Top cinéma d'Edwood - année 2010

Il ressemblait à cela en 2005

30 films, dans l'ordre alphabétique

Une seule oeuvre par réalisateur

 

 

2001, l'Odyssée de l'espace de Stanley Kubrick

Le devenir de l’humanité. Avec Nietzsche et Hegel en ligne de mire. On ne peut pas prétendre que le 2001 de Kubrick soit une œuvre humble et discrète. Bien au contraire, il s’agit du sommet de la science-fiction cinématographique. Débordé par l’ambition, le film se permet tout, jusqu’à l’abstraction. Un écran noir comme éternel retour, des litanies de musique concrète comme guides, il faut ressentir avant d’essayer de comprendre. Ensuite, chacun interprète, avec ses références, sa grille de lecture et le sens qu’il souhaite donner à l’existence. On peut donc trouver autant de visions de 2001 qu’il y a de spectateur. Il faudra donc avoir bien peu d’estime de soi pour demander : « Mais qu’est-ce que tout cela signifie ? ». L’œuvre donne toute liberté à l’esprit.

Les sublimes instants de vide sont d’angoissantes évocations de la solitude absolue de l’espace, mais aussi des moments où le spectateur se retrouve seul avec lui-même, face au film et à ses trous noirs. La raison voudrait encadrer la démarche de Kubrick, dans des barrières techniques et des termes critiques faciles à maîtriser. Mais nous sommes vite dépassés par la richesse des possibilités. Peu importe la propre interprétation du réalisateur, comme Hal et comme Bowman, la créature échappe à son créateur. Dieu ? La Nature ? Les extra-terrestres ? La puissance de la pensée ? Le metteur en scène ? Le spectateur ? Ils sont tous à égalité, engloutis par le monolithe.

 

 


A history of violence de David Cronenberg

Après avoir failli se perdre dans l'auto-parodie, Cronenberg s'offre une nouvelle vie avec ce film tout en... faux-semblants. Il trouve avec Viggo Mortensen un acteur fétiche à sa mesure et parsème son oeuvre d'incongruités. Le polar psychologique à l'ancienne devient une révolution du film noir.

 

 


L'Age d'or de Luis Bunuel

Plus qu'un manifeste surréaliste, L'Age d'or est le point limite d'un mouvement, d'un style. Ensuite, Luis Bunuel créera des histoires et des personnages, pour englober ses rêves et ses cauchemars. Les grands chefs-d'oeuvre viendront (Los Olvidados, Viridiana, Belle de jour, Le Journal d'une femme de chambre...). Mais L'Age d'or demeure, fidèle à son titre, sublimant son programme. Le film brûle et fait table rase, rien ne sera plus comme avant.

 

 


Barton Fink de Joel et Ethan Coen

La création comme Odyssée minimale et intérieure. On y croise les monstres les plus étranges... Le plus joyeusement effroyable des contes des frères Coen, Barton Fink distille sa richesse en douceur. L'un des films les plus bizarres de l'histoire du cinéma, qui hante à jamais.

 

 


Batman le défi de Tim Burton

Le chef-d'oeuvre de Tim Burton est aussi le blockbuster le plus étonnant de l'histoire récente d'Hollywood. Hymne nihiliste, ode au sado-masochisme, hommage barré à tout le cinéma bis et incarnation idéale de l'esthétique gothique pleinement recyclée par le 7e Art, cette suite est non seulement très supérieure à l'original, mais aussi un inoubliable OVNI. L'univers de Burton est ici au sommet de sa noirceur, refusant le "happy end" lors d'un final tétanisant, qui laisse la part belle aux "méchants" plus humains que les humains. Et bien sûr, Michelle Pfeiffer trouve avec Selina Kyle/Catwoman le rôle plus emblématique de sa carrière, en dominatrice cuir et latex.

 

 


Black book de Paul Verhoeven

Pervertir le thriller hitchockien, apprivoiser l'histoire du cinéma et l'Histoire du monde pour en trouver la quintessence cinématographique. Paul Verhoeven se transcende et livre un film à la fois divertissant et terriblement intelligent. Immense.

 

 


Candyman de Bernard Rose

La plus luxueuse série B du monde de l'horreur ? Peut-être. De sa mise en scène à son interprétation, tout fait de Candyman une oeuvre à part, trop belle pour son statut de petit divertissement du samedi soir. Il suffit de repenser à son histoire, d'une intelligence rare et d'un grand pouvoir d'évocation, ou à sa musique (signée Philip Glass) pour se rappeler de la qualité unique de ce film méconnu mais attachant.

 

 


Casablanca de Michael Curtiz

"Play it Sam... Play As time goes by..."

 

 


Chantons sous la pluie de Stanley Donen

La comédie musicale suprême et l'un des rares exemples de films absolument parfaits.

 

 


Citizen Kane d'Orson Welles

Celui auprès duquel tout ce qui s'est fait avant et après est comparé. Trop beau pour être vrai, Citizen Kane peut facilement être échangé par le terriblement bancal et terriblement génial La Soif du Mal.

 

 


Cœur de verre de Werner Herzog

L'indescriptible conte de la folie extraordinaire, signé Herzog. Un film hors de tout. Hors du temps et des critères les plus reconnus de la rationalité en particulier. Autre, ailleurs, inclassable, insaisissable, à l'image d'une séquence finale hallucinante, parmi les plus belles du cinéma.

 

 


Comment je me suis disputé (ma vie sexuelle) d'Arnaud Desplechin

Le plaisir du texte, plus fort que celui du sexe ? On en parle beaucoup dans le chef-d'oeuvre générationnel de Desplechin. A la fois du sexe, mais aussi, et surtout, du texte. La jouissance du verbe, l'orgasme du bon mot, le coït en forme de joutes verbales ou l'onanisme du monologue. Un plaisir renouvelé à chaque vision, d'une justesse absolue, d'une émotion pénétrante...

 

 


Dark Crystal de Jim Henson et Frank Oz

Bien avant le Seigneur des Anneaux et Avatar, bien avant l'avènement du tout numérique et de la 3D, The Dark Crystal avait prouvé que l'on pouvait créer un univers d'Heroic Fantasy entièrement libéré de notre réalité, sans pour autant sombrer dans le ridicule. Certes, il faut être réceptif à l'esthétique du film, entièrement tourné avec des marionnettes et des effets mécaniques datés mais d'une poésie attachante. Mais ce qu'avaient fort bien compris Jim Henson et Frank Oz, c'est que peu importe l'intensité visuelle, l'essentiel c'est d'avoir une bonne histoire et de bons personnages. Pour se faire, The Dark Crystal se joue du manichéisme et n'hésite pas à adopter la noirceur des plus terrifiants contes de fée. Pour mieux nous éblouir lors du final cristallin.

 

 


The Devil's rejects de Rob Zombie

En cherchant au-delà du point limite, Rob Zombie va plus loin que le simple hommage à la Tarantino. Il en garde le ludisme trash, mais brutalise tous les repères. Son apologie des pires et essentielles mythologies des USA dépasse toute forme de violence pour culminer en des émotions aussi contradictoires que gorgées de malaise. Le Mal le plus pur est le plus séduisant. A la fois révoltant et touchant. The Devil’s Rejects se construit ainsi en miroir de La Maison des 1000 morts, quand les tortionnaires deviennent victimes et que l’on finit par prendre leur parti. Jusqu’au rejet  absolu. Œuvre extraordinaire de cinéma, le film est une épopée américaine d’effroi et de légende, voisine des romans de Cormac McCarthy. There will be blood !

 

 


Excalibur de John Boorman

La puissance du mythe, retranscrite comme jamais sur un écran de cinéma. C'est cela que propose Excalibur, oeuvre miraculeuse qui vient chercher au coeur des artifices chrétiens des légendes du Graal, la part de symbolique païenne si fondamentale. D'où ce sentiment de fin des temps qui imprègne l'oeuvre, portée à des hauteurs bouleversantes par des interprètes habités et des choix musicaux formidables (Wagner en tête, qui n'a jamais été aussi bien utilisé dans un film). Le chef-d'oeuvre absolu de John Boorman est aussi, dans son réalisme poétique, dans sa force évocatrice, le plus intense des films épiques.

 

 


Fire Walk With Me de David Lynch

Certes, le film ne serait sans doute pas aussi génial sans la série Twin Peaks qui l'a précédé. Pourtant, j'ai découvert Fire Walk With Me avant d'acquérir l'intégrale de ladite série. Et je suis tombé fou amoureux de cet électrochoc, fou amoureux de Laura Palmer et de la tragédie qui traverse ces existences. Dans un délire surréaliste, enfin totalement affranchi de toutes les règles, David Lynch signe son chef-d'oeuvre émotionnel (et sans doute son chef-d'oeuvre tout court), provoquant des torrents de larmes par la puissance de ses symboles, par l'intensité des passions. On peut réfléchir pendant des années sur les sens (et l'essence) de Fire Walk With Me, comme on peut tout aussi bien se laisser porter, bouleverser, déchirer par la violence de ce film terrifiant et délicat.

 

 


Ghost in the shell de Mamoru Oshii

Pour tricher un peu avec le classement, je pourrais placer à égalité Ghost In The Shell et sa suite Innocence. Deux chefs-d'oeuvre qui évoquent avec une rare justesse la possible disparition de l'humanité. Disparition de l'humain, pour mieux le retrouver sous d'autres formes. Et ainsi les cyborgs, les programmes informatiques de perpétuer la philosophie, la littérature, l'émotion, avec de nouvelles nuances, de nouvelles illusions, de nouvelles quêtes. Avec une intelligence sans faille, Oshii signe des oeuvres radicales, d'une rare perfection plastique et thématique. D'une maîtrise qui donne le frisson. Les deux Ghost In The Shell sont peut-être les plus grands films de science-fiction de l'histoire du cinéma... après 2001, l'Odyssée de l'espace, s'entend bien...

 

 


Heavenly Creatures de Peter Jackson

Comme The Lovers, la merveille de Peter Jackson parle d'amour absolu en faisant autant rire que pleurer. Et Dieu sait que l'on rit aux éclats et que l'on pleure comme jamais on n'a pleuré devant Créatures Célestes. Dans un coup de génie unique, Peter Jackson reconstitue un fait divers sordide en le filmant comme le Seigneur des Anneaux. En un tourbillon de mise en scène, ultra sensoriel et instinctif, qui vous saisit à la gorge dès le pré-générique pour ne plus jamais, non ne plus jamais, vous abandonner. Heavenly Creatures est une oeuvre traumatisante, qui renouvelle l'expérience cinématographique en prouvant que l'on peut céder à tous les délires formels tout en restant en permanence au service de son histoire et de ses personnages. Pour son premier rôle, Kate Winslet devient la plus belle femme du monde et Peter Jackson accède à une place particulière au sein du 7e Art. Place qu'il ne cesse de mériter à chaque nouveau film. Le bonhomme est un authentique génie, sans doute fort bien secondé par la sensibilité de sa femme et collaboratrice principale, Fran Walsh. Un génie qui n'hésite jamais à aller jusqu'au bout de ses idées, aussi risquées, aussi délirantes soient-elles. Heavenly Creatures ne ressemble à aucun autre film, et la tragédie qu'il met en scène en est magnifiée.

 

 


Il Etait une fois dans l'Ouest de Sergio Leone

Je suis amoureux de Kill Bill de Quentin Tarantino, mais pour une fois, revenons aux sources. Et si la meilleure adaptation de bande dessinée de l'histoire du cinéma n'en était pas une ? Dans son découpage, dans son ampleur, Il était une fois dans l'Ouest a tout du Comics ciselé. Mais c'est avant tout une merveille de 7e art. Cadrage, musique, chorégraphie, le film de Sergio Leone est renversant de beauté, tout en restant simplement drôle, palpitant, divertissant. Fichtre !

 

 


Les Innocents de Jack Clayton

Le plus grand film Fantastique de l'histoire du cinéma est aussi le plus effrayant. C'est un modèle d'adaptation littéraire, qui use de tous les codes du 7e art pour mieux retranscrire l'indescriptible. Ambigu, d'une angoisse progressive et insoutenable, d'une splendeur de chaque instant, Les Innocents est sans pareil.

 

 


The Lovers de Tsui Hark

Peut-être le film le plus triste du monde. En tout cas la plus belle histoire d'amour jamais contée sur un écran de cinéma. Et un geste radical de la part de Tsui Hark, qui certes, ruera de manière encore plus évidente dans les brancards avec des chefs-d'oeuvre dévastateurs tels que The Blade ou Time and Tide. Un geste audacieux, car le génial réalisateur s'empare d'une légende intouchable et d'un opéra populaire pour leur offrir son style inimitable. The Lovers appartient à Tsui Hark de la première à la dernière image. Dans ses délires de mise en scène, dans ses filtres inattendus, dans ses brusques ruptures de ton. Pendant les 2/3 du film, on rit, on s'amuse, on s'attendrit, on tombe amoureux de Charlie Young, l'actrice la plus craquante qui soit. Et soudain, la tragédie devient absolue, l'histoire d'amour explose en un crescendo émotionnel quasi insoutenable. Nulle surprise que la Terre entière se mette à trembler, tant on se dit que le film est quasiment au bord de se fendre sous la puissance inégalée des sentiments ainsi mis à nus. Et Tsui Hark d'enchaîner les plus éblouissantes images que l'on ait pu admirer au cinéma. Et quand Charlie Young pleure des larmes de sang, on se dit que non seulement The Lovers est le film le plus triste du monde, mais que c'est aussi le plus beau...

 

 


Le Miroir d'Andréi Tarkovski

Le chef-d'oeuvre insurpassable d'Andréi Tarkovski est peut-être, plastiquement, le plus magnifique qu'il m'ait été donné de voir. Chaque plan est conçu, éclairé, enluminé, comme un véritable tableau. Le Miroir est un "paysage mental", une réflexion complexe, d'une profondeur affolante, sur la mémoire et sur l'identité. Au seuil de la mort, que reste-t-il à l'homme à part ses souvenirs ? Quelle fut sa réalité ? La subjectivité est mise en abîme jusqu'à perdre le spectateur, qui pourtant ne cesse de revenir auprès de ce film fascinant, pour en saisir les nuances, pour en appréhender la richesse. Le Miroir rend humble, le Miroir rend meilleur, le Miroir rend heureux. Inutile de se demander pourquoi certains spectateurs venaient en larmes remercier le réalisateur après certaines projections de ce monument transcendant. Rarement oeuvre aussi intime et personnelle aura été aussi universelle.

 

 


Mon voisin Totoro d'Hayao Miyazaki

Le spectateur se laisse emporter par cette oeuvre trop courte, mais dont les ouvertures vers l'infini des souvenirs d'enfance et de l'imagination en général compense la durée. Si Nausicaä possède l'aura un peu brute des films fondateurs et si Chihiro dévoile la sagesse majestueuse de l'accomplissement, Totoro est le coeur des créations d'Hayao Miyazaki, ce chef-d'oeuvre universel est ce qu'il nous a donné de plus remarquable et de plus émouvant.

 

 


Monty Python Sacré Graal de Terry Jones et Terry Gilliam

Sacré Graal est un modèle d’écriture comique, soignant tous les éléments clef du genre. L’ampleur de la construction du film n’est pas évidente de prime abord, tant le résultat s’avère tout simplement drôle. Pourtant du moindre running gag (les noix de coco) au délire le plus longuement construit (le lapin de Troie), chaque enchaînement, chaque chute tombe avec une justesse qui assure la solidité de l’édifice dans son ensemble. L’accroche de l’affiche était joyeusement ironique : « Le film qui fait passer Ben-Hur pour une publicité. » Et pourtant rien n’est plus vrai : Sacré Graal est un monument de cinéma.

 

 


Le Nouveau Monde de Terrence Malick

La débutante Q'Orianka Kilcher sublime le film. Sa grâce angélique irradie aussi bien les jeux innocents que le désespoir déchirant que Malick filme en une communion quasi palpable avec la Terre. Le Nouveau Monde étant une oeuvre extrêmement sensorielle, sensuelle, bruissante du souffle de la vie, d'autant plus fragile devant l'inéluctable destin de cet horizon au bord du chaos. Rarement élégie vitale et chant funèbre n'auront été aussi intimement liés, le film résonnant à la fois comme un cantique de la renaissance et un requiem sans appel. Dans le coeur du spectateur apparaît peu à peu une rage et un accablement irrépressibles, car il est déjà mille fois trop tard, et cet Eden n'existera jamais plus. Comme un amour perdu, que l'on panse tant bien que mal, comme une illusion de jeunesse, que l'on oublie mais qui nous hante, le reflet d'un rêve primitif et d'une symbiose impossible avec la nature. Si au final, quasiment à l'arraché, Malick trouve les images pour entretenir une vacillante flamme d'espoir, son film, immédiat chef-d'oeuvre, n'efface jamais son goût de fin du monde, sa litanie de perte des illusions et son insoutenable nostalgie panthéiste.

 

 


La Nuit du chasseur de Charles Laughton

L'autre matrice du 7e art, le Citizen Kane "marginal". Un conte pour enfants pas sages.

 

 


Paris, Texas de Wim Wenders

Le mélodrame suprême. Entre abstraction et évidence, Paris, Texas est un hold-up des sentiments. Mais doucement, tout doucement, pour mieux poignarder le spectateur en plein coeur. Préparez vos mouchoirs !

 

 


Phantom of the Paradise de Brian de Palma

Je déteste Brian De Palma, ou peu s'en faut. Je trouve à peu près tous ses films vulgaires (on me dit que c'est fait exprès), grossiers, kitsch, souvent plus ridicules que vraiment virtuoses. Et pourtant. Pourtant. Phantom of the Paradise fut longtemps mon film favori. Parce que les outrances de De Palma sont ici parfaitement à leur place. Et que pour une fois, il y a une vraie bonne histoire, avec de l'émotion. Mais il faut reconnaître que cette émotion doit plus aux trio d'interprètes principaux et surtout à la musique de Paul Williams qu'à De Palma. Qu'importe, l'ensemble trouve le juste milieu entre ridicule et sublime pour devenir un film unique dans l'histoire du cinéma.

 

 


Play time de Jacques Tati

Jusqu'où peut-on pousser la perfection cinématographique ? Jusqu'où peut-on aller pour anoblir et accomplir le 7e Art ? Avec Play Time, Jacques Tati n'est pas loin d'avoir trouvé des réponses définitives à ces questions. Parfait, et pourtant toujours un peu bancal, Play Time est un monstre cinématographique impossible à appréhender en dehors des cadres du grand écran. A l'heure du DVD, des home cinemas, Play Time refuse toujours de se laisser enfermer sur de petits écrans. Play Time est gigantisme, délire d'espace et de temps. C'est un film qui semble toujours vouloir exploser les limites. De l'écran, certes, mais aussi de la durée. Pour atteindre une plénitude qui serait la vie en elle-même en direct, quand l'abondance d'artifices parviendrait à reconstituer notre monde, mais avec juste ce qu'il faut de surréalisme pour qu'il soit féerique. L'absurdité du monde moderne que décrit Play Time est toujours prête à laisser place à la poésie, à l'amusement. Au temps de jouer. Et avec ce film, Tati, mégalomane génial, comme avec toutes ses autres oeuvres, veut nous montrer la vie dans ce qu'elle a de plus fragile, de plus touchant. Et les grands espaces glacés de devenir manèges enchantés. Et l'ennui de se faire rêverie. Et Play Time d'être le plus grand film du cinéma français.

 

 


Wall-E d'Andrew Stanton

Rarement la sensation d'assister à un spectacle fondateur aura été aussi forte. Wall-E, film de l'année ? De la décennie ? Du 21e siècle ? Ces considérations paraissent bien ridicules, comme toute forme de jugement critique, forcément pompeux, forcément incomplet. Mais pendant une fraction de seconde, on aura été persuadé que l'avenir du monde se jouait dans le regard de deux robots animés se prenant par la main.