endormir sur ses lauriers, que contrairement à ce qu'une poignée d'abrutis racontent, Frank Black va toujours plus loin, effleurant l'essentiel de ce bon vieux rock, touchant à tout, bâtissant des forteresses électriques avec du sable, et laissant s'envoler doucement ce même sable dans le soleil couchant pour délivrer des ballades en cristal. Il peut tout se permettre, il se permet tout.

        Comme par exemple le rigolo Llano Del Rio, en enchaînement du sommet émotionnel de l'album. Il balance cette folie de country de la 4e dimension, bourrée de références de SF. Avant de poursuivre avec le plus grand morceau de rock'n'roll de tous les temps (euh... d'accord ça se discute, mais pour être dans l'esprit du disque il ne faut pas hésiter à dire haut et fort ce genre de choses), If It Takes All Night. Un truc que personne n'aurait osé depuis la mort de Little Richard et de Chuck Berry (quoi ils sont pas morts ? Enfin, si, théoriquement, ils sont morts). La quintessence de la chanson d'auto-radio pour aller tracer dans les rues le samedi soir. La nique au Springsteen de la grande époque. Frank Black est en train de clouer 2001 avant même que l'année n'ait eu le temps de débuter. Qui osera aller aussi loin, qui pourra aller aussi loin, dans l'efficacité, le plaisir, le classicisme ? Car, ma foi, c'est bien beau d'essayer d'innover en faisant n'importe quoi et en emmerdant son monde. Là, Frank Black se confronte avec les centaines et les centaines de rockers purs et durs qui sont passés avant lui et signe un chef-d'œuvre. Performance folle, incroyable, hors du temps, obsolète et à jamais moderne, forcément, tout Frank Black est là. Et la conclusion belle à chialer qu'est la chanson Dog In The Sand ne laisse plus aucune place à toute vaine tentative d'objectivité. La mélodie de Surf Epic murmure dans ce morceau issue des chutes de Doolittle (!!). Joey Santiago donne de l'infini à son jeu de guitare. Enregistrée à 4h du matin après une nuit complète de prises, ce Dog In The Sand rêveur, gracieux, soupiré par un Frank Black qui signe là son plus bel album de performances vocales, ce Dog In The Sand achève avec panache le disque que l'on rêvait d'écouter, l'antithèse de la déception.

        Il s'en vendra 15 exemplaires (je vais déjà en acheter 10, vous vous débrouillez pour le reste). Et les critiques vont encore trouver des arguments crétins pour taxer Frank Black d'affreux rétrograde et que "les Pixies c'étaient plus original, imprévisible, plus efficace et gna gna gna bavouille bavouille bavouille, on est des vieux nases, blah blah blah". Alors qu'il suffit d'écouter ce disque, pour découvrir le plus beau recueil de chansons rock depuis... foulala... depuis très longtemps croyez-moi. La conclusion ? Ecoutez cet album. Achetez cet album. Gardez précieusement cet album. Dans un an, dans dix ans, il sera toujours là, sans une ride. Dog In The Sand, ah bah ce disque il nous offre l'éternité, personnellement j'ai signé tout de suite... (20/20)

Ma page Frank Black

 

L'avis éclairé et fanatique de Dolmancé :

  Puisqu'il s'agit d'un album, il faut commencer par l'impression général de l'enchaînement des chansons à l'écoute. Et cette impression est, ma foi, proche de l'orgasme perpétuel. Cette délicieuse sensation de mouillage de pantalon n'était pas aussi intense, avouons le, en ce qui concerne les 3 derniers Franky, et pourquoi n'est-ce pas? Etait-ce à cause de la qualité des chansons, comme l'affirme ces ignares de critiques? NON par tous les Dieux du rock Blackien! La cause en était un certain foutage de gueule de la finition, de l'attention portée à l'interprétation, de la trop forte confiance en son génie. Avec ce nouvel album, on se demande se qu'auraient-pu être les 3 derniers opus du maître, si ce putain d'idéal punk était moins présent, si les enregistrements avaient été bien mieux conduits (et non pas expédiés en 2 jours...2 jours mon Dieu!). Ici avec le Dog, même si l'on sait que le 2 pistes a encore sévit, bon nombre de musiciens ont participé, la production et l'interprétation sont irréprochables (arf c'est I'll be blue que j'écoute là...ya un Dieu pour les Fans de Franky...I WILL BE BLUE...). En résumé, l'écoute générale n'est jamais déçue par des défauts purement formels, et ça c'est primordial, on pourrait dire que c'est même déjà gagné!

   Et je ne crois pas si bien dire. L'album commence par Blast off, dont on pourrait penser à l'intro que Frank Black veut ridiculiser Lou Reed. Mais non, ça n'a rien à voir, Blast off est un morceau extrêmement excitant et entêtant, où le génie Blackien rivalise avec le néant guitaristique du pauvre Joey Santiago (qui décidément depuis ce que l'on sait a bel et bien perdu ses deux mains).Et comme une certaine personne de ma connaissance me l'a fait remarquer, les 7 minutes de ce morceau passent comme une lettre à la poste, ce qui est le meilleur compliment que l'on peut faire à une chanson en apparence anecdotique.

 Mais l'anecdotique, Franky s'en charge pour nous le transformer en perle inestimable."I've seen ton picture" en fait les frais : voilà un morceau fin et délicieux qui se goûte sans effort, qui nous berce les oreilles, qui remarquent en passant que, notre grosse peluche chante....mon Dieu...divinement....arf.     

 Oui divin, divin comme ce fuck'in shit kiss my ass put your dick on me j'avale tout "St francis...".Où ici l'on se rend compte que des riffs acoustiques bien soignés sont un bon début à une des plus grandes chansons de sir Charles Thompson. Les textes magnifiques agrémentent un chant dont la grâce nous ferait mourir sur place, car tel est le sort qui nous attend, mourir en écoutant Dog in the sand, Adieu...

 Mais non ,c'est une blague, qui d'ailleurs n'est pas si drôle que ça puisqu'elle me semble très plausible...enfin, hum, voici Robert Onion, dont il ne faut surtout pas avoir peur de dire que c'est de loin son meilleur single depuis "Los angeles". Je l'avoue, Headache est pour moi une des plus faibles chansons du Black, ce qui n'empêche pas que je la vénère gnagnagna...Bon, Robert Onion est la chanson qui nous rappelle le plus l'époque "Teenager of the year",ce qui n'est pas à son désavantage. Ce qui est surtout bluffant ceux sont les enchaînements de ce morceau, où encore une fois mon cœur saigne de joie en s'agenouillant devant la voix de Franky.

 Voix de Franky..."Stupid me"...et bien oui encore une fois nous explosons les limites de la jouissance avec ce morceau, dont la mélodie par tous les Dieux de l'enfer me rend littéralement fou, folie dans laquelle je bascule irrémédiablement dès que ma mémoire me fait revivre LA VOIX de DIEU, en d'autre terme le chant, ici, du chauve est bouleversant de génie.

Il faudra un jour s'intéresser à la dose d'hormone que fait libérer l'écoute d'un Frank Black, la science y trouverait largement son compte.

 La répétition étant fort désagréable, je ne serais pas long sur The Swimmer, qui contient toutes les qualités possibles, en plus d'être une création de l'ami gros bide.

 Si moi aussi j'ai du bide, il se pourrait bien en revanche que je ne sois pas hermaphrodite. Ce qui n'empêche pas le huitième et orgasmiquos morceau du Dog d'être au-delà de l'appréciable, dans les hautes sphères du bonheur le plus pur et désintéressé. Franky chante comme un porc égorgé, ce qui lui va très bien d'ailleurs, avec parfois des accents de soprano shootée à la cuisine californienne, pour le plus grand plaisir de moi en personne !

 Et là...tantantan...qui voici que voilà, hein? "i'll be blue"? Bê oui, et dans ta face même. Ca peut paraître dur comme ça, mais bon la vie réserve de temps à autres (surtout à autres...) des moments où Paf dans ta tronche le I'll be blue, dans ta tronche le chef-d'œuvre, dans ton pif les larmes qui coulent de joie d'être triste. BAM! le riff acoustique qui pénètre dans tes os et te les fait craquer un à un, pas grave le chien ira les cacher dans le sable.

 Après, c'est Llano qui se charge de panser tes blessures, sans trop se faire remarquer d'ailleurs, la discrétion est de mise lorsque l'on suit LE "i'll be blue". Néanmoins un minimum de plaisir est nécessaire pour supporter le coup précédent, et tout cela le petit et gentil Llano le fait très bien.

 Il est difficile de concevoir que, pour une personne comme moi la distribution de compliments est extrêmement difficile. Or ce n'est pas fini. Car voilà, Franky nous assène en avant dernier chef d'œuvre de son chef d'œuvre, "If it takes all night".

Et c'est pas une mince affaire, puisque tout un attirail de superlatif devrait être utiliser afin de le décrire, mais les superlatifs j'en ai marre! j'en ai ras le cul bon dieu, cette chanson est magnifique, jouissive, excitante, cause de pogos dévastateurs, cause d'orgasmes impromptus et...point. Ceci suffira pardieu.

 "Dog in the sand"? et bien une fois que l'on oublie "surf épic", cette chanson se révèle être le trésor idéal pour finir l'album. Néanmoins, il faut pouvoir l'oublier "Surf épic"...

(Note de Ed : Dolmancé s'excuse d'avoir oublié Bullet, chanson sublime aussi, portée par une grande parodie du "son" Joey Santiago).

 


 

Mayhem : A Grand Declaration Of War

mayhem-grand1.jpg (32215 octets)

        Mon premier disque chroniqué en 2001 est sorti en mai 2000.... Ca commence bien. Oui mais je suis désolé, cet album n'est arrivé jusqu'à mes oreilles qu'en janvier de l'an de grâce 2001, et je ne pouvais pas, mais vraiment pas me priver d'en parler. Car voilà, A Grand Declaration Of War est un chef-d'œuvre, un hénaurme chef-d'œuvre, comme il n'en sort jamais plus de 2 ou 3 dans une année. Un disque proche de la perfection, qui surprend, qui enthousiasme, qui fascine, qui impressionne, qui fait régulièrement tomber la mâchoire par terre, voire même continuellement chuter la dentition sur le sol. Ce qui est le cas avec cet album monstrueux, le plus ambitieux et le plus risqué sorti l'année dernière.

        Bon, je vois déjà les questions et les exclamations (voire les insultes) arriver. "Mayhem ? C'est pas ce groupe de Black Métal norvégien, tristement célèbre pour une accumulation de meurtres, suicides, satanisme, horreurs, malheurs, etc.... ???". Et bien, oui, on parle du même Mayhem. Celui de Dead (suicidé), Euronymous (assassiné), Varg (assassin), Hellhammer (le meilleur batteur du monde, le survivant), etc... On parle du Mayhem à qui nous devons le plus bel album de Black Métal des années 90 (De Misteriis Dom Sathanas... hein ? "Black Métal" et "beau", ça ne va pas ensemble ? Oh vous, vous n'avez jamais lu de Baudelaire et n'avez jamais vu de films de Cronengerg, il me semble...). On parle du Mayhem qui, après l'hécatombe, s'est reformé autour de Hellhammer (qu'on ne présente plus), Maniac (le "chanteur" d'origine), Necrobutcher (notez les noms "d'la balle", lui c'est le bassiste, aussi d'origine, avant la "parenthèse" sanglante du début des années 90) et Blasphemer (le remplaçant de Euronymous aux guitares, digne remplaçant). Et alors c'est du métal pour boutonneux ? C'est Spinal Tap ? Oh que non ! Oh que non !

        Car A Grand Declaration Of War, comme je le disais au début, est un album incroyablement riche, intelligent, risqué et en même temps abordable. Et qui enfonce totalement le Kid A de Radiohead dans le domaine du "attention on expérimente mais on reste proche du public avec de vraies bonnes chansons". A Grand Declaration Of War est un concept-album timbré, scindé en trois parties. La première consiste en un Ep sorti en 1998, Wolf's Lair Abyss, qui en 5 morceaux était un grand best of-résumé du Black Métal des origines jusqu'aux plus intéressantes évolutions du genre sur la fin des années 90 (essentiellement sous la poussée de Emperor, le groupe "concurrent" de Mayhem en matière de recherches musicales, on imagine d'ailleurs que Ihshan, le "cerveau" d'Emperor, doit toujours avoir ce Grand Declaration en travers de la gorge, on lui a volé le disque qu'il rêvait de faire). Donc, Wolf's Lair Abyss, c'est encore du Black à l'ancienne, très rapide, très brutal, effrayant, avec un Hellhammer de plus en plus inhumain (si vous n'avez jamais entendu un disque où sévit Hellhammer, vous êtes très loin d'imaginer de quoi il retourne) et un Maniac hallucinant qui empile les pistes de voix terrifiantes.

 

        Puis vient A Grand Declaration Of War, composé des parties 2 et 3. Et là on prend la baffe du millénaire, la claque apocalyptique. On attendait du métal jouissif et enthousiasmant, et on se retrouve avec un disque totalement imprévisible, qui part dans tous les sens, qui ose tout, qui aborde tous les genres. Un album incroyablement ambitieux, qui met des coups de pieds dans toutes les étiquettes pour ne laisser que le chaos au final. Dès l'ouverture avec le morceau titre, on se pose des questions... Un rythme martial, des breaks étonnants, un riff menaçant, lorsque les (oui ! les !) voix arrivent on se tient sur la défensive. Où allons-nous ? On a l'impression de monter (oui ! monter !) vers l'Enfer. Porté par l'incroyable Hellhammer qui s'apprête à nous planter le premier poignard dans le dos sur le second morceau (The Lies Where Upon You Lay). A partir de là on comprend que l'on ne va plus rien comprendre. Tout va trop vite, des breaks partout, des empilements de riffs, des accélérations, une dizaine de variations à la seconde, le dentier tombe sur le sol. Et Maniac nous harangue avec sa voix "normale" (on entend plus sa voix normale que sa voix Black sur cet album, oui je sais ça choque les puristes à la con (les puristes de métal, mon dieu, mon dieu, aussi graves que les puristes de rap, c'est dire...). Avec le génie de faire correspondre, de mélanger, ses différents styles de "chants", Maniac impressionne, et renforce l'impact de paroles moins débiles que d'habitude ( ce n'est plus "Antéchrist superstar" ou "les vikings sont revenus huh huh !", ouf... ouf !). Je disais donc : on ne comprend plus rien à ce qui se passe, le tempo changeant aussi souvent que les ambiances (toujours très sombres et agressives, oui, ne le cachons pas, on est là pour ça quand même. Pourtant, encore plus que De Misteriis, Grand Declaration est un disque vraiment touchant, chargé d'émotions contradictoires, les fans de Nine Inch Nails ou du Velvet Underground peuvent comprendre ce que je veux dire.). Bon alors là on est bien embêté pour savoir dans quel genre de musique on se trouve. Au fil de l'album, Mayhem fait du Black, du Death, du Hardcore, de l'Indus-Electro (? ! ?), de l'Ambient Gothique (!!!), du Hard, du Heavy, du Thrash.... Et bien souvent tout en même temps... Bon sur le morceau 3, A Time To Die, on se dit que là on est dans le Death... ou dans le Speed... enfin on s'en fout, ça va trop vite, ça casse, ça relance, ça lamine, Hellhammer n'est pas humain, non, aucun humain ne peut faire ce qu'il fait... Et on n'est pas prêt de ramener sa gueule pour lui adresser la parole (HAVE I BEEN UNDERSTOOD ???!!!??? ... oui, oui, msieur Maniac, on a compris...).

        Et l'album se poursuit, de plus en plus hallucinant. View From Nihil s'ouvre comme une chute du Waiting For The Worms de The Wall (!!!), pour exploser soudain dans une débauche de métal effroyable, et en même temps tout cela reste vraiment accrocheur, vraiment agréable, on ne s'ennuie pas une seule seconde (c'est dire si les fans de Black Métal ont détesté ce disque...). C'est affolant, affolant, affolant, toujours plus de variations, toujours plus de folie. La deuxième partie de View From Nihil, nous accueille par un duo Maniac normal/Maniac possédé avant de rapidement littéralement exploser sur 30 secondes de silence. Et ainsi nous entraîner dans la 3e partie de l'album. Il Principe. Introduit par quelques mots murmurés... Cette dernière partie, la plus incroyable, vaut à elle seule l'investissement. Cela commence avec le morceau le plus "osé" de l'album, que seul Mayhem pouvait se permettre d'envoyer dans les conduits auditifs des fans de métal (qui ont dû faire des syncopes à répétition...). A Bloodsword and a Colder Sun que cela se nomme. Et pour ainsi dire ce morceau ne ferait pas pâle figure sur le Pretty Hate Machine ou le Downward Spiral de monsieur Trent. Oui, oui, c'est de l'electro indus gothique. Avec une boîte à rythme, des effets electro, et des plages de synthés. Et alors ? Alors c'est sublime. Vraiment. Vraiment excellent. A la hauteur du défi. Le minimalisme s'avère totalement payant, en particulier sur le "refrain" au vocodeur (!!!!!!) tout à fait admirable. La vache ! Incroyable ? Mais vrai ! Après bon on s'embrouille dans les numéros de pistes, tous les morceaux étant découpés, fractionnés, paumés. Disons que je ne vais pas tout vous raconter, parce que sinon où il est l'effet de surprise, hein ? Enfin, même en connaissant l'album par cœur on est toujours surpris... c'est dire... Disons qu'il y a une folie épique et sublime de près de 10 minutes, le plus beau morceau de l'album (avec un pont dark ambient !) ; il y a encore des voix au vocodeur en ouverture d'un morceau hardcore totalement génial ; il y a un phrasé rap perdu dans du black pur et dur ; il y a un morceau caché.... C'est n'importe quoi, c'est excessif jusqu'à l'explosion, cela touche à tout, et cela réussit en tout ! Alors que dire ? Cet album fait du neuf avec du vieux et s'impose sans problème comme le disque de métal (voire de rock en fait), le plus intelligent et le plus réussi depuis... foulalalalalala... depuis... on ne sait plus quand.... un disque de métal intelligent, varié, ambitieux, entièrement réussi ? Personnellement, je n'en ai pas croisé souvent, oui, c'est même un cas d'école. Non, bon, les enfants, je sais que tout cela ne va pas plaire à tout le monde (surtout si ton groupe favori est Supertramp comme dirait Anal Cunt (oui j'ai de supers références moi alors, non, je n'aime pas Anal Cunt, faut pas abuser non plus)). Mais bon, je le clame haut et fort, et encore plus fort que cela : ce disque est un Chef-d'Oeuvre. (20/20 oui ! 20/20 !!) 

 

L'avis éclairé de Dolmancé :

      Ce disque est vraiment tétanisant de génie, il fait froid dans le dos par sa diversité, sa justesse (pas un moment on imagine rire), son lyrisme (je suis fan de Maniac maintenant), et sa faculté à s'ouvrir à autre chose que du Black sans pour autant se trahir. Comme nous l'avions remarqué, ce disque est aussi un hommage à The Wall et à Brian Wilson(?)( cf. les chœurs à la fin du disque),mais il passe en revue toute l'histoire du métal, du Sabbath au Maiden ,en passant par le hardcore puis le néo-métal (si si y a des passages typiquement Faith No More, sans qui le "néo-métal" n'existerait pas). Tout cela, ça va sans dire, de la manière la plus naturelle et la plus grandiose. Inutile de préciser qu'à côté de ce monument de Mayhem, les groupes de métal dont ils s'inspirent (consciemment ou pas) font pâles figures. Je n'écouterais plus de hardcore maintenant sans que mon esprit prenne pour référence ce fameux morceaux (note de Ed : To Daimonion), qui ridiculise tous les bands de hardcore "accrédités".

 


LE TOP MUSIQUE 2000


 

m'écrire

index