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Gorky's Zygotic Mynci : Sleep/Holiday

 

 

        Comme je le disais au moment de la sortie de Sleep/Holiday, la discrétion des Gorky's Zygotic Mynci devient proverbiale. Plus leur musique devient apaisée, intime et fragile, plus le groupe semble disparaître à notre vision, s'évanouir dans le brouillard du petit matin. Car, non, ce n'est pas demain que les Gorky's recevront les faveurs des médias et du grand public. Plus le temps passe, plus une carrière à la White Stripes ou même à la Grandaddy s'éloigne de leurs ambitions. Ils se sont installés à la campagne et regardent filer l'existence avec nostalgie et humour. Avec sagesse.

        Le seul véritable défaut de Sleep/Holiday est d'être finalement trop similaire, dans son ambiance et dans son propos, du magnifique How I Long To Feel That Summer In My Heart qui l'avait précédé. Il apparaît comme une coda luxueuse au chef-d'oeuvre du groupe, mais sans surprises et avec une qualité de composition globalement moins mémorable. Et même un vilain faux-pas dès la seconde chanson de l'album. Heureusement, cette faiblesse est unique. Car Sleep/Holiday, considéré en lui-même, est un disque d'une grâce infinie, peuplée de mélodies cristallines, de textes acerbes ou mélancoliques, d'arrangements somptueux et d'une âme tremblante.

        On a envie de prendre soin de cet album, de ce groupe, tant, même sous leurs aspects les plus folks et les plus exaltés, ils semblent fragiles et un peu errants. La bande son des journées d'introspections un peu grises et un peu ensoleillées, en mars, en septembre, ou n'importe quand, ou tout le temps. Et après deux longues fresques silencieuses, Sleep/Holiday se conclut sur une composition parfaite, bouleversante dans sa délicatesse onirique, saisissante parce qu'elle semble s'adresser directement à nous, sans l'intermédiaire d'un quelconque support, ni d'une quelconque technologie. Il n'y a plus que la voix d'Euro Childs et nous. Et l'on reste sous son charme, longtemps, très longtemps après la fin du disque.