Une grande année ? Oui, une grande année, sans nul doute. Tous les genres s'avèrent représentés par des oeuvres majeures, de la pop la plus sautillante aux expérimentations les plus radicales. Parmi mes disques favoris de 2014 cohabitent ainsi sans soucis Swans et Hello Saferide, Thou et Lana Del Rey, Gazelle Twin et The War on Drugs. Si vous ne connaissez pas tout, si vous n'en connaissez que très peu, tant mieux. Vous n'imaginez pas la chance que vous avez de pouvoir découvrir de nouveaux artistes, ce qui devrait vous occuper jusqu'en 2015 et au-delà. Encore une fois, ce fut un déchirement de ne sélectionner que 50 albums et cela m'oblige à laisser de côté de très bons disques. Perfume Genius, Gemma Ray, A Winged Victory for the Sullen, East India Youth, A Sunny Day in Glasgow, HTRK, Liars, Azealia Banks, Iceage, Lykke Li, Scott Walker et Sunn O))), The Men, The Twilight Sad, White Lung, Wild Beasts, et d'autres. Oui, cela fait beaucoup de beau monde et il y aurait presque de quoi faire une liste supplémentaire. Au moins les voilà cités dans cette introduction.

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50

Plaid - Reachy Prints

Tout le monde s'extasie (à raison) sur le retour d'Aphex Twin, mais, pendant ce temps-là, Plaid enrichit sa remarquable discographie. Alors, certes, il est loin le temps où le duo délivrait les albums d'electronica les plus remarquables du tournant du millénaire. Pourtant Reachy Prints en évoque le souvenir avec panache.

Moment inoubliable : les petites mélodies de Hawkmoth, comme à la grande époque.


49

EMA - The Future's Void

Difficile de signer un successeur à la hauteur après un premier album aussi formidable que Past Life Martyed Saints. The Future's Void n'est pas très loin de réussir, en étant à la fois plus classique et plus bruyant. Pas une écoute facile, mais on ne cesse d'y revenir.

Moment inoubliable : "He's soooo blooooonde !"


48

Peggy Sue - Choir of Echoes

Oh quel bel album de rock à l'ancienne ! Avec du soin, du coeur, des idées ici et là, et plein de chansons plaisantes. Choir of Echoes ne bouleverse pas le paysage musical, ce n'est pas son objectif. C'est un recueil, un album comme on parlerait d'album de photographies. Et il se feuillette avec un plaisir sans cesse renouvelé.

Moment inoubliable : Longest Day of the Year Blues, "At least you tried to try..."


47

Pixies - Indie Cindy

OK, c'est avant tout un bon album solo de Black Francis et c'est déjà pas mal. Un album de Frank Black, donc, avec le son des Pixies actualisé pour les années 2010. Franchement ça ne mérite pas les torrents de mépris déversés sur le sympathique Indie Cindy dont les meilleures chansons se réécoutent avec grand plaisir.

Moment inoubliable : la guitare de Joey Santiago s'énerve au milieu de la chanson Indie Cindy.


46

Ben Frost - A U R O R A

Au fil d'une année qui n'aura pas manqué d'albums intéressants mais difficiles à écouter, le petit dernier de Ben Frost se pose particulièrement là. Sa tentative de relier la techno grand public aux expériences bruitistes les plus extrêmes alterne moments d'éclat et d'autres de pure souffrance auditive.

Moment inoubliable : l'impression que cette musique a finalement réussi là où tant d'autres ont échoué : à casser notre matériel audio.


45

I Break Horses - Chiaroscuro

Un album d'electro pop gargantuesque qui essaie de résumer toutes les facettes d'un genre en moins d'une heure. Il y a donc de tout, du plus sautillant au plus dramatique. C'est sur ce dernier point que I Break Horses réussit le mieux, faisant de Chiaroscuro est un disque remarquable et très prometteur.

Moment inoubliable : Medicine Brush, élégiaque au possible, qui, lorsqu'il atteint son point culminant, renverse tout sur son passage.


44

Taylor Swift - 1989

L'album le plus vendu de l'année. Celui qui, à lui seul, a sauvé l'industrie du disque (ou peu s'en faut). Un produit grandiose, manufacturé avec un soin maniaque. Et puis il y a Taylor Swift, dont on ne sait jamais où finit l' innocence et où commence la comédie. Surtout, tiens donc, il y a les chansons, souvent excellentes. Trop facile à détester, 1989 mérite qu'on s'y arrête sans a priori. Pour exemple, quand l'influence de CHVRCHES se fait indéniable (Blank Space, Out of the Woods), 1989 atteint des sommets.

Moment inoubliable : "And haters gonna hate, hate, hate, hate, hate..."


43

Caribou - Our Love

On peut toujours compter sur Dan Snaith pour faire danser intelligemment. Our Love n'est pas du niveau d'Andorra et de Swim, il n'en demeure pas moins un album aussi ludique que touchant.

Moment inoubliable : Can't do Without You.


42

Warpaint - Warpaint

Un groupe de filles qui fait du rock rêveur avec soin et passion, que peut-on ne pas aimer ? Leur deuxième album produit, par Nigel Godrich et Flood, est cotonneux à souhait. De belles mélodies percent ici et là, rendant l'écoute aussi plaisante qu'intrigante.

Moment inoubliable : Disco/Very, soudaine montée du rythme pour un morceau inattendu au coeur de l'album.


41

Kate Tempest - Everybody Down

Du hip-hop 100% britannique et 100% féminin. Il faut l'écouter pour le croire, la réussite est totale. C'est à la fois l'un des meilleurs albums du genre sortis en 2014 et un tour de force qui ne laisse pas une seule minute de répit.

Moment inoubliable : le groove irrésistible de The Beigeness.


40

FKA Twigs - Lp1

Tout le monde l'adore cet album, mais j'avoue avoir un peu de mal avec le chant de FKA Twigs qui en fait vraiment des tonnes. Voilà, c'est dit. Il n'empêche que musicalement et avec l'aide de la production d'Arca, cet album est une merveille.

Moment inoubliable : la production, donc, véritable révolution dans le monde du R'n'B.


39

Flying Lotus - You're Dead!

Jazz, hip-hop, rock, funk et tout le reste, boum ! Dans le chaudron ! Flying Lotus secoue, remue, rajoute. La tambouille palpite et déborde. Cela donne You're Dead!, un album moins hyperactif et finalement plus attachant que son monument Cosmogramma.

Moment inoubliable : l'enchaînement des 5 premiers morceaux de l'album, qui laisse pantois.


38

Ex Hex - Rips

Rock'n'roll, baby ! Des riffs et des minauderies, des chansons de moins de trois minutes et des refrains gros comme des bagnoles des années 50. Faut pas demander plus. Et d'ailleurs on n'a pas besoin de plus quand l'ivresse est aussi pure.

Moment inoubliable : les premières mesures de Don't Wanna Lose, qui te disent tout, tout de suite.


37

First Aid Kit - Stay Gold

Difficile de croire que l'un des albums les plus "américains" de 2014 est en fait l'oeuvre de deux suédoises. Ah, sacré suédois, rois et reines de la musique pop (on les recroisera plusieurs fois au sein de ce top). Ici c'est du folk rock intemporel, avec les deux voix complémentaires des soeurs Söderberg. Une écoute agréable et très attachante.

Moment inoubliable : le refrain de Stay Gold.


36

Angel Olsen - Burn Your Fire for no Witness

Là, en voilà du vrai bon rock "de fille". Angel Olsen c'est une guitare, une voix et un album sur des bases classiques et mille fois parcourues. Oui, classique, mais pour le meilleur, grâce à une personnalité qui transparaît sur chacune des compositions.

Moment inoubliable : la ballade dépouillée, Enemy.


35

Grouper - Ruins

Un piano et une voix, juste ça. Et pourtant Ruins se mérite tout autant que les oeuvres les plus clairement difficiles de 2014. Avec une écoute distraite, on a le sentiment de n'avoir quasiment rien entendu. C'est en fait de l'ambient minimaliste, mais avec des paroles, qu'il faut aller chercher au loin, derrière un léger brouillard, derrière les gouttes de pluie sur les fenêtres. Ruins demande à être vraiment écouté, avec sensibilité, avec un réel intérêt. Et on se retrouve alors au plus près d'une artiste bouleversante, juste à côté d'elle, dans son salon.

Moment inoubliable : le bip solitaire d'un four à micro-ondes à la fin de Labyrinth.


34

Sharon Van Etten - Are We There

Encore un grand disque de folk rock, plein de ruptures douloureuses et de chants cathartiques. Sharon Van Etten s'est surpassée en délivrant son plus grandiose opus.

Moments inoubliables : La fresque Your Love is Killing Me et "Everytime the sun comes up I'm in trouble..."


33

Sun Kil Moon - Benji

La grande exhibition de Mark Kozelek qui met son âme à nue au fil de ce très long album où rien ne sera épargné pour fendre le coeur de l'auditeur. On meurt beaucoup dans Benji et les ténèbres planent sur toutes les chansons. Kozelek sait être un sale type (ou jouer très bien ce rôle) mais sa musique, et surtout ses paroles, sont désarmantes.

Moment inoubliable : Trop nombreux pour être cités, Benji est presque embarrassant tant il est sincère.


32

Esben and the Witch - A New Nature

C'est l'histoire d'une rencontre idéale : un groupe post-gothique, sous l'influence de Cure et de Siouxsie and the Banshees, croise le chemin de Steve Albini et de sa production rugueuse. Le résultat est atmosphérique au possible. La musique semble aussi proche de nous que perdue dans une jungle nocturne et hostile. La voix de Rachel Davies surplombe l'ensemble avec ferveur.

Moment inoubliable : les 14 minutes de The Jungle.


31

Run The Jewels - Run The Jewels 2

Le meilleur album de rap de 2014 confirme que la collaboration entre El-P et Killer Mike est actuellement la plus passionnante du genre. On y retrouve tout ce qui peut faire l'intérêt d'un grand disque de hip-hop : des textes personnels et puissants soutenus par une production démoniaque.

Moment inoubliable : Lie ! Cheat ! Steal ! Kill ! Win ! (everybody doin' it !)


30

Saint Saviour - In The Seams

Un chef-d'oeuvre de "chamber pop", avec le petit orchestre, le piano et la voix fragile qui plâne au-dessus des tourments humains. L'exécution est très classique, mais aussi très classe. Le chant de Rebecca Jones fait toute la différence et les émotions deviennent insoutenables.

Moment inoubliable : le refrain de Nobody Died, il faut avoir ni coeur, ni âme pour ne pas être dévasté.


29

Fennesz - Bécs

Le pape de l'ambient bruitiste revient avec son album le plus accessible. Pour ceux qui ne connaissent pas, il faut l'avouer, c'est assez spécial. Fennesz travaille à partir du larsen pour créer des morceaux délicats et d'une beauté unique en son genre. Il faut se laisser porter, c'est comme naviguer sur un océan où les vagues, parfois déchaînées, n'engendreraient aucune crainte.

Moment inoubliable : le maelstrom du morceau Bécs, lentement transpercé par une douce mélodie.


28

The Antlers - Familiars

Il semble loin le temps où The Antlers offrait avec Hospice un chef-d'oeuvre novateur qui n'a toujours pas pris une ride. Le groupe est désormais apaisé et offre avec Familiars un album au son extrêmement cohérent et réconfortant. C'est élégant, subtil, parfois émouvant, avec une trompette au premier plan presque tout du long. C'est surtout d'une beauté à couper le souffle.

Moment inoubliable : cette trompette, là, partout, mazette !


27

Andy Stott - Faith in Strangers

Andy Stott explore de plus en plus les terres de l'ambient et joue avec parcimonie de ses rythmes. L'efficacité est décuplée et Faith in Strangers est souvent imposant. C'est un disque qui intimide. La voix d'Alison Skidmore est toujours aussi divine et offre l'indispensable contrepoint à la musique.

Moment inoubliable : l'arrivée des basses et des percussions dans Violence.


26

St Vincent - St Vincent

Célébré partout, concurrent numéro 1 de FKA Twigs et de The War on Drugs au titre de disque de l'année dans la presse spécialisée, le quatrième album de Saint Vincent possède beaucoup d'arguments en sa faveur. C'est surtout la suite logique de la carrière d'Annie Clarke mais on doute que ce soit son accomplissement. On est aussi en droit de préférer certaines de ses précédentes oeuvres. Sans nier une seule seconde la qualité de celle-ci.

Moment inoubliable : le refrain de Psychopath, une des chansons les moins appréciées de l'album. A tort.


25

Hurray for the Riff Raff - Small Town Heroes

Le meilleur disque de country de 2014 dépasse évidemment les frontières de son genre. Féministe, engagé, universel comme peuvent l'être les oeuvres très personnelles, Small Town Heroes est une collection de chansons ciselées à la perfection.

Moment inoubliable : The Body Electric, une "murder ballad" du point de vue de la victime : "tell me what's the man with a rifle in his hand Gonna do for a world that's some sick and sad ?"


24

Thou - Heathen

Pour ceux qui estiment qu'on ne peut pas faire plus éprouvant que les opus de Swans, un petit tour par le dernier album de Thou peut s'avérer une expérience amusante. Du "sludge metal", pire que du "doom", une musique pesante comme le destin, étouffante comme un ciel de plomb ; couronnée, cerise sur le gâteau, d'un chant hurlé d'une laideur à faire peur. Les morceaux sont longs comme un jour sans pain, interminables, éprouvants ; chaque interlude acoustique se mérite comme une goutte d'eau dans le désert. Mais, mais, mais, c'est affreux ? Oui. Et c'est justement ça qui fait toute la force cathartique de cette musique terrifiante et sublime.

Moment inoubliable : la progression implacable de Free Will jusqu'au moment où le chant surgit au bout de 5 minutes et que tout espoir est définitivement abandonné.


23

The Pains of Being Pure at Heart - Days of Abandon

Alors oui, c'est un peu un blind test où il est aisé de reconnaître ici le riff de This Charming Man des Smiths, là la mélodie de Black Cab de Jens Lekman, ailleurs une montée en puissance qui n'est pas sans rappeler Rise and Shine des Cardigans. Les chansons de Days of Abandon sont tellement accrocheuses qu'on a le sentiment de les connaître depuis toujours. Et c'est un compliment, un vrai de vrai.

Moment inoubliable : la longue déclaration de Beautiful You qui finit par tout emporter sur son passage.


22

Aphex Twin - Syro

On n'attendait plus vraiment le retour de Richard D. James et surtout pas à ce niveau. Certes, Aphex Twin ne révolutionne plus vraiment la musique mais il demeure unique. Les morceaux de Syro sont un ajout de grande qualité à son oeuvre et rien que pour cela, l'artiste a eu raison de revenir.

Moment inoubliable : dès les premières secondes de Minipops67, on se souvient, on se rappelle, on a 20 ans de moins, c'est comme si c'était hier...


21

Dum Dum Girls - Too True

Etrangement mal aimé, cet album des Dum Dum Girls est un recueuil de perles pop-rock, un coffret plein de rubis et d'émeraudes. Un peu de New Wave, un peu synth pop, un peu rock à l'ancienne et beaucoup, mais alors beaucoup, de charme.

Moment inoubliable : "Too true, to be gooood..."


20

Against Me! - Transgender Dysphoria Blues

Un album qui rappelle que le punk rock n'est jamais aussi bon que lorsqu'il y a une vraie colère à sa source. Ici il s'agit du changement de sexe du chanteur (désormais chanteuse) et compositeur principal du groupe. Au sein d'un milieu particulièrement homophobe (et même misogyne), on imagine sans mal le courage nécessaire et les épreuves traversées. Les fantastiques chansons de Transgender Dysphoria Blues en sont un témoignage percutant.

Moment inoubliable : le riff de la chanson Transgender Dysphoria Blues qui réveille en quelques instants l'âme du punk.


19

Woods of Desolation - As The Stars

2013 était l'année du crossover du black métal vers le grand public grâce à Sunbather. En 2014, l'effet de mode est évidemment retombé, laissant les merveilles du genre aux seuls amateurs éclairés. Les australiens de Woods of Desolation auront néanmoins tiré leur épingle du jeu avec As The Stars, un disque aussi radical qu'étrangement beau.

Moment inoubliable : "EVERYTHIIIINNNGGG !!!!" et le cataclysme reprend sur Like Falling Leaves.


18

Future Islands - Singles

L'album pop qui a bousculé tous les autres albums pop en 2014. Il faut dire que la passion de Samuel Herring est communicative, son chant et ses performances scéniques auront marqué l'année. Avec sa ribambelle de chansons imparables, Singles est devenu un incontournable.

Moment inoubliable : la petite mélodie de Back in the Tall Grass et bien sûr l'interprétation de Seasons au show de David Letterman.


17

Arca - Xen

Producteur star du moment (pour Kanye West ou pour FKA Twigs), l'argentin Arca est encore plus intéressant lorsqu'il vole en solo. En fait, si l'album d'Aphex Twin est une plongée nostalgique, Xen est le prolongement contemporain. L'écoute n'en est peut-être pas aisé de prime abord, mais il ne faut pas longtemps pour découvrir l'exceptionnelle sophistication de cette musique. Sonorités inédites, constructions délirantes, au service de morceaux passionnants.

Moment inoubliable : le crissement à la base du morceau Xen et la manière dont l'artiste l'enrobe peu à peu pour créer une musique magnifique.


16

MØ - No Mythologies to Follow

La danoise MØ oeuvre dans la pop taillée pour les radios et Youtube, généralement celle qui m'horripile au plus haut point. Mais, allez comprendre, dans son cas les chansons sont bien supérieures au tout-venant. En ajoutant à cela un chant plutôt plaisant et des arrangements très efficaces, on obtient un album accrocheur en diable.

Moment inoubliable : les "Hey ! Hey ! Hey !" de Glass.


15

Pharmakon - Bestial Burden

Dans une année peu avare en disques éprouvants, c'est Pharmakon qui remporte une nouvelle fois la partie. Un album concept dédié à la désintégration du corps, vécue comme une trahison et une menace omniprésente. Si le sujet paraît guilleret, mis en musique cela devient une épreuve qu'aucun film d'horreur ne parvient à approcher. Il faut avoir envie de hurler en choeur avec Pharmakon, au moins intérieurement, pour vraiment apprécier Bestial Burden. Dans ce cas, il s'agit d'un album rien de moins que vital.

Moment inoubliable : tout l'album, et en particulier le rire final qui plonge dans la démence.


14

Yob - Clearing the Path to Ascend

Le succès crossover du Métal en 2014. Du doom/sludge (encore) monumental. Quatre morceaux pour une durée d'une heure, déjà, ça annonce la couleur. Epique et lyrique, la musique de Yob s'avère d'une rare puissance, même lorsque le chant se fait borborygmes. L'album en lui-même est moins imposant que celui de Thou, mais il est aussi beaucoup plus accessible. Avec la chanson finale, Marrow (18 minutes, tranquilou), avec ses "clean vocals" et son côté "power ballad", on atteint une extase inespérée.

Moment inoubliable : "Time to wake up" et Marrow, donc, chef-d'oeuvre transcendant.


13

Todd Terje - It's Album Time

Qu'il s'abandonne totalement au dancefloor le plus kitsch ou qu'il rende amplement hommage à Kraftwerk, Todd Terje a offert l'album le plus joyeux de 2014. Un vaste bonheur.

Moment inoubliable : Bryan Ferry en invité de luxe sur Johnny and Mary.


12

Spoon - They Want My Soul

Les rois du rock indépendant reviennent au sommet avec un album phare au sein de leur remarquable discographie. Presque trop parfait pour son propre bien, They Want My Soul résume tout ce qui fait le prix de Spoon, de la section rythmique irrésistible aux chansons entêtantes.

Moment inoubliable : le petit gimmick siffloté de Knock Knock Knock.


11

Swans - To Be Kind

Si To Be Kind finit aux portes du top 10 c'est un peu parce que ses allures de The Seer 2 lui enlève une part d'effet de surprise et d'originalité. Ceci dit, plus accessible (enfin, tout est relatif), ce monstrueux album n'en est pas moins aussi indispensable. Mais, on le répète, vous vous y aventurez à vos risques et périls...

Moment inoubliable : "TOUSSAINT ! L'OUVERTOOOOUUUURE !!" (et les chevaux, bien sûr...)


10

Lana Del Rey - Ultraviolence

L'archétype de l'album qu'on aborde avec méfiance et même avec des a priori négatifs et qui nous gagne peu à peu. En anglais on appelle ça un "grower". Ultraviolence grandit, grandit, grandit et on réalise, des mois plus tard, qu'on l'a écouté des dizaines de fois avec toujours plus de plaisir. De loin le meilleur disque "grand public" de l'année.

Moment inoubliable : le dernier refrain de Brooklyn Baby : "Yeah, my boyfriend's pretty cool, but he's not as cool as me..."


9

Hello Saferide - The Fox, The Hunter and Hello Saferide

Le secret Twee le mieux gardé de Suède, le pays qui, encore une fois, nous réserve la meilleure pop de l'année. C'est un album minuscule et adorable, bouleversant dans son intimité. La mélancolie et la joie sont présentes à foison, mais toujours avec une discrétion précieuse. Même lorsque le rythme s'emballe, la musique d'Hello Saferide et la voix d'Annika Norlin demeurent d'une délicatesse émouvante.

Moment inoubliable : le refrain infinitésimal de Dad told Me ou la perfection pop absolue de I Was Jesus.


8

Jenny Hval and Susanna - Meshes of Voices

Jenny Hval, c'est mon "crush" vocal du moment. Elle peut chanter tout ce qu'elle veut, je suis amoureux. Son chef-d'oeuvre, Innocence is Kinky, aurait très bien pu terminer sur la plus haute marche du podium l'année dernière. Meshes of Voices est une collaboration avec sa compatriote Susanna Wallumrod, composée en 2009 et donc moins aventureuse que le travail récent de Hval. Néanmoins, la fusion entre la voix grave de Susanna et celle, si étrange, de Jenny Hval confère aux morceaux une beauté indicible.

Moment inoubliable : la mélodie inattendue entonnée par Jenny Hval au coeur de Medusa, l'instant musical le plus sublime de 2014.


7

tUnE-yArDs - Nikki Nack

Merrill Garbus sait tout faire et c'est peut-être pour cela qu'elle énerve autant de gens. Elle sait être drôle comme terriblement sérieuse. Parfois elle chante n'importe quoi, parfois elle trouve les paroles politiques qui font mal. Enfantine ou inquiétante, la musique de tUnE-yArDs ne se donne aucune limite. Les chansons sont tordues en tout sens, telles des marionnettes. Nikki Nack est à la fois ludique et intelligent, une merveille.

Moment inoubliable : l'interlude drôle et effrayant autour d'un dîner à base de nourrissons.


6

Gazelle Twin - Unflesh

Comme Pharmakon, Gazelle Twin évoque les tourments du corps sur Unflesh. La musique est plus abordable mais pas moins radicale et les sentiments sont, évidemment, à fleur de peau. Unflesh sait être implacable aussi bien qu'apaisé, ou plutôt résigné. Une expérience bouleversante et la révélation de 2014.

Moment inoubliable : les premiers instants de l'album : un cri, une rythmique écrasante puis "It's coming at me, it's coming at me, it's coming at me..."


5

Marissa Nadler - July

En se faisant produire par un spécialiste du métal extrême, Marissa Nadler a trouvé un écrin à la mesure de ses compositions grandioses qui ne reposent pourtant que sur sa voix et des arrangements discrets. Aucun disque de folk n'a approché la grandeur de July cette année.

Moment inoubliable : Dead City Emily, forcément, mais aussi la première occurrence du refrain de Drive.


4

The New Pornographers - Brill Bruisers

Il faut être rudement blasé pour considérer The New Pornographers comme faisant simplement partie du décor et dont on pourrait balayer chaque nouvel album comme juste sympathique. Brill Bruisers est un nouveau chef-d'oeuvre de power pop, par le groupe qui a produit le plus de tubes depuis le début du millénaire. Oui, chaque chanson du groupe est un hit en puissance qu'il suffit d'entendre une fois pour ne jamais oublier. Brill Bruisers en est un nouvel exemple fracassant.

Moment inoubliable : Dan Bejar sur scène avec le groupe, pour la première fois en Europe.


3

Hundred Waters - The Moon Rang Like a Bell

Comme je l'ai déjà écrit, il s'agit de l'album de 2014 qui est parvenu au mieux à concilier expérimental et accessibilité au plus grand nombre. La musique est complexe, les compositions ambitieuses et pourtant The Moon Rang Like a Bell coule de source. On peut écouter le disque en boucle sans jamais se lasser. Avec une oreille distraite, c'est un accompagnement sonore délicieux. Avec une oreille attentive, on ne cesse d'y découvrir des détails merveilleux.

Moment inoubliable : l'épanouissement progressif de Murmurs, qui part d'une toute petite boucle vocale pour exploser aux quatre coins de l'espace.


2

The War on Drugs - Lost in the Dream

Il est numéro un presque partout ailleurs et c'est, sans doute, le disque de l'année 2014, celui qui a fait la course en tête du début à la fin. Pourtant, sur le papier, c'était loin d'être gagné. Du rock à la papa, qui évoque Dire Straits, Tom Petty et Springsteen sans la moindre ironie, difficile d'imaginer que Lost in the Dream pourrait fédérer toutes les générations. Et pourtant. Le secret est si évident : de bonnes chansons. Tout simplement. De bonnes chansons. De très grandes chansons, plutôt. Et une ambiance sincère, un peu mélancolique, peu à peu irrésistible. L'émotion est partout, dans le moindre solo de guitare, qu'elle soit électrique ou acoustique, dans la moindre intonation d'Adam Granduciel et dans la moindre mélodie. Un disque immense, beau comme un souvenir.

Moment inoubliable : "Like a light that's drifting... in reverse, I'm moving..."


1

Manic Street Preachers - Futurology

Oui. Des "vieux de la vieille" à la première place. Et non, ce n'est pas qu'un geste nostalgique, justement. Quand un groupe, après plus de vingt ans d'existence, arrivé à son douzième album, parvient à la fois à réaffirmer son identité et à réinventer sa musique, on tire son chapeau, on s'incline, on applaudit. Célébrer la nouveauté, je l'ai fait, amplement, au fil de ce classement. Mais au final, je vais saluer l'éternelle jeunesse des Manic Street Preachers.

Moment inoubliable : Tout l'album, qui ne se scinde pas et s'écoute d'une seule traite.

 
 
 
 
 
 
 
 
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