no-regrets.jpg (10124 octets)    - No Regrets (1993)

        Faye Wong a débuté sa carrière sous le nom de Shirley Wong et dans le plus pur style canto-pop qui se vend par millions d'exemplaires à HK, à Taiwan, au Japon.... Ses premiers efforts sont à réserver aux fans purs et durs, il va sans dire. En 1991, elle part faire ses études aux USA. A son retour, la petite Shirley a grandi et se lance (enfin) dans la musique avec un réel intérêt. Shirley devient Faye et Coming Home est un peu son Help à elle. Toujours canto-pop mais avec une ambition naissante et une voix de plus en plus tétanisante. No Regrets est presque un double album avec Coming Home et il est tout à fait recommandable pour ceux qui veulent connaître le début de l'histoire ou pour les fans de belles mélodies qui ne reculent devant rien (et ils ont bien raison). Pour les autres, les arrangements canto-pop risquent de leur rester en travers du conduit auditif.


hundred-whys.jpg (9806 octets)    - Hundred Thousand Whys (1993)

    Si No Regrets était le Help de Faye Wong, Hundred Thousand Whys est son Rubber Soul. Faye part dans tous les sens, commence à expérimenter, chante comme personne et reprend du Barry White avec sa voix d'elfe éthérée. On croise même Tori Amos et Police, c'est n'importe quoi et c'est splendide. Et du dingue Flow To Fly au superbe Tempt Me, Hundred Thousand Whys annonce la suite avec une débauche de magie des plus enthousiasmantes.


faye-sky.jpg (11474 octets)     - Sky (1994)

        Pour tous ceux qui sont vraiment effrayés par la pop HK et qui se demandent pourquoi j'en fais des tonnes autour de Faye Wong, voici le premier indispensable. Certes pour ceux qui sont allergiques à la pop musique en général il vaut mieux se rabattre sur "l'intellectuel" Impatience ou des albums plus récents chez EMI, mais pour tous les autres, le premier achat obligatoire c'est cet album en mandarin, qui est un super best of de ce que la pop asiatique dans sa forme la plus "classique" peut offrir. Sky n'est ni plus ni moins que l'un des albums pop les plus réussis des années 90. Seulement 10 titres, les mêmes que sur l'album Random Thinking (chanté dans le cantonais habituel à Faye, celui-là, préférez Sky, juste pour noter le changement), mais quels titres ! Cela débute sur la chanson titre, qui hésite entre pop fort classique (la batterie qui craint, le solo de guitare qui fait peur) et luxe sans limite (l'ouverture et la fin, sublimes). Et on enchaîne sur l'une des plus belles chansons de Faye, Chesspiece, qui a elle seule justifie l'achat de cet album. Arrangements sans limites, voix à pleurer, 150 mélodies à la minute, à ce niveau ce n'est plus de la sucrerie, non, non, ça ne colle pas aux dents, ça coule de source comme de l'eau claire. Sky est le grand disque "bleu" de Faye Wong, de la pochette à la tonalité des chansons, tout est bleu et angélique. Et si on trouve sur son chemin la traduction des paroles, on se rend compte que ce n'est pas aussi gnan-gnan que ça en à l'air. Certes, il faut aimer le genre, mais la voix de Faye parvient à tout transcender, tout ! Pour preuve, la reprise d'une chanson des Cranberries, infâme groupe s'il en est, qui fut la musique du chef-d'œuvre absolu Chungking Express (vous savez, cette merveille dans laquelle joue Faye). Et bien ce Dream Person de sinistre mémoire est tout simplement métamorphosé par la délicatesse de Faye. Sky est un disque pur, vivant, léger, parfait pour toutes les heures de la journée et pour toutes les saisons, un trésor de discothèque comme tous les disques de Faye Wong, d'ailleurs.


faye-di-dar.jpg (7160 octets)     - Di-Dar (1995)

        Album de transition, comme le sera Faye Wong (le disque), Di-Dar schizophrénise juste comme il le faut. Sur la majorité de bonnes vieilles ballades à l'ancienne, il y a des restes de la période Coming Home/No Regrets, mais déjà les ébauches des chefs-d'œuvre à venir (déjà plus qu'annoncés par Sky). Le résultat est toujours d'une incroyable richesse mélodique (d'une indécente richesse mélodique, oui, pour nous occidentaux élevés à l'ultra-light), mais souffre par moment d'arrangements limites. Mais bon, il y a sur cet album, outre la chanson titre (parfaite), le sublime Vacation, l'aussi sublime Lost Track, le tubesque Scandalous et l'apothéose Comet (dernier morceau du disque, en mandarin).


        Une voix, une simple voix. Quelque part entre Julee Cruise et Liz Fraser. Une voix divine, angélique, céleste. Heavenly Voice. Une voix qui se pose sur une musique délicate, riche de mille et une mélodies. Une voix qui murmure des textes tristes, si tristes, si poétiques. Une voix qui flirte avec les étoiles et les nuages. Une voix qui passe du rire aux larmes, de la gaieté la plus enfantine à la souffrance la plus adulte. Une voix qui sait tout faire et qui nous guide au fil des jours, nous rassure, nous protège et nous conduit dans des contrées où nous n'iront jamais. Une voix de l'autre bout de la planète, si lointaine et si proche, une voix qui n'appartient pas à notre univers et que rien ne peut ternir, ni le temps, ni l'argent, ni la routine, ni les autres. Une voix de statue de marbre, une voix de déesse antique ou de fée technologique. Une voix dont la fragilité est la plus grande des forces, une voix qui tremble avec assurance, une voix qui n'a pas peur d'avoir peur, une voix qui ne craint pas d'être nue, de se dévoiler au plus profond tout en restant d'une retenue et d'une pudeur émouvantes. Une voix qui, dès la première fois où on l'entend, fait revivre mille et un souvenirs. Immédiatement cette voix fait partie de nous, elle est notre amie, elle a toujours été là, elle sera toujours là. Si douce, si vivante, si surprenante.

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        Cette voix c'est Faye Wong. La plus grande star de la chanson asiatique. Pour comparer, on pourrait dire qu'elle est la synthèse entre Madonna-Céline Dion-Britney Spears..., je veux dire, au niveau de la popularité. Au niveau du talent et de la grâce, elle est incomparable, elle est unique. Qu'une telle personnalité, qui vend des millions de disques, qui fait des pubs à foison, qui se produit à guichets fermés lors de concerts dantesques, qui enchaîne les tubes plus vite que les Beatles en 1964, qui produit deux albums sublimes par an, qui, à peine à 30 ans, a déjà 10 ans d'une carrière incroyable derrière elle. Que cette personne incarne comme nulle autre toute la magie de la musique, tout ce qui fait le plus grand charme de la pop. Que cette star se permette de délivrer quelques uns des albums à la fois les plus inventifs et les plus directement mélodiques et agréables des ces dernières années. Que Faye Wong soit la chanteuse la plus "complète" et la plus attachante de notre époque, c'est sans aucun doute le plus grand miracle du monde de la musique de la fin du siècle et du début du tout nouveau tout beau 21e.

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        Choisir un album de Faye Wong ? Choisir une chanson de Faye Wong ? Totalement impossible. Si on peut bien sûr préférer ses plus grandes réussites (son début de carrière très "canto-pop" étant dispensable), difficile de faire des choix parmi ses chefs-d'œuvre. Un album ? Plutôt Sky et ses ballades bleues ? Impatience et ses expérimentations délicieuses dignes du Revolver des Beatles ? Toy, juste pour Undercurrent, la plus belle chanson du monde ? Scenic Tour, pour le choc du plus incroyable mélange de genres et d'émotions que l'on puisse entendre ? Only Love Strangers, qui porte la magie Faye Wong vers de nouvelles hauteurs ? Fable, véritable chef-d'œuvre de l'année 2000, synthèse musicale entre orient et occident ? Non, il faudrait parler de chaque disque de Faye Wong, de chaque chanson. Ou alors, on se tait, on ne dit rien, on ne réfléchit pas, on se laisse porter par la poésie vibrante de la plus délicate voix que l'on puisse imaginer.

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        Et pour cela, Impatience est l'album parfait. Un disque concept, d'à peine 35 minutes. 10 morceaux très courts, dont près de la moitié sont des instrumentaux ou des folies à base d'onomatopées. On n'est pas surpris d'apprendre que les Cocteau Twins ont offert deux chansons à Faye Wong. Oui, il y a du Cocteau Twins chez Faye Wong, mais celle-ci va bien plus loin. D'une part parce qu'elle est LA voix et d'autre part parce que ses ambitions, ses idées musicales (Faye est toujours bien entourée, avouons-le) sont inédites et infiniment surprenantes pour nous autres occidentaux. Surprenantes pour tout le monde, vu que cet album a totalement désarçonné le public HK, ce qui n'empêcha pas le disque de se vendre par camions (pour donner un ordre d'idées, c'est comme si Kid A de Radiohead vendait autant que le dernier Britney Spears). Plus près de nous encore, ce déjà mythique Fable, sorti à l'automne 2000, retrouve cette folie créatrice, osant aller encore plus loin pour nous offrir le véritable premier album du nouveau millénaire. Mais dès 1996, pour son dernier album chez Cinepoly (et avant l'arrivée fastueuse chez EMI), Faye Wong avait obtenu carte blanche, composant seule la quasi intégralité du disque et révélant un génie musical déjà plus ou moins discrètement à l'œuvre au coeur de ses premiers disques. Impatience est peut-être l'album pop le plus réussi des années 90. Et oui.

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        Pas de "track by track" pour un album concept. Surtout pour un album concept de Faye Wong. Vous entrez dans son monde avec la piste 1 et vous en sortez... et bien vous n'en sortez jamais plus... Et vous passerez des dizaines et des dizaines d'écoutes en boucles à essayer de saisir ce qui fait l'essence de cet album, de cette voix. Pourquoi tout cela est-il si fascinant ? Si indescriptible ? Cette musique échappe au mot. Quand on pense la saisir, elle nous file entre les doigts comme du sable. Faye Wong est telle son personnage dans Chungking Express de Wong Kar Wai, rêveuse, imprévisible, un peu dingue, totalement bouleversante, gamine et déterminée, elle est toutes les femmes en une. Et elle est belle comme un ange. Est-ce trop ? Faye Wong est-elle définitivement "too much" ? Oui et non. Oui, trop parfaite, trop talentueuse, trop populaire, trop sublime, Faye Wong est un être qui ne devrait pas exister dans notre monde radicalement imparfait. Non, parce que Faye Wong est une créature onirique, un mythe, une idéalisation. C'est une femme comme les autres (enfin... presque...), mariée, mère adorable, avec ses faiblesses et ses contradictions, avec ses doutes et ses coups de poker. Mais sa musique efface la réalité pour ne laisser place qu'à la légende. Faye Wong ne vieillit pas, toujours à la limite entre l'adolescente et l'adulte. Faye Wong peut tout se permettre, comme créer l'une des plus belles chansons de l'an 2000 uniquement pour accompagner une pub pour shampooing. Faye Wong n'existe pas, même sur les milliers de photos people, même après ses conférences de presse mégalomanes, après ses concerts qui font passer Mylène Farmer et Shania Twain pour des ploucs, même après avoir donné son visage pour illustrer des canettes de Pepsi, Faye Wong demeure hors du monde. En clair ? Faye Wong est la dernière Star.

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        Faye Wong, c'est la fragile silhouette blanche qui jouait avec le vent dans le clip de Sky. Faye Wong c'est l'éternelle enfant qui s'amuse avec tout et rien. Faye Wong c'est celle qui a offert sa voix pour le jeu vidéo le plus romantique de l'histoire, Final Fantasy VIII. Faye Wong c'est celle qui peut nous emmener où elle veut, quand elle veut. On l'attendra un an et un jour, et bien plus. On guette chacun de ses disques, en sachant qu'elle nous ouvrira la porte d'univers inconnus, que même s'il nous faudra parfois longtemps avant d'entrer dans son jeu, on sera toujours conquis, séduit, enchanté jusqu'à la fin des temps. Faye Wong n'est pas une voix magnifique parmi d'autres, Faye Wong est LA voix. La voie, serais-je tenté de dire, la voie vers le ciel, le 7e, le 8e, le 9e, au-delà des paradis et des limites de l'univers. Plus rien ne compte, il n'y a plus que Faye Wong et moi. Le rêve reste un rêve et c'est ce qui fait tout son charme. J'aime Faye Wong.


faye-wong-cd.jpg (7813 octets)    - Faye Wong (1997)

        Premier album chez EMI. Faye, au lieu de mettre de l'eau dans son vin, se sent pousser des ailes. Album de transition qui annonce Scenic Tour et qui clôt la période Cinepoly, Faye Wong part dans tous les sens et passe du rock à la ballade pop sans faire de pause. Certains se perdront en route, d'autres tomberont amoureux pour le restant de leurs jours. Les Cocteau Twins sont une nouvelle fois au rendez-vous sur deux titres excellents. Je précise que ce sont encore les ballades à l'ancienne qui dominent. C'est du grandiose et la (les) pochette est à l'image de l'album : so spacious...


89-97.jpg (7325 octets)     - 89-97 32 Collection

        La meilleure (double) compilation de la période Cinepoly. On retrouve des chansons du tout début sur le deuxième disque (qui feront rigoler les gens peu fréquentables) et les chefs-d'œuvre 93-97 tirés de Hundred Thousand Whys, Di-Dar ou bien encore de Toy. Mais pas de Sky, car ceci est une compilation cantonaise. Et bien tant mieux, ça vous obligera à acheter Sky. Et de plus, et c'est là l'intelligence de cette compilation, il n'y a rien d'Impatience. Forcément, on ne charcute pas le chef-d'oeuvre.


scenic3.jpg (9109 octets)     - Scenic Tour (1998)

        Bon, pour moi c'est peut-être le plus grand album de Faye. Mais c'est assez difficile à dire. C'est surtout le premier dont j'ai fait l'acquisition et ce fut une sévère baffe dans la gueule. On croit être blasé, avoir tout vu et tout entendu et on se prend Scenic Tour en plein dans la figure. C'est sublime d'un bout à l'autre. Enfin... presque. On occultera gentiment le dernier morceau, étrange folie dancefloor basée sur la voix de la fille de Faye et qui fait figure de Revolution 9 de l'album. Tout le reste est génial. De l'ouverture tourmentée de Emotional Life à la délicatesse de Red Bean, en passant par Forbidden Love, Scenic Tour est un album parfait pour toute discothèque parfaite. De la magie par intraveineuse, juste pour bien comprendre qu'il n'y a rien de mieux que Faye Wong.


faye-eyes-on-me25.jpg (6837 octets)    - Eyes On Me (1998)

        La chanson thème du RPG Final Fantasy VIII de Squaresoft. Le jeu, comme la plupart des productions Square, est un chef-d'œuvre. Moins marquant que les 6e et 7e opus, le 8e possède néanmoins un charme délicat qui lui donne une place à part dans la saga. Souvent mal aimé par des fans qui ne comprennent rien à rien (et qui lui préfèrent le laborieux épisode 9) ; FF8 marque surtout par son romantisme exacerbé, où des scènes brutales souvent très sombres cohabitent avec des instants vraiment en apesanteur (le baiser dans l'espace de FF Le Film mais à la puissance 1000). Même si le 7 reste indétronable du titre de "meilleur jeu vidéo de tous les temps", FF8 parvient à faire exister des caractères splendides, en particulier l'hilarant et bouleversant Laguna. La chanson de Faye, composée par le génie qui s'occupait de la série des FF, Nobou Uematsu, est le "love theme" du jeu. Le thème principal dans le cas de FF8. Emouvant au possible dans le contexte du jeu (surtout dans ses versions instrumentales, la plus belle restant la version uniquement piano dans ce fameux "tiny little bar"), Eyes On Me s'écoute fort bien en single. Et c'est avec cette chanson que Faye a étendu sa popularité au Japon et un peu partout dans le monde. Avec le temps qui passe, Eyes On Me devient une amie très chère.


only-love-cd.jpg (4442 octets)    - Only Love Strangers (1999)

        Entre deux albums, Faye n'a pas fait grand chose à part se faire payer un petit million de dollars pour chanter Eyes On Me, thème de Final Fantasy 8 et plus beau single de l'année 1999. Trois fois rien pour celle qui peut sortir deux chefs-d'œuvre en six mois. Pour preuve, cet album, monstrueux, aussi réussi que Scenic Tour, qui contient un nombre indécent de chansons parfaites. Plus occidentale, mais pas moins inspirée, Faye excelle à la fois dans le rock pur et dur (Spring's Last Blossom qui fait la nique à Radiohead, Century Of Loneliness le plus beau morceau pop rock de 99 et Spectacular, thème d'une pub Pepsi, qui renvoit Garbage chez sa mère) et dans la ballade ambitieuse (Moon At The Moment, Butterfly, Passing Clouds...). Tout cela constitue un album très abordable, très impressionnant, qui permet à Faye de s'installer durablement "on the top of the world" et de faire oublier toutes nos pseudo "divas" à la con (de Madonna à Céline Dion en passant par Britney Spears et Bjork). Cet album s'est vendu à des millions d'exemplaires, mais pas en occident. Bah tant pis pour ceux qui en sont encore à la domination anglo-saxonne, ils passent à côté de la plus belle pop du monde. Enfin, soyez prévenus, à ce rythme, les prochains albums de Faye seront tellement fabuleux que même les Roswelliens reviendront sur Terre pour les acheter.


faye-hk-scenic-tour.jpg (13731 octets)    - Faye HK Scenic Tour 98-99

        Faye Wong en concert, un double disque, que des tubes, tellement de tubes que l'on overdose rapidement. Elle se permet même de reprendre Bohemian Rhapsody et on lui pardonne car c'est une version sublime. Elle pourrait nous chanter du Céline Dion qu'on l'adorerait encore (et on adorerait la chanson de Céline). Enfin bon bref, trop de bonheur, forcément, car tout est là et même plus. De Emotional Life à Undercurrent en passant par Sky, Lost Track, Dream Person, Wishing We Last Forever, Love Commandments, Di-Dar, I'm Willing... En 10 ans de carrière, Faye Wong possède plus de tubes que Abba et Madonna réunis, c'est une folie interplanétaire, comme si Julee Cruise possédait la notoriété de Britney Spears et la productivité de Prince. Quelque part, c'est vrai, ça fait peur...


top-faye-wong-fable.jpg (5454 octets) - Faye Wong : Fable (2000)

        Je préviens tout de suite, cet album en est en fait deux. Pile en son milieu, Fable devient un tout autre disque dont je parle séparément. On le sait depuis Impatience, Faye Wong est la seule star internationale (?) qui parvient à mélanger expérimentation et pop la plus pop sans se perdre en route. De plus en plus ambitieuse, elle enchaîne les chefs-d'œuvre. Avouons-le tout de suite, un peu comme Kid A auquel on pourrait le comparer (chacun dans son (ses) domaine(s)), Fable aurait pu être un chef-d'œuvre absolu et définitif. La fusion post-apocalyptique de tous les genres, toutes les ambiances, tous les instruments. Le tout dans une super-production hallucinante (Michael Jackson à côté c'est du lo-fi). Et tout est là ! Mais morcelé, brisé, inachevé, on flirte avec le sublime et l'on ne va pas suffisament jusqu'au bout du rêve. Car finalement, après le choc qu'est la première moitié de l'album (qui enfonce les rigolos de Goldfrapp, Massive Attack & co...), on commence à réaliser qu'il manque ce qui a toujours fait le charme de Faye Wong : la légèreté. Car, que tout cela est bien sérieux, que tout cela est bien sombre, que tout cela est bien occidentalisé (horreur !). Et le doute a à peine le temps de s'installer qu'arrive le morceau 6, un délire bubble-canto-pop, plein de sonorités rigolotes et d'échos sautillants. On croit rêver. Mais voilà, la schizo est super à la mode, et Faye Wong vient de délivrer le disque le plus schizo qui soit. Car la seconde moitié de Fable est un album de Faye Wong à l'ancienne, avec des ballades sublimes et toutes simples, légères, gracieuses. C'est à peine si l'on note que la production est vraiment hallucinante. Un coup d'œil à la pochette (toujours aussi conceptuelle et impossible à ranger) et on comprend. Première moitié du disque composée par Faye Wong, deuxième moitié par les bons vieux C.Y. Kong et Adrian Chan. Et à part la piste 9 qui rappelle de façon troublante les chocs que furent Spring's Last Blossom et Century Of Loneliness en 99, cette seconde partie de Fable nous ramène en 1994. Et cette rupture très nette de l'album en fait l'un des disques les plus difficiles de l'année. Solution : programmer ! 1-6-2-7-3-8-4-9-5-10-11-12 et hop ! Reconstituez par vous-mêmes l'un des plus grands disques de l'année. Ce qui serait en fait une hérésie vu que les 5 premiers morceaux racontent l'histoire du monde en épisodes. Aller, je vous l'avoue, cet album je n'y suis toujours pas "entré" comme il le faut. Et j'ai bien l'impression, hein, je vous le dis comme ça, que c'est un chef-d'œuvre qui tait son nom, un grand classique qui se cache. Et par instant, à l'écoute de ces cordes torturées, de ce piano léger, de cette voix belle à pleurer, on effleure le mystère de Fable, l'album "universel" de l'année, le trésor enfoui de l'an 2000, prêt à étinceler quand son heure sera venue.


    Faye Wong (2003)

        Avec beaucoup de retard, j'évoque le dernier album en date de l'égérie de The Web's Worst Page. Après l'incroyable Fable (sans doute, rétrospectivement, le meilleur album de l'année 2000, devant Sigur Ros, Grandaddy et même Eels), on demandait à la Miss de nous emmener encore plus loin que ne l'avait fait ces trois derniers chefs-d'œuvre. Et on n'est (presque) pas déçu, même si l'ensemble est moins impressionnant de prime abord. Le morceau d'ouverture, Wings Of Light, est une nouvelle fois une claque monumentale. Une ouverture pop classique avec petit riff accrocheur, un refrain totalement métal, un break avec des cordes, une coupure à base de sons électroniques, encore des grosses guitares. Difficile de s'en remettre. Le morceau pop-rock le plus ambitieux depuis... le précédent album de Faye Wong. La deuxième chanson est une ballade légère et toute simple, pleine de grâce. Et puis la voix, qui est, ne l'oublions pas, la plus belle du monde. Sur la piste 3, Faye se fait plaisir en imitant les Cardigans (groupe culte en Asie, forcément). Donc on se jurerait perdu dans un inédit de Life (le meilleur album "léger" des Cardigans). Cela fait "pap pap padadapapap". Il y a une petite flûte et des violons qui sautillent. La pop 60's dans les années 2000 (et presque dans l'espace). Beau. Sur le morceau 4, Faye essaie de nous refaire Fable, avec ses ambiances Portisheadiennes et sa contrebasse rêveuse. On comprend alors ce qui ne va pas. Les morceaux les plus novateurs de Fable étaient tous signés Faye Wong. Sur le nouvel album, il n'y a pas de morceaux signés Faye Wong. Ca sent le disque de transition, tout cela, pour occuper le terrain (un artiste HK se doit de sortir au moins un album par an, c'est dans le contrat). Bon, bah, les enfants, si tous les grands artistes nous pondaient des albums commerciaux de ce niveau, on n'aurait plus de soucis à se faire. Tout peut aussi s'expliquer par le fait que c'est le dernier album de Faye pour EMI (et c'est aussi pour cela qu'il se nomme comme son premier album pour la maison de disques).

Faye Wong, presque la plus belle femme du monde

        Cinquième morceau, une ballade très classique, héritée de la première période de la chanteuse. C'est superbe, mais juste grâce à la Voix. Sur la piste 6, Evening Party, on reste dans les tempos lents avec une errance en demie-teinte, intrigante. La Voix ondule, murmure, se tait lors de breaks en apesanteur sur piano lointain et guitare fantomatique. Quelques cordes laissent planer une sourde menace, mais tout au fond du mixage, presque inaudibles et pourtant omniprésentes. Un sommet. La chanson 7, Wandering Red Shoes, est une valse électrique déjantée. Accordéon synthétique, bruitages Casio, orgue Charlie Oleg, voix triste (n'oubliez pas que la Voix ne chante que des chansons tristes à mourir), refrain sur un "la lalala" guerrier, on croirait une version post-post moderne d'un tube français des années 40. Une chanson réaliste qui part dans tous les sens. Une trompette passe, un piano aussi, une guitare électrique qui sonne comme un synthétiseur cheap, des effets de stéréo. Personne n'oserait faire cela. Faye Wong existe. Heureusement. Chanson 8, Idiot, qui attaque comme un inédit de David Arnold pour ses BOs fantasmées de James Bond. Voix saturée, effets électroniques et cordes enroulées sur elles-mêmes. La Voix surnage en décalage sur ce maelström sonore. C'est du bizarre, de l'étrange, plein de faux breaks et de vrais silences fantastiques. Le morceau 9 débute comme un bidule dancefloor et se poursuit sur un "poum-tchak" dance brutal. Aie, Faye Wong repart dans ses fantasmes "eurodance", qu'en est-il de ce nouvel essai ? Et bien ça ne sonne pas si mal. Même si la voix de Faye n'est pas vraiment fait pour cela. La musique est pleine d'audaces et de samples timbrés (un chanteur d'opéra passe, ou bien... mais qu'est-ce donc ?). 

        Le morceau 10, met le piano en avant et la guitare rock en arrière, on n'est pas là pour plaisanter. Même si l'on peut regretter la légèreté d'autrefois, on applaudit des deux mains aux tentatives toujours renouvelées de rendre des morceaux classiques plus originaux tout en plaçant avant tout le plaisir de l'auditeur. Et ça marche, avec un joli refrain, très mélodique sans être vulgaire. Et vous savez ce qu'il y a de bien avec Faye Wong ? C'est qu'elle vous donne toujours TOUT ce que vous êtes venus chercher. Car le morceau 11 est une ballade triste, délicate, piano et Voix. En fait c'est le remake de la cinglée chanson 7. Juste avec piano et voix. C'est là que l'on se rend compte de la qualité de composition, jamais prise en défaut. Un parfait morceau de fin. Mais non, ce n'est pas fini ! Car il y a un disque bonus (comme toujours). Pas moins de cinq chansons supplémentaires.

        Première chanson. Cela débute avec un orgue totalement obsolète et une mélodie triste. Mais dès que la voix de Faye surgit, on pleure, on ne sait pas pourquoi, mais on pleure. C'est beau comme Sally Yeh chantant dans The Killer, c'est beau comme un générique mélancolique de film HK. Oui, c'est de la canto-pop. Et vous n'allez pas aimer cela. Surtout lorsque la batterie et les cordes vont arriver pour un refrain aérien comme un final de Final Fantasy (les jeux). Et vous aurez tort, si vous me permettez cette remarque. Le morceau suivant est une petite perle pop, incroyablement efficace, qui semble couler de source (pour employer une image bien clichée). La 3e chanson ne cesse d'accumuler les faux départs comme pour mieux nous surprendre, pourquoi le pipeau ? pourquoi la rythmique jungle ? pourquoi cet aspect si joyeux que l'on ne peut s'empêcher de sourire en l'écoutant ? pourquoi la déprime est-elle fini ?? Le morceau 4, on le connaît, il est sur l'album. Et le morceau 5, aussi. Simplement ils sont chantés en cantonais et non en mandarin (si je ne m'abuse, c'est l'habitude).

        Ouf. Si je vous dis que vous pouvez aussi trouver cet album avec un autre single en bonus, vous comprendrez que vous en aurez largement pour votre argent. Je résume. Moins impressionnant et sans doute moins novateur et réussi que Scenic Tour, Only Love Strangers et Fable, cet album, titré une nouvelle fois Faye Wong (comme son premier album pour EMI en 97) mérite de toute façon l'achat (ou au moins l'écoute attentive). Parce que Faye Wong a toujours la plus belle voix (pardon, Voix) de l'univers, que sa musique est toujours plein de surprises et de mélodies, de coups de théâtre et de folies que personne ne se permet en occident. Que si vous cherchez un album de pop, il n'y a pas mieux en ce moment. C'est un disque triste, gai, sombre, lumineux, il y a de tout et même plus. Et puis, comme le confirme une nouvelle fois la sublimissime pochette, elle reste la plus belle chanteuse de notre planète.

 

Depuis, Faye Wong a pris sa retraite. Elle s'occupe de ses enfants et de ses rentes. Et rien ne prévoie un retour à la musique de la dame. The End...

 
 
 
 
 
 
 
 
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