20. Brazil

J'aurais souhaité mettre plus de films des Monty Python, et en fait ce n'est pas vraiment un film de la fameuse équipe qui aura les "honneurs" de mon top. En effet, je me voyais mal comment "oublier" Brazil, cette oeuvre monstre, qui a tant révolutionné l'esthétique de son temps, mais qui a aussi traumatisé plusieurs générations de cinéphiles et de cinéphages. Cet hymne au droit de rêver revisite le 1984 de George Orwell sur le ton de la comédie surréaliste, entre burlesque et humour très noir. Brazil est un film aussi drôle que cruel, qui échappe de justesse au nihilisme le plus dépressif. Rarement on aura aussi justement pu qualifier l'humour de politesse du désespoir.

 

 

19. Faster Pussycat Kill ! Kill !

On a souvent tendance à réduire l’œuvre de Meyer à une flopée de nanars d'où ne surgissent que des poitrines surdimensionnées (et le mot est faible). Certes, l'aspect mammaire est essentiel, il crève les yeux, il occulte facilement l'esprit critique. Néanmoins, il n'est que la partie émergée de l'iceberg que sont les films de Russ Meyer. Car les décolletés plongeants qui font passer le Grand Canyon pour une piscine privée, sont emballés dans de francs délires de mise en scène qui allient humour, cynisme, provocation, hymnes libertaires, violence, cartoons et surréalisme bon enfant. Vastes dessins animés (oui, il y a un jeu de mots), les oeuvres de Russ Meyer n'existent que pour le plaisir et rien que pour le plaisir. On s'y amuse et on s'y réjouit. Avant la grande série des Vixens (dont je conseille avant tout et surtout le superlativement grandiose MegaVixens), Faster Pussycat Kill ! Kill ! s'impose comme le sommet de la carrière du réalisateur. Trois femmes sauvages qui ne vivent que pour tout détruire, piller, violer sur leur passage, essaient de rouler dans la farine une famille de dégénérés que n'aurait pas renié Tobe Hooper. La morale sera sauve, malheureusement, tant on s'attache à ces trois déesses adorables et terrifiantes, qui incarnent mieux que n'importe quel slogan tout le féminisme, des années 70 jusqu'à nos jours. Ces femmes se battent, s'aiment, se déchirent, se haïssent, vivent libres. Elles sont bigger than life, à tous les niveaux, et c'est ainsi quelles deviennent des icônes. La chevauchée fantastique s'achève dans le sang, comme si Russ Meyer n'avait finalement pas pu aller jusqu'au bout de ses désirs d'anarchie in the USA. Mais pour le spectateur, le message est clair, les seules et uniques héroïnes de l'histoire, ce sont les trois tigresses, qui n'ont jamais cessé de hanter les fantasmes des cinéphiles depuis lors. Unique en son genre, Faster Pussycat Kill ! Kill ! fait toujours figure de bombe(s) atomique(s) sur pellicule.

 

 

18. Il Etait Une Fois en Amérique

Le testament de Leone est insoutenable. Insoutenable parce que le chef-d'oeuvre de cet immense metteur en scène est dédiée à la pire des trahisons et à une existence brisée. Insoutenable parce que tant de violence et de passion, lentement déroulées sur près de 4h extrêmement intenses, c'est presque trop. Oui, trop. Un hold-up psychologique, une prise d'otage. Et le spectateur d'assister à une tragédie fort classique mais transcendée par une interprétation tétanisante (De Niro et James Woods dans leurs meilleurs rôles) et une ambiance musicale déchirante (Ennio Morricone dans sa veine la plus lacrymale). Leone atteint le sommet d'un genre fort particulier : le mélo ultraviolent.

 

 

17. Rois et Reine

Après avoir scruté la vie sentimentale des jeunes adultes dans Comment Je Me Suis Disputé, après avoir disséqué les jeux et les masques du théâtre social dans Esther Kahn, Arnaud Desplechin veut dresser avec son très ambitieux Rois et Reine une cartographie exhaustive et nuancée des relations familiales. Et pour cela, le réalisateur gorge ses 2h30 d'une richesse presque déconcertante à la première vision. Si on ajoute une mise en scène nerveuse, essentiellement composé de jump-cuts et autres raccords énergiques, qui permettent à chaque image de surgir avec une justesse surprenante, Rois et Reine veut se présenter comme une somme, un monument qui s'affirme comme une Odyssée intime, une fresque de l'âme qui n'hésite jamais à décrire les aspects les plus cruels de l'existence. Mais, une nouvelle fois, l'émotion contenue et l'humour parfois débridé de Desplechin permettent au spectateur de respirer et de ne jamais se sentir écrasé par la profonde intelligence et la force symbolique de l'ensemble. L'admiration que l'on peut éprouver devant Rois et Reine est sans doute aussi complexe et riche que le film en lui-même. Le spectateur peut tout d'abord apprécier le métrage comme un divertissement avec de vastes bouts de psychologie et de philosophie à l'intérieur, mais en même temps immédiatement plaisant par la vivacité et la justesse de ses dialogues et la maestria de sa forme. Puis en se laissant guider sur les pistes de réflexions innombrables, qui rendent la vision du film véritablement palpitante. Au même titre que les oeuvres précédentes de Desplechin, Rois et Reine est un film à suspens, où les enjeux et les drames sont posés lors de la première partie, avant d'être résolus dans la seconde, pour mieux déboucher sur de nouveaux questionnements lors d'un épilogue lumineux. En quelques jours, au terme de leurs aventures, les deux héros auront accompli leurs périples intérieurs et atteint de nouvelles étapes de leurs existences. En faisant face à leurs peurs les plus secrètes, à leurs doutes les plus aigus, en se trouvant confrontés à leurs gouffres sentimentaux, les personnages de Desplechin sont transcendés. Et si l'auteur ne verse jamais dans la niaiserie, c'est pour mieux souligner chaque événement, qu'il soit traumatisant ou minuscule, et lui redonner sa pleine importance dans le mouvement des existences. Mais jamais Desplechin ne sombre dans la facilité des résolutions heureuses. Les libérations sont "douloureuses" et ne sont qu'une étape au sein du labyrinthe de l'existence. Et le réalisateur trace peu à peu, avec une infinie délicatesse, un véritable hymne optimiste. En ne reculant jamais devant les vérités les plus déplaisantes, il magnifie chaque progrès, chaque sourire, chaque parole apaisante. Certes, dans sa volonté de tout dire, Desplechin commet quelques petites maladresses, dont une évocation discutable de la maladie d'Alzheimer. Mais ces petites imperfections sont quasiment invisibles au coeur de ce pur chef-d'oeuvre qu'est Rois et Reine. Tant d'évidence dans la complexité des caractères, tant de beauté dans les idées même lorsque celles-ci sont pénibles à affronter, c'est précieux, c'est rare. Et pouvoir ainsi apprendre, comprendre, compatir, rire et pleurer devant une telle oeuvre, c'est bien plus qu'inestimable.

 

 

16. Ed Wood

Dans un tel classement, il faut trouver au moins une place pour une déclaration d'amour au 7e Art. J'ai longtemps hésité entre ce film et La Rose Pourpre du Caire de Woody Allen. Aller, tant pis, encore du Tim Burton. Ici avec, d'après moi, son dernier véritable chef-d'oeuvre. Une biographie naïve et adorable du plus mauvais réalisateur de l'histoire du cinéma (du moins, si on en croit la légende). En fait une ode à l'émerveillement, à la passion créatrice, au plaisir enfantin de faire des films. Tous les acteurs cabotinent, Johnny Depp et Martin Landau en tête, Tim Burton s'éclate avec ses décors en carton et emballe le tout dans un superbe noir et blanc. Mais au final, le rire du début devient émotion pure.

 

 

15. Dolls

Quand Kitano parle d'amour c'est pour mieux en souligner la douleur. L'amour enchaîne, l'amour entraîne, l'amour demande sacrifice. Mais pour mieux, au final, sauver les amants. La théâtralité colorée de Dolls donne le temps aux émotions de transpercer les limites des images pour conquérir le spectateur peu à peu, tout doucement, pour mieux le brûler à chaque image sublime. Dolls adopte le rythme d'une relation, entre passion et quotidien, entre éclairs et routines. Tous les aspects de l'amour en un seul film, un kaléidoscope d'une maîtrise qui donne le frisson, où chaque regard, chaque couleur en dit plus que tous les longs discours. Dolls se ressent, se respire, se laisse admirer, se glisse dans nos âmes pour ne plus jamais les quitter.

 

 

14. The Wicker-Man

Peut-on aimer un film plus que tout, rien que pour sa musique ? Sans doute. Certainement même. Je pourrais hurler au chef-d’œuvre face à the Wicker Man juste sur la base de sa bande originale, l'une des plus belles, si ce n'est la plus belle, de l'histoire du cinéma. Paul Giovanni, le génie qui se cache derrière les multiples visages de cette musique sublime, délivre des sonorités et des textes qui ne ressemblent à rien de ce que l'on a pu écouter ailleurs, que ce soit au sein d'un film ou non. Il suffit d'écouter Willow's Song, peut-être la plus belle chanson jamais écrite pour le 7e art avec le Old Souls de Phantom of the Paradise, pour comprendre que l'on est dans un univers différent, où nos repères habituels sont bouleversés. Bouleversé comme l'est le prude policier venu enquêter sur les mystères de Summer Island. Une île où un culte païen règle encore la vie d'une communauté qui ne connaît aucun des repères judéo-chrétiens qui dominent toujours nos systèmes de pensée occidentaux. Le bouleversement des valeurs s'effectue petit à petit. On se moque de la vertu caricaturale du policier et on se dit qu'à sa place on ne résisterait pas 5 secondes aux appels de Britt Ekland effectuant la plus incroyable et érotique danse de séduction qui puisse se concevoir, en chantant, donc, Willow's Song. On s'amuse des croyances et des rites de ces joyeux originaux, menés par un impérial Christopher Lee (qui considère, à juste titre, que The Wicker-Man est le meilleur film auquel il ait participé au fil de son immense carrière). Mais peu à peu, le suspens se fait plus étouffant. L'onirisme de la mise en scène, l'ambiance d'inquiétante étrangeté ne suffisent plus à masquer le malaise. L'humour désamorce encore l'enquête, mais la menace du Dieu d'Osier se fait plus évidente. Et si ces braves gens n'étaient pas si innocents ? Et si leur innocence ne suffisait plus à justifier l'ultime sacrifice ? Le final, entre cérémonial grotesque et horreur pure, laisse le spectateur traumatisé, bouleversé au plus profond de son être, imprégné d'une violence, d'une tristesse, d'un malaise insondables. Film inclassable, qui soulève mille et une questions sans jamais offrir de réponses, The Wicker-Man est une véritable expérience, au sens le plus noble et le plus juste du terme. Expérience des sens, expérience de l'esprit, expérience du cœur, qui vous séduit, vous envoûte, vous fascine, pour, au final, mieux vous terrifier et ne plus jamais s'effacer de votre mémoire.

 

 

13. The Dark Crystal

Bien avant le Seigneur des Anneaux, bien avant l'avènement du tout numérique, The Dark Crystal avait prouvé que l'on pouvait créer un univers d'Heroic Fantasy entièrement libéré de notre réalité, sans pour autant sombrer dans le ridicule. Certes, il faut être réceptif à l'esthétique du film, entièrement tourné avec des marionnettes et des effets mécaniques datés mais d'une poésie attachante. Mais ce qu'avaient fort bien compris Jim Henson et Frank Oz, c'est que peu importe l'intensité visuelle, l'essentiel c'est d'avoir une bonne histoire et de bons personnages. Pour se faire, The Dark Crystal se joue du manichéisme et n'hésite pas à adopter la noirceur des plus terrifiants contes de fée. Pour mieux nous éblouir lors du final cristallin (ce qui tombe plutôt bien...).

 

 

12. Barry Lyndon

Barry Lyndon, non seulement est un monument formel sublime et quasi parfait, mais c'est aussi le plus touchant des films de Stanley Kubrick. En effet, le cynisme, parfois la froideur que l'on a souvent qualifié de "clinique" du réalisateur, se laissent gagner par une émotion surprenante et une description déchirante de la Fatalité. Plus qu'un film d'époque ou qu'une critique sociale, Barry Lyndon est une tragédie du temps qui passe, de l'érosion des esprits et des sentiments. Le héros, humain, trop humain, avec son courage et ses faiblesses, sa grandeur et sa lâcheté, est un personnage d'une complexité fascinante, qui ne cesse de nous faire revenir auprès de ce film précieux.

 

 

11. Ghost In The Shell

Pour tricher un peu avec le classement, je pourrais placer à égalité Ghost In The Shell et sa suite Innocence. Deux chefs-d'oeuvre qui évoquent avec une rare justesse la possible disparition de l'humanité. Disparition de l'humain, pour mieux le retrouver sous d'autres formes. Et ainsi les cyborgs, les programmes informatiques de perpétuer la philosophie, la littérature, l'émotion, avec de nouvelles nuances, de nouvelles illusions, de nouvelles quêtes. Avec une intelligence sans faille, Oshii signe des oeuvres radicales, d'une rare perfection plastique et thématique. D'une maîtrise qui donne le frisson. Plus encore que le 2001 de Kubrick, les deux Ghost In The Shell sont peut-être les plus grands films de Science-Fiction de l'histoire du cinéma.

 

 

10. Play Time

Jusqu'où peut-on pousser la perfection cinématographique ? Jusqu'où peut-on aller pour anoblir et accomplir le 7e Art ? Avec Play Time, Jacques Tati n'est pas loin d'avoir trouvé des réponses définitives à ces questions. Parfait, et pourtant toujours un peu bancal, Play Time est un monstre cinématographique impossible à appréhender en dehors des cadres du grand écran. A l'heure du DVD, des home cinemas, Play Time refuse toujours de se laisser enfermer sur de petits écrans. Play Time est gigantisme, délire d'espace et de temps. C'est un film qui semble toujours vouloir exploser les limites. De l'écran, certes, mais aussi de la durée. Pour atteindre une plénitude qui serait la vie en elle-même en direct, quand l'abondance d'artifices parviendrait à reconstituer notre monde, mais avec juste ce qu'il faut de surréalisme pour qu'il soit féerique. L'absurdité du monde moderne que décrit Play Time est toujours prête à laisser place à la poésie, à l'amusement. Au temps de jouer. Et avec ce film, Tati, mégalomane génial, comme avec toutes ses autres oeuvres, veut nous montrer la vie dans ce qu'elle a de plus fragile, de plus touchant. Et les grands espaces glacés de devenir manèges enchantés. Et l'ennui de se faire rêverie. Et Play Time d'être le plus grand film du cinéma français.

 

 

9. Excalibur

La puissance du mythe, retranscrite comme jamais sur un écran de cinéma. C'est cela que propose Excalibur, oeuvre miraculeuse qui vient chercher au coeur des artifices chrétiens des légendes du Graal, la part de symbolique païenne si fondamentale. D'où ce sentiment de fin des temps qui imprègne l'oeuvre, portée à des hauteurs bouleversantes par des interprètes habités et des choix musicaux formidables (Wagner en tête, qui n'a jamais été aussi bien utilisé dans un film). Le chef-d'oeuvre absolu de John Boorman est aussi, dans son réalisme poétique, dans sa force évocatrice, le plus intense des films épiques.

 

 

8. Hedwig and the Angry Inch

On va voir Hedwig and the Angry Inch en imaginant découvrir un nouveau Rocky Horror Picture Show. Un vaste délire rock'n'roll, hymne à la liberté de penser, de créer, d'aimer, de baiser, de vivre. Mais on y va en pensant rire, et se laisser gagner par la déconnade surréaliste. Et après un début de métrage, effectivement bien percuté de la cafetière, on se fait saisir d'autant plus intensément par l'émotion à fleur de peau du personnage d'Hedwig. Les chansons, totalement géniales, entre glam, punk, pop et hard rock, décrivent les errances, les doutes, la quête bouleversante de cet être brisé. Ni homme, ni femme, Hedwig se cherche, se travestissant pour mieux hurler sa souffrance. Scindé en deux, Hedwig cherche sa moitié perdue, pensant la retrouver auprès d'un amour ingrat. Petit à petit, on s'attache tant à Hedwig que lorsque le film atteint sa géniale résolution on est littéralement tétanisé, enthousiasmé, en larmes, et en même temps le sourire aux lèvres. Car la quête d'Hedwig, aussi particulière qu'elle semble, fait totalement écho à nos propres questions, à nos propres déchirements. Et cette histoire, cette musique, ce héros hors normes, de nous permettre de nous trouver, de nous retrouver, d'être encore plus près de nous-mêmes.

 

 

7. Batman Returns

Le chef-d'oeuvre de Tim Burton est aussi le blockbuster le plus étonnant de l'histoire récente d'Hollywood. Hymne nihiliste, ode au sado-masochisme, hommage barré à tout le cinéma bis et incarnation idéale de l'esthétique gothique pleinement recyclée par le 7e Art, cette suite est non seulement très supérieure à l'original, mais aussi un inoubliable OVNI. L'univers de Burton est ici au sommet de sa noirceur, refusant le "happy end" lors d'un final tétanisant, qui laisse la part belle aux "méchants" plus humains que les humains. Et bien sûr, Michelle Pfeiffer trouve avec Selina Kyle/Catwoman le rôle plus emblématique de sa carrière, en dominatrice cuir et latex.

 

 

6. Nausicaa of the Valley of The Wind

Pour choisir un Miyazaki, il n'y a qu'une seule certitude : il en faut dans un le top 20. Oui mais lequel ? Tous sont bourrés de qualités extraordinaires. Rapidement, je me suis retrouvé auprès d'un trio sacré : Nausicaa, Totoro et Chihiro. Trois oeuvres parfaitement représentatives des trois aspects les plus essentiels de l'oeuvre du cinéaste. Entre les élans épiques de Nausicaa, la tendresse poétique de Totoro et l'introspection symbolique de Chihiro, il est quasiment impossible de choisir. Mais finalement c'est l'encore trop méconnu Nausicaa qui a remporté mon coeur. Parce qu'après avoir récemment fêté ses 20 ans, Nausicaa ne semble pas pouvoir vieillir (à part quelques écarts synthétiques de la néanmoins sublime musique de Joe Hisaishi) et que toute l'oeuvre de Miyazaki est déjà présente dans ce film. Qui est à la fois son plus spectaculaire, peut-être son plus violent (avec Mononoke) et aussi l'un de ses plus touchants, grâce à une fin élégiaque.

 

 

5. Phantom of the Paradise

Je déteste Brian De Palma, ou peu s'en faut. Je trouve à peu près tous ses films vulgaires (on me dit que c'est fait exprès), grossiers, kitsch, souvent plus ridicules que vraiment virtuoses. Et pourtant. Pourtant. Phantom of the Paradise fut longtemps mon film favori. Parce que les outrances de De Palma sont ici parfaitement à leur place. Et que pour une fois, il y a une vraie bonne histoire, avec de l'émotion. Mais il faut reconnaître que cette émotion doit plus aux trio d'interprètes principaux et surtout à la musique de Paul Williams qu'à De Palma. Qu'importe, l'ensemble trouve le juste milieu entre ridicule et sublime pour devenir un film unique dans l'histoire du cinéma, mille fois imité, jamais égalé, comme on dit.

 

 

4. Fire Walk With Me

Certes, le film ne serait sans doute pas aussi génial sans la série Twin Peaks qui l'a précédé. Pourtant, j'ai découvert Fire Walk With Me avant d'acquérir l'intégrale de ladite série. Et je suis tombé fou amoureux de cet électrochoc, fou amoureux de Laura Palmer et de la tragédie qui traverse ces existences. Dans un délire surréaliste, enfin totalement affranchi de toutes les règles, David Lynch signe son chef-d'oeuvre émotionnel (et sans doute son chef-d'oeuvre tout court), provoquant des torrents de larmes par la puissance de ses symboles, par l'intensité des passions. On peut réfléchir pendant des années sur les sens (et l'essence) de Fire Walk With Me, comme on peut tout aussi bien se laisser porter, bouleverser, déchirer par la violence de ce film épidermique, terrifiant et délicat.

 

 

3. Le Miroir

Le chef-d'oeuvre insurpassable d'Andréi Tarkovski est peut-être, plastiquement, le plus magnifique qu'il m'ait été donné de voir. Chaque plan est conçu, éclairé, enluminé, comme un véritable tableau. Le Miroir est un "paysage mental", une réflexion complexe, d'une profondeur affolante, sur la mémoire et sur l'identité. Au seuil de la mort, que reste-t-il à l'homme à part ses souvenirs ? Quelle fut sa réalité ? La subjectivité est mise en abîme jusqu'à perdre le spectateur, qui pourtant ne cesse de revenir auprès de ce film fascinant, pour en saisir les nuances, pour en appréhender la richesse. Le Miroir rend humble, le Miroir rend meilleur, le Miroir rend heureux. Inutile de se demander pourquoi certains spectateurs venaient en larmes remercier le réalisateur après certaines projections de ce monument transcendant. Rarement oeuvre aussi intime et personnelle aura été aussi universelle.

 

 

2. Heavenly Creatures

Comme The Lovers, la merveille de Peter Jackson parle d'amour absolu en faisant autant rire que pleurer. Et Dieu sait que l'on rit aux éclats et que l'on pleure comme jamais on n'a pleuré devant Créatures Célestes. Dans un coup de génie unique, Peter Jackson reconstitue un fait divers sordide en le filmant comme le Seigneur des Anneaux. En un tourbillon de mise en scène, ultra sensoriel et instinctif, qui vous saisit à la gorge dès le pré-générique pour ne plus jamais, non ne plus jamais, vous abandonner. Heavenly Creatures est une oeuvre traumatisante, qui renouvelle l'expérience cinématographique en prouvant que l'on peut céder à tous les délires formels tout en restant en permanence au service de son histoire et de ses personnages. Pour son premier rôle, Kate Winslet devient la plus belle femme du monde et Peter Jackson accède à une place particulière au sein du 7e Art. Place qu'il ne cesse de mériter à chaque nouveau film. Le bonhomme est un authentique génie, sans doute fort bien secondé par la sensibilité de sa femme et collaboratrice principale, Fran Walsh. Un génie qui n'hésite jamais à aller jusqu'au bout de ses idées, aussi risquées, aussi délirantes soient-elles. Heavenly Creatures ne ressemble à aucun autre film, et la tragédie qu'il met en scène en est magnifiée.

 

 

1. The Lovers

Peut-être le film le plus triste du monde. En tout cas la plus belle histoire d'amour jamais contée sur un écran de cinéma. Et un geste radical de la part de Tsui Hark, qui certes, ruera de manière encore plus évidente dans les brancards avec des chefs-d'oeuvre dévastateurs tels que The Blade ou Legend of Zu. Un geste audacieux, car le génial réalisateur s'empare d'une légende intouchable et d'un opéra populaire pour leur offrir son style inimitable. The Lovers appartient à Tsui Hark de la première à la dernière image. Dans ses délires de mise en scène, dans ses filtres inattendus, dans ses brusques ruptures de ton. Pendant les 2/3 du film, on rit, on s'amuse, on s'attendrit, on tombe amoureux de Charlie Young, l'actrice la plus craquante qui soit. Et soudain, la tragédie devient absolue, l'histoire d'amour explose en un crescendo émotionnel quasi insoutenable. Nulle surprise que la Terre entière se mette à trembler, tant on se dit que le film est quasiment au bord de se fendre sous la puissance inégalée des sentiments ainsi mis à nus. Et Tsui Hark d'enchaîner les plus éblouissantes images que l'on ait pu admirer au cinéma. Et quand Charlie Young pleure des larmes de sang, on se dit que non seulement The Lovers est le film le plus triste du monde, mais que c'est aussi le plus beau...

 
 
 
 
 
 
 
 
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