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The Story Of The Clash

 

 

        La rédaction d'une biographie de ce qui reste le plus grand groupe de la période punk est chose passionnante mais fort longue. De même que l'établissement d'une discographie complète. En attendant voici une présentation des disques les plus connus (et les plus indispensables) de ce groupe fondamental, génial et même plus.

        The Clash est formé en 1976, en pleine explosion punk. La première mouture du groupe comprend Joe Strummer (guitare, vocaux et composition), Mick Jones (guitare, vocaux, composition), Paul Simonon (basse) et Tory Crimes (batterie), dès le deuxièmes album Topper Headon prendra la place de Crimes et la gardera jusqu'à Sandinista. Après le succès commercial de Combat Rock, Mick Jones quitte le navire et après le calamiteux Cut The Crap (que j'occulte en un révisionnisme bon teint) le groupe se sépare en 1985. Un peu moins de 10 ans d'existence, donc, et une poignée de Chefs-d'Oeuvres absolus et révolutionnaires. Les Clash allaient tout changer et donner à la musique moderne quelques uns de ses Everests soniques.

 

 

The Clash THE CLASH

1977, l'explosion punk. Les Sex Pistols cassent tout, un mouvement musical révolutionnaire balaie les dinosaures du prog rock. Et justement le rock moribond se réveille d'un seul coup, en 5 ans, tout va être bouleversé. Les Clash, Talking Heads, Siouxsie, Suicide, Kraftwerk, etc... vont inventer la musique de la fin du siècle. Et avec ce premier album, la bande à Strummer va délivrer un manifeste punk passionnant, d'un dynamisme sans faille, d'une puissance mélodique incroyable, ouvrant des perspectives palpitantes, explosant tout sur son passage pour mieux reconstruire un univers sonore unique. Dès Janie Jones on entre de plein pied dans la perfection Clash, et tout l'album est ainsi, de White Riot à Career Opportunities en passant par What's My Name, The Clash est un monument historique. Textes à portée politique et sociale, musique énergique au possible... Tout le punk, dans ses bases les plus classiques et les plus efficaces, est là. Et à la fin de l'album, la reprise de Police & Thieves de Lee Perry annonce déjà l'intérêt que porte le groupe aux autres genres musicaux et en particulier pour le reggae, autre musique de révolte. Chef-d'Oeuvre de l'explosion punk, The Clash est avant tout un album prometteur qui n'a pas pris une ride.

 

 

Give Em Enough Rope GIVE 'EM ENOUGH ROPE

1978. Les Clash ont rencontré un succès phénoménal auprès de la jeunesse anglaise désœuvrée. Ils sont les portes-drapeaux du mouvement punk, l'incarnation d'une volonté de changement populaire. Pour cela il suffit de regarder le sublime film mi-documentaire, mi-fiction, Rude Boy, un classique géniallissime qui montre aussi bien les Clash à l'oeuvre (concerts phénoménaux, enregistrement de Give 'em Enough Rope) que la situation sociale précaire de l'Angleterre à la fin des 70's. Enfin, ce deuxième album réutilise les bases de The Clash en les améliorant. La musique toujours très rock, se diversifie, les rythmes se complexifient, les mélodies s'enrichissent encore, les textes sont toujours aussi engagés mais ils deviennent encore plus personnels et affinés. Le groupe évolue et ça s'entend. Ce qui donne, purement et simplement, un nouveau chef-d'oeuvre fondamental. Rien à jeter sur ce court album enthousiasmant. English Civil War, Last Gang In Town ou Stay Free sont de véritables monuments de la musique moderne. Mais en tout cas après cet album, le punk est vraiment mort (cf la dernière chanson All The Young Punks (New Boots and Contracts)). Les Clash vont précéder l'enterrement et donner naissance au manifeste rock pour le futur.

 

 

london calling LONDON CALLING

1979. La fin d'une décennie bancale mais géniale et l'approche d'une nouvelle décennie encore plus malade (surtout musicalement). Et c'est à cet instant là que les Clash livrent aux oreilles du monde entier ce qui est peut-être le plus grand album de rock de tous les temps. London Calling est un double album en état de grâce, une idée de la perfection, le génie à l'état pur, un monument incroyable totalement insurpassable. Un gigantesque best of de la musique moderne. (best of qui sera poursuivi avec Sandinista). De London Calling à Train In Vain, jamais groupe n'a eu une telle unité dans la diversité (à part les Pixies, of course). Tous les genres y passent à la moulinette d'une vision nouvelle de la musique. Le punk atteint son apogée (London Calling, Koka Kola...), le reggae et le rock s'amourachent avec bonheur infini (Revolution Rock), un groove unique habite les chansons politiques (Guns of Brixton, tout Jon Spencer est déjà dans cette chanson), le rockabilly est revisité avec magie (Brand New Cadillac), le pop rock est définitivement enterré par la plus belle chanson du siècle (Lost In The Supermarket), et d'étranges monstres inclassables surgissent au détour du microsillon (Jimmy Jazz, Wrong 'em Boyo...). En clair, s'il ne fallait retenir que deux disques pour représenter ce qui s'est passé dans le rock ces 20 dernières années se seraient London Calling et Trompe Le Monde (ou Doolittle, qu'importe) des Pixies. Enfin tout cela pour dire que cet album est bien plus qu'indispensable, qu'il est tout simplement impossible de prétendre pouvoir parler de rock sans le connaître par cœur. Comment être plus clair ? Si vous n'avez pas London Calling dans votre discothèque, vous n'avez aucun disque dans votre discothèque. Là. Voilà. Un point, c'est tout.

Ma page London Calling

 

 

sandinista SANDINISTA

1980. London Calling a fait définitivement entrer les Clash dans la Légende. Encouragé par le succès phénoménal et international de ce double album (pour faire baisser le prix, le groupe avait abandonné ses droits sur les 200 000 premières copies), The Clash délivre cette fois un triple album gargantuesque (au prix d'un double). Un monument sonore difficile d'accès, lorgnant vers tous les genres possibles et imaginables, du disco au reggae en passant par la country. C'est un patchwork d'influences et c'est surtout un album expérimental. Pour preuve le 3e disque, bourré d'instrumentaux, d'improvisations bizarres, de bidouillages, de trucs frappadingues... Il n'y a plus la même homogénéité que sur London Calling, ici c'est un zapping musical, souvent enthousiasmant, parfois fatiguant, toujours passionnant. Les Clash définissent la musique du futur à grands coups de pieds dans les étiquettes. Au milieu de cet album faramineux, on découvre un beau nombre de chansons parfaites. Du bon vieux punk déjà obsolète (Police On My Back), du social annonçant le futur des Clash (Something About England, The Call Up), des délires géniallissimes (Ivan Meets G.I. Joe et surtout Lose This Skin de Timon Dogg) et quelques purs tubes faisant figures de chefs-d'oeuvre (The Magnificent Seven, Hitsville U.K., Somebody Got Murdered, Lightning Strikes...). Doté d'une superbe pochette (dans sa version vynil) reproduisant toutes les paroles et agrémentée de superbes dessins de Steve Bell (l'illustration de Ivan Meets G.I. Joe est CULTE !), Sandinista signe définitivement l'acte de décès du Punk et poursuit la voie ouverte par London Calling, le mélange des genres et la création d'un son nouveau. Le meilleur exemple de ce que les années 80 auraient du être (au lieu de devenir le repaire de Phil Collins et de George Michael).

 

 

Combat Rock COMBAT ROCK

1982. Par respect pour la mémoire de ce groupe qui fut le plus important de la fin des années 70 et reste inégalable dans son genre inclassable, je ne parlerais pas du tout dernier album de la formation, Cut The Crap. Mais, même s'il annonce plus la fin que le renouveau, Combat Rock, le successeur de Sandinista, demeure un excellent disque. Bien moins aventureux que les deux albums précédents, moins parfait, plus commercial, mais toujours d'une efficacité hallucinante. Il est d'ailleurs fort dommage qu'à force d'être matraquée radiophoniquement des merveilles comme Rock The Casbah et Should I Stay or Should I Go aient fini par nous lasser. Et si sur un Know Your Rights, la formule Clash bien connue depuis The Clampdown ou The Call Up, semble s'épuiser un peu. Il reste des This Is Radio Clash pour vibrer comme autrefois. Et le divin Straight To Hell enfonce le clou. Combat Rock est un grand disque.

 


 

clash-live-eternity.jpg (11378 octets)     Live From Here To Eternity

    Tout d'abord il faut que les choses soient bien claires : si vous ne possédez pas TOUS les albums des Clash (sauf Cut The Crap, évidemment, ça n'a jamais existé, ça, Cut The Crap...), inutile d'acquérir ce live. C'est un produit pour fans purs et durs, tout simplement. Pourtant le choix des morceaux est plus que discutable (certainement pas les plus cultes, juste les plus connus) et les versions (beaucoup de post-Topper Headon, aie aie aie) encore plus discutables. Donc, pas de Lost In The Supermarket et surtout pas d'extraits de Give 'Em Enough Rope, ce qui tient de l'aberration totale. A la trappe Stay Free, English Civil War et The Last Gang In Town... Si on veut du Clash live le film Rude Boy demeure LA référence. Ce From Here To Eternity n'étant qu'un placebo en attendant le nouvel album de Joe Strummer (il arrive ! il est là !). Il reste de bons, de très bons trucs dans ce live. En particulier les vrais morceaux cultes que sont I Fought The Law, Armagideon Time, Train In Vain, Guns Of Brixton et surtout Straight To Hell (qui ne fait pas regretter d'avoir attendu la fin). Enfin bon bref, le fan fera l'acquisition de la chose sans hésitation, les autres iront compléter, sans hésitation non plus, leur collection clashienne (j'en vois d'ici qui n'ont toujours pas Sandinista et... ohlala... j'en vois un là qui n'a pas London Calling ! Non mais c'est pas vrai ça ! Faites comme moi : London Calling il faut l'avoir au moins en triple (dont un exemplaire sous la baignoire) car on ne sait jamais !)

 


 

clash-essential.jpg (21028 octets)         The Essential

 

        Rassurez-vous tout de suite, cette compilation était prévue et bouclée avant la mort de Joe Strummer et n'est pas une exploitation mercantile de l'événement le plus tragique que le rock ait vécu ces dernières années. Non, cette double compilation était là pour améliorer les déjà assez anciens The Story Of The Clash vol. 1 (il n'y a jamais eu de volume 2) et The Singles. Ainsi que pour offrir une alternative à l'indispensable mais honéreux Clash On Broadway. Alors ? Est-ce qu'il faut acheter ? Et bien, la question est délicate. Si on possède tous les albums ainsi que le Super Black Market Clash, on peut douter de l'utilité de la chose. Si on ne possède pas tous les albums, ce n'est pas bien du tout ça ! Bon sang ! Ce n'est pas pour le nombre de disques qu'ont sorti les Clash et surtout pour leur prix (tous en mid price, on les donne presque un peu partout) ! Bref, avant même de parler de la compilation, j'aimerais rappeler que comme pour les Pixies ou que pour Nick Drake, la discographie des Clash est fort réduite et que le moindre de leurs albums tient du chef-d'oeuvre absolu (sauf Cut The Crap, mais je radote). Bon, ouf, c'est clair comme cela ? Jamais, JAMAIS, une compilation ne pourra remplacer London Calling (remplacer Sandinista à la limite, et encore). Mais c'est fou ce que je radote.

        Bien, passons à la compilation. Déjà, c'est un double disque. Bon point, il fallait bien cela. Ensuite, hum, voyons le tracklisting. Boum, d'entrée de jeu, sur le premier disque, il y a la quasi intégralité (à quelques exceptions prêt) des deux premiers albums. Fichtre ! Ils sont tous là (à part, par exemple, Remote Control). Il y a White Riot, bien sûr, mais aussi Janie Jones, Complete Control, London's Burning, Career Opportunities, Police & Thieves, Clash City Rocker, White Man, English Civil War, Tommy Gun, Stay Free, Safe European Home, I Fought The Law... On peut énumérer tous les morceaux, ce sont tous des hymnes, des antidépresseurs, des cris du coeur, des hurlements de révolte, des sommets musicaux inégalés. C'est trop, c'est affolant. C'est sublime. Toujours aussi sublime. Su-bli-me.

        Et sur le second disque ? On débute avec 7 extraits de London Calling. Vous savez, le disque qui peut prétendre très très sérieusement au titre de plus grand disque rock de tous les temps. Comme tout l'album est parfait et qu'on le connaît par coeur, cela fait un peu bizarre d'écouter ses morceaux hors contexte. Surtout qu'ils ne sont même pas dans l'ordre chronologique. Jimmy Jazz après Lost In The Supermarket, c'est spécial. Et ne pas enchaîner après London Calling avec la reprise monstrueuse de Brand New Cadillac, c'est dommage. Bref, vous avez compris, non ? Vous allez acheter London Calling ! Merde à la fin ! Par contre, il y a de quoi être ravi par la sélection de morceaux issus de Sandinista. Bon nombre d'entre eux sont inédits en compilation. A part les très fameux Magnificent Seven et Somebody Got Murdered. C'est bien sûr un bonheur de retrouver Ivan Meets G.I. Joe ou Stop The World. Mais on reste abasourdi par l'absence des chefs-d'oeuvre Hitsville UK, Lightning Strike et Police On My Back. Bon, il va falloir acheter Sandinista aussi. Pour ce qui est de Combat Rock, les singles mille fois entendus sont présents (le Shoud I Stay Or Should I Go et le fatigant Rock The Casbah). Mais le sommet de l'album, le divin Straight To Hell (le véritable testament du groupe et l'une de leurs meilleures chansons) est bien présent. Il y a aussi en final, et grande surprise, un extrait de Cut The Crap, le single This Is England. Oui, bon, c'est clair que sur la fin, le Clash ce n'était plus trop ça. Mais ce qui a précédé était tellement immense, fondateur, révolutionnaire, génial, que l'on pardonne tout. Ces gens ont tout changé.

        Donc, bon, je recommande cette compilation malgré tout. Parce que c'est un objet estimable, intelligent, bien fait (c'est tellement rare pour une compilation). C'est un Essential qui porte relativement bien son nom et qui n'a pas pour ambition d'effacer les albums. Au contraire, il donne envie de réécouter en boucles London Calling. Et tous les autres. De toute façon, The Clash c'est The Last Gang In Town, c'est le putain de groupe de Joe Strummer. Et Joe Strummer, c'est le type qui veillait et qui veille sans doute encore sur le Rock. Le putain de Rock, la décharge d'énergie ultime, la révolution en marche, l'éternelle jeunesse électrique, la volonté d'être des gens biens toute notre vie. La musique des Clash c'est cela, c'est la rage de réussir, la fureur de vivre, le désir irrépréssible de s'exprimer, d'exister. Alors qu'importe le flacon, pourvu qu'on ait le Clash.

 


DVD

 

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The Clash - Westway To The World

 

        Il est temps de solder les comptes une bonne fois pour toutes. Et même si le pathos finit par resurgir chez les vieux débris de plus de 40 ans, Westway To The World est un documentaire (parfois documenteur) qui enterre plutôt bien le plus grand groupe de la période punk, accessoirement l'un des 3 ou 4 plus grands groupes de rock de tous les âges de l'humanité. Ceux qui s'attendent à voir de la musique peuvent passer leur chemin. Ce DVD ne propose que quelques extraits très frustrants et même si en quelques secondes la musique des Clash prouve encore et toujours qu'elle peut redonner la vie à un cadavre, vous n'aurez pas droit à un seul morceau en son entier.

        Ceux qui connaissent sur le bout des doigts la carrière du groupe n'apprendront rien de nouveau, ils en savent même beaucoup plus que ce qui se dit à l'écran. Preuve la plus flagrante, selon les interviews et le montage du DVD, The Clash s'arrête avec le départ de Mick Jones et donc après Combat Rock. Exit Cut The Crap ! Bien, on ne peut pas leur reprocher la démarche, après tout, tant Cut The Crap est quand même l'album le plus embarrassant du rock, le disque que l'on voudrait le plus effacer de l'histoire du monde. Après, il y en a qui vienne se plaindre de Let It Be, bah merde alors, il devrait écouter Cut The Crap pour voir ce qu'est un vrai testament indigne !

        Westway To The World prend le parti du mythe Clash, et ça marche plutôt parfaitement. On croit à tous les mensonges, et aussi parfois aux vérités, qui nous sont contées. Ce qui fait peut-être le plus mal, c'est de voir l'état général de délabrement dans lequel erre désormais les quatre fantastiques. Topper Headon semble sortir de son linceul, Mick Jones est chauve, Paul Simonon ressemble à un vieux docker alcoolique (ce qu'il est, après tout), et Joe Strummer a définitivement pris des allures de vieux sages indignes dont l'inimitable voix nous fait presque monter des larmes aux yeux à chaque fois qu'elle résonne à nos oreilles. Strummer est la voix d'une époque, et cette époque est morte, du moins, elle erre sous la forme de cadavres à peine réanimés. Cela fait mal, mais cela fait aussi plaisir de revoir un vrai grand groupe de rock sans faux-semblants. Avec ses embrouilles, ses vrais coups de folies, ses opinions discutables, son génie, son énergie, ses pains dans la gueule. Aujourd'hui on a des produits marquetés comme les infâmes The Vines. Ca file la gerbe, croyez-moi.

        Westway To The World propose quand même quelques images rares, notamment en bonus avec des bouts de Clash On Broadway. Pour le reste, l'indispensable achat reste Rude Boy, le plus grand film punk de la création, dispo en Zone 2 UK. Westway To The World s'adresse surtout aux fans qui connaissent déjà bien leur affaire. Les autres vont vite être largués et être très frustrés par les bouts inachevés de chansons. Pourtant, il faut que tout le monde redécouvre les Clash, merde ! S'il y en a parmi vous qui ont fait l'acquisition des gerbes tièdes des Strokes, Vines, Hives, White Stripes, Libertines & co. et qui n'ont pas le premier Clash et London Calling chez eux, là, ça mérite des baffes ! Je suis peut-être un vieux con, mais merde, écoutez tout simplement la différence de qualité dans les compositions, la différence d'intensité, la différence de sincérité. Oh et puis si vous n'aimez pas les Clash, comme on dit chez Godard : allez vous faire foutre !

En résumé : excellent documentaire, parfois menteur, parfois étrangement larmoyant, Westway To The World rappelle, ouf, enfin, que The Clash incarne l'idéal du groupe de rock hargneux, brutal, engagé, crétin mais bourré d'un talent, d'une sensibilité et d'une ouverture d'esprit indépassables. Entendre Joe Strummer (à genoux, mes enfants), nous raconter l'anecdote de la Balalaïka suffit juste à faire comprendre ce qui fait le prix inestimable de ce groupe. The Clash is dead, certes, mais alors le fantôme vous en met plein la gueule !


 

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The Clash - The Essential

 

        Quoi ? Encore un DVD des Clash ? Oui mais ne vous inquiétez pas, celui-ci vient compléter les autres. Westway To The World, c'était le documentaire sur l'histoire du groupe. Et le DVD du chef-d'œuvre Rude Boy est indispensable en lui-même, en tant qu'écrin de ce qui est peut-être le plus grand film "rock" de l'histoire du cinéma. Alors il y a quoi sur ce DVD qui accompagne la sortie de la très estimable double compilation du même nom ? Et bien déjà il y a les clips. Vous allez me dire que les clips des Clash, ce n'est pas forcément d'un intérêt fondamental. Alors là, vous avez tellement tort que c'en est indécent. En effet, au moins pour les premiers d'entre eux, ces clips sont en fait des performances live. Et croyez-moi, The Clash c'est le plus grand groupe live de l'histoire du rock. Contemplez les versions live de White Riot, Complete Control ou I Fought The Law (issue de Rude Boy celle-la), et découvrez la Lumière.

        Car oui, tout cela a été remasterisé, et croyez-moi, ça décape. On se prend une tornade en plein cœur. Presque, et oui, presque, comme à l'époque. Pour parodier Nietzsche, The Clash ce n'est pas un groupe, c'est de la dynamite. Si le groupe semble essoufflé sur la fin de sa carrière (Career Opportunities ne supporte pas le passage en stade), on s'en fout. Les chansons présentes sont toutes excellentes, voire carrément tétanisantes (Complete Control à reprendre en chœur, Tommy Gun à reprendre aussi en hurlant pour faire peur aux voisins, Clampdown, Train In Vain, London Calling, The Call Up...). Bref, tout n'est pas compilé, bien loin de là. Mais les documents d'époque se font tellement rares que l'on ne peut qu'applaudir à cette remasterisation impressionnante. Il manque bien sûr la sortie d'un live des Clash, mais ce sera sans doute pour plus tard.

        Et puis il y a les bonus, qui font presque figure d'essentiel du programme et qui rendent le DVD indispensable. La véritable merveille de cette compilation, c'est le film muet en n&b de Joe Strummer, Hell W10. Une histoire de gangsters minables et de jeunes paumés dans le Londres du début des années 80. L'hommage au cinéma muet est incroyablement crédible et amusant, l'importance documentaire du film est estimable et la bande son est formidable (plein de versions dub extrêmement rares de grands classiques du groupe). Bref, c'est sublime. Ensuite il y a pas mal de petits bonus promo et des interviews antédiluviennes et étonnantes (de 1976 ! On ne peut pas remonter plus loin dans les archives). L'emballage de la galette n'est rien moins que classe et le tout est évidemment dédié à l'immense Joe Strummer.

En résumé : achat vital pour tous les fans de rock, de punk, de l'Angleterre, de personnes bourrées de talent et de musique gorgée jusqu'à la gueule de pulsion de vie.


Rude Boy de Jack Hazan et David Mingay

 

"I fought the law and the law won !"

      La reprise mythique par The Clash de cette chanson non moins mythique, est sans doute le meilleur résumé de l'errance du "rude boy" du film. Pendant un peu plus de deux heures, entre documentaire et fiction, un roadie paumé du groupe de Joe Strummer et Mick Jones tente vaguement de s'en sortir dans l'Angleterre à la veille de l'arrivée de Margaret Thatcher au pouvoir. De manière saisissante, la conclusion du film, sur les images de la future Dame de Fer prenant possession du 10 Downing Street, sonne comme l'une des fins les plus désespérées de l'histoire du cinéma. Comme si tout ce qui avait été le moteur du métrage, cette vaine révolte, ce fol espoir, cette rage de la musique du Clash, n'avait vraiment servi à rien.

      L'important c'est sans doute de continuer la lutte, mais Rude Boy devient ainsi l'une des œuvres les plus électriques, énergiques et positives du 7e art, mais aussi l'une des plus désabusées, mélancoliques, cruelles... Le rude boy est un loser, du début à la fin, rien ne pourra changer son destin. La tragédie est en place, elle se joue du plus petit (quelques jeunes paumés), au plus grand (la société anglaise dans son ensemble et surtout le sens que l'on peut donner à son existence en général).

      La lueur d'espoir vient sans doute du charisme, de l'intelligence, de l'émotion épidermique d'un Joe Strummer, déjà d'une sagesse immense à même pas 30 ans. En plein enregistrement de leur second album, The Clash prouve que l'on pouvait être punk, savoir s'amuser comme personne et avoir en même temps une vraie conscience, une vraie vision du monde. Mais le désir utopique ne suffit pas. On combat la Loi, et la Loi gagne...

"Stay free..."

 


Coda

 

Joe Strummer est mort.

        C'est toujours cette même sensation. Quelqu'un que l'on ne peut pas vraiment qualifier d'idole ou même de modèle, mais dont l'oeuvre a véritablement marqué notre vie. Quand cette personne disparaît, on ressent cette étrange tristesse. Ce modèle, on ne l'a jamais vraiment connu, on ne le rencontrera jamais, mais on se rend compte, au moment où il disparaît, que l'on éprouvait de l'affection pour lui. Il était rassurant, il était normal qu'il soit là, absent, certes, mais bien vivant dans le même monde que nous. Cette personne incarnait par sa présence toute l'émotion et tout l'espoir que nous procuraient ses oeuvres. Bien sûr, avec la mort de l'auteur, l'oeuvre ne s'efface pas, elle est d'autant plus immortelle. Mais elle trouve son achèvement et finalement une part de l'espoir qu'elle portait meurt à cet instant.

 

        Joe Strummer est mort. Et je n'arrive pas à y croire. Joe Strummer ne peut pas mourir. Il était notre image idéale, notre représentation du vieux sage rock indigne. Plus crédible que n'importe quel Lou Reed ou Keith Richards. Plus jeune aussi et finalement plus proche de nous. Il n'avait pas la prétention besogneuse de Reed et encore moins la sénilité rock caricaturale de Richards. Strummer était crédible, il avait su prendre sa pré-retraite à peu près au bon moment, Cut The Crap mis à part. Il avait su voir la vie après la gloire. Il avait su jouer intelligemment de sa légende. Joe Strummer était un mythe discret, abordable, lointain mais presque notre voisin. Il avait compris que le monde ne se limitait pas à un pogo punk. Malgré l'âge, malgré les désillusions, jusqu'au bout il aura fait de la musique, jusqu'au bout il aura fait des concerts, jusqu'au bout il aura tenu sa promesse de ne pas reformer The Clash, jusqu'au bout il aura traîné sa gueule cassée au bon endroit au bon moment. Sans trop en faire. Juste pour nous rappeler qu'il était là, toujours là. Et qu'il serait toujours là. Joe Strummer n'est pas mort.

 

        Alors ce soir je ne sais que penser. Comme quand Joey Ramone a cassé sa pipe. Quand Kubrick s'est éclipsé. Quand Desproges nous a fait la pire de ces blagues. Quand nos amis absents omniprésents quittent notre monde, on reste perplexe, vaguement choqué, puis de plus en plus révolté. On en vient à maugréer des vulgarités. Et on maudit la vie encore une fois. On se sent vieux et on perd espoir. On se répand en souvenir et en regrets. Non, on ne connaîtra jamais ces gens biens. Peut-être, sans doute, n'étaient-ils pas à la hauteur de l'idée que l'on se faisait d'eux. Mais on s'en fout, on ne le saura jamais, ça fait mal. On les aimait, d'une manière ou d'une autre. Et ils nous manquent.

 

Aujourd'hui, dimanche 22 décembre 2002, Joe Strummer, ancien leader de The Clash, est mort à l'âge de 50 ans.

Et j'ai pleuré.

 



 

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LIEN :

LONDON'S BURNING

 

                                                                    The Clash

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