Critiques Françaises de Sleepy Hollow

 

 

Mad Movies n°123 / Cédric Delelée :

 

"Il est des films qu'on contemple comme dans un rêve éveillé. Des images qui hantent vos songes et qui donnent la sensation qu'une porte a été ouverte sur un imaginaire obsédant. Des films dans lesquels on se jette à corps perdu pour effectuer un voyage dont on ne reviendra peut-être pas. Sleepy Hollow est de ceux-là.

(...) Tim Burton excvelle à décrire les habitants de cette bourgade perdue dans les bois : derrière une apparente normalité se cachent de terribles secrets dans lesuels tout le monde se retrouve impliqué. A cet égard, Sleepy Hollow ressemble à un Twin Peaks, version Hammer matiné de Mario Bava. En amoureux fou du fantastique, Burton offre à nos yeux écarquillés de véritables toiles de maîtres gothiques, qui évoquent aussi bien Terence Fisher et Le Masque du Démon que les gravures de Gustave Doré ou la peinture préraphaélite. Visuellement, Sleepy Hollow est d'une beauté stupéfiante. C'est bien simple : on n'a jamais vu ça sur un écran de cinéma (...) Entre cauchemar et conte de fée, transcendé par la partition incandescente de Danny Elfman et offrant à Christopher Walken un personnage certes bref mais inoubliable, Sleepy Hollow est tout simplement un chef-d'oeuvre."

 

 

Impact n°83 / Didier Allouch :

 

" (...) Tim Burton échappe à tous les moules, à toutes les définitions faciles, à tout contrôle que voudraient lui imposer les studios. Il fait partie de ces rares cinéastes capables de dire non à un projet d'envergure s'il ne peut pas en faire ce qu'il veut. C'est ce qui s'est passé avec Superman. Il devait réaliser une nouvelle adaptation du comics pour la Warner. Le film, il l'avait déjà parfaitement en tête, mais le studio a refusé certaines de ses visions du super-héros, jugées par trop excentriques. Il lui a été demandé de revoir sa copie dans une logique davantage "normalisante". Burton a refusé. Ce gars-là ne travaille pas contre-nature.

Pour rebondir, le cinéaste est parti faire un film en Angleterre, loi là-bas, de l'autre côté de l'océan, histoire d'être le plus tranquille possible. Et ce qui sur le papier apparaissait comme une œuvre de transition, après l'échec public aux Etats-Unis de Mars Attacks ! et ce Superman avorté, se révèle en fait comme l'un de ses meilleurs films. (...)

(l'histoire de Sleepy Hollow) donne l'occasion à Burton de s'en donner à cœur joie et de nous offrir une œuvre à la plastique sublime, visuellement le plus beau film d'horreur jamais vu, et de rendre hommage à tous les titres d'inspiration gothique qui ont bercé son enfance (les Hammer, les Bava, les adaptations de Poe par Corman...). Sleepy Hollow réussit là où le Dracula de Coppola avait échoué. C'est un film d'horreur grand public, réalisé avec maestria et sans concession, par quelqu'un qui admire et respecte le genre. Sans doute parce qu'il le porte en lui."

 

 

Studio n°153 / Jean-Pierre Lavoignat

" Tim Burton retrouve Johnny Depp pour un film sombre et beau. Une vraie merveille. Ce film est une merveille. Dans les deux sens du terme. Evoquant un phénomène surnaturel et provoquant une immense admiration. Conte d'horreur dans la plus pure tradition gothique, Sleepy Hollow est aussi une merveille d'intelligence, de sensibilité, de charme et de perfection.

C'est un film qui réussit à la fois à faire peur, à émouvoir et à émerveiller. Qui sait donner chair aux terreurs et aux espérances les plus grandes, avec ce mélange de naïveté et de cruauté dont seuls sont capables les enfants et les poètes. Pas étonnant : Sleepy Hollow est l'oeuvre d'un poète. Un vrai. Pas un de ceux qui confondent la guimauve avec la sensibilité ou se prennent pour des visionnaires parce qu'ils regardent un coucher de soleil... Mais un de ces créateurs qui ont le sens de la cadence et dont les évidences, les audaces, les échappées belles, les références, les images vous vont droit au cœur, avec une simplicité presque désarmante, et qui, pourtant, ne cessent, en chemin, de vous ouvrir des portes sur l'imaginaire, sur la fantaisie, sur l'inconnu...

Sleepy Hollow est sans nul doute le film le plus maîtrisé de Burton (...). Il a totalement réussi, cette fois, ce mariage si délicat entre authenticité et ironie. Tout le film (...) joue de cette alchimie. Que ce soit dans le titre, dans le sujet, dans le décor, ni vrai ni faux, dans la forme, élégante mais jamais précieuse, dans l'apparition de figures illustres, dans le jeu des correspondances, dans la galerie de personnages, dans le travail des acteurs, on est toujours entre la sincérité et le clin d'oeil. Il y a ici de la virtuosité mais ça n'empêche ni la peur, ni la profondeur, ni l'émotion. Johnny Depp, dont les scènes avec Christina Ricci sont un enchantement, est, avec beaucoup de grâce, le plus bel exemple de ce subtil équilibre. Ainsi, ce cauchemar, malgré ses têtes coupées et son horreur sanglante, garde-t-il dans notre souvenir les couleurs du rêve..."

 

 

les films au cinema - cplanete.com / Jean-Luc Brunet

"Quel bonheur ! On a beau attendre son nouveau film avec une impatience, non feinte, et une confiance quasi aveugle, on ne peut s'empêcher d'avoir quelques angoisses, au moment où le noir se fait dans la salle. Et si, pour une fois, Tim Burton ratait son coup, et nous offrait un film sans âme, sans magie ? ? Quand retentissent les premières notes de musique signées, Danny Elfman, sur un pré-générique somptueux, on sait que c'est gagné. L'envoûtement ne prendra fin qu'1H45 plus tard (et encore…) Le cauchemar et la déception ne sont encore pas pour cette fois car si le génial réalisateur nous entraîne dans une histoire cauchemardesque, à souhait, le résultat, lui est absolument époustouflant, ébouriffant. Comment vous donner envie de découvrir le film sans vous le " sur-vendre " ? Mission quasi impossible, car l'idéal, en fait, serait d'arriver totalement vierge, pour découvrir, par soi même, cette nouvelle folie " burtonnienne ".

(...) La plus belle réussite de Tim Burton. A l'instar d'EDWARD AUX MAINS D'ARGENT, SLEEPY HOLLOW est un film empreint de merveilleux qui vous fait littéralement décoller de votre siège, comme au cours des scènes où Lady Crane (Lisa Marie, la compagne du réalisateur) vient hanter les nuits de son fils, Ichabod dans une série de rêves, remarquablement mis en images. Et puis, il y a ce personnage à part entière, " L'arbre de la mort ", qui dégage, à la fois, une incroyable impression de force et de souffrance avec ses branches et ses racines noueuses, gardiennes d'un terrible secret. Cette belle idée qui aurait pu n'être qu'un simple élément de décor, rend au cinéma la puissance d'un imaginaire trop souvent bridé. Si l'on ne peut qu'être fasciné par l'ambiance qui se dégage de SLEEPY HOLLOW, grâce, entre autres, à la photo absolument remarquable d'Emmanuel Lubezki (la plupart des plans sont composés à la manière de tableaux) et les décors de Rick Heinrichs, il convient de saluer, également, le casting sans faute du film.

Jamais, Johnny Depp ne semble aussi à l'aise que chez Tim Burton. L'acteur se fond, pour la troisième fois (après EDWARD AUX MAINS D'ARGENT & ED WOOD), avec une, visible, gourmandise dans l'univers profondément personnel du réalisateur. Son interprétation d'Ichabod Crane est un pur régal, même si certains ne manqueront pas de lui reprocher d'en faire " un peu trop ". Pour l'acteur " L'idée était d'être sans cesse sur la corde raide entre le jeu sincère et la nécessité d'en faire un peu trop, dans le style des films d'épouvante de la Hammer avec Peter Cushing et Christopher Lee ". Effet garanti et parfaitement réussi ; On frémit et on sourit à la fois, devant la naïveté, l'effroi d'Ichabod et sa volonté d'en découdre avec la terrible réalité du petit village de Sleepy Hollow. L'ensemble de la distribution (les excellents Christina Ricci, Christopher Walken…) joue sur ce décalage des situations, et donne au film un ton volontairement théâtral et décalé. Profondément original. Avec SLEEPY HOLLOW, Tim Burton nous offre un nouveau et extraordinaire (dans tous les sens du terme) conte fantastique. Sans aucun doute sa plus belle réussite, avec EDWARD AUX MAINS D'ARGENT."

 

Le Monde / Samuel Blumenfeld

    "La temporalité du conte et l'intention du cinématographe se rejoignent et deviennent, par un tour de passe-passe, contemporains. Tim Burton a poussé son projet à son point le plus extrême, faisant de Sleepy Hollow l'un de ses plus beaux films, et certainement le plus étrange. Ses contes ne sont plus des allégories, mais tout simplement des faits divers mâtinés de merveilleux que le réalisateur a décidé de prendre au pied de la lettre."