Edwood Vous Parle de

 

La Télévision

(en couleur cette fois)

 

 

    Je n'ai plus la télévision. Ca fait bien un mois. En fait je ne la regardais plus. Depuis presque un an. Oui, il fallait l'avouer.

 

        Là je sens que tout le monde tourne de l'œil. Déjà, les fans de Edwood VS MTV (pour lesquels je faisais l'effort d'allumer encore une ou deux fois par mois mon poste). Et oui les petits, y a plus de MTV chez Edwood et elle n'est pas prête de revenir. Par contre, rassurez-vous, les clips je pourrais encore les voir, ici ou là et surtout sur le web. Alors, bon, à l'occasion, sait-on jamais. Les autres s'inquiètent parce qu'ils se demandent avec quoi je regarde mes DVD. Ah non, les enfants, faut pas se traumatiser. Quand je dis que je n'ai plus la TV, je parle des chaînes que tout le monde reçoit (plus ou moins), pas de l'appareil en lui-même, qui reste branché aux lecteurs DiViDi, au magnétoscope et à la N64. Vous ne croyez tout de même pas que je puisse vivre sans Play Time et Poltergeist (le film, pas la série TV, bande de barbares !) ?? En fait si, je vis très bien sans films et sans internet, mais c'est une autre histoire.

        Donc, voilà, comme on ne parle jamais aussi bien que de ce que l'on ne connaît pas, je voulais évoquer le souvenir de la télévision (en couleur, mais aussi en noir et blanc). Entre ici, étrange lucarne, et repose en paix. Ton temps s'achève. Et peu importe que tout le monde, sauf moi, en soit encore aux joies de TF1 et de Canal +. Et peu importe que tous, sauf moi, se repaissent de Rive Droite Rive Gauche et de Alternative Nation. La télévision me prive de sa lumière, mais de sa lumière moi je m'en fous, j'ai rendez-vous avec vous...

 

        On me dira qu'un bloc noir avec un écran noir, c'est déprimant. Et d'un, non le monolithe kubrickien n'est pas déprimant (même s'il n'est pas aussi gai qu'une chanson de Blondie, certes). Et de deux, ce n'est pas parce qu'on n'a plus la TV qu'il faut quand même rester devant (j'en connais qu'ils le font, là, vous qui me lisez, par exemple). 500 000 spectateurs matent la neige à la TV (la neige, pas la vrai, pas la neige chez Tim Burton, mais bien la neige de quand le faisceau est pété (même pas la mire, notez bien, c'est trop joyeux la mire). Ca laisse rêveur. Y en a même qui voit des fantômes dans la neige télévisuelle, si, si, je vous assure. C'est Poltergeist, encore (les gens de bon goût qui connaissent le film par cœur doivent être écœurés par la prévisibilité de ma future conclusion).

        Il n'y a rien à la TV et c'est tant mieux. Ca laisse tellement du temps pour tout le reste. Et même ce qu'il y avait de bien (il y avait des choses biens !), ne nous manque pas. Certes, ça limite la vie sociale de ne plus avoir de TV. Mais ça développe à mort la vie familiale et sentimentale. Faites l'essai, c'est un lieu commun qui marche, qui fonctionne, qui se vérifie par l'expérience. On ne peut plus évoquer le dernier jeu scandaleux en communauté, on ne peut plus critiquer la dernière critique théâtrale d'Elisabeth Quin (oui je sais par cœur, merci, qu'elle parle de cinéma, mais c'est la plus théâtrale des critiques de cinéma). Alors, forcément, c'est frustrant. Pour celui qui n'a rien de mieux à raconter dans sa vie que des histoires de télévision.

 

        Bien sûr, si on n'avait jamais regardé la TV on n'aurait jamais vu la Minute de Monsieur Cyclopède, sans la TV pas d'Objectif Nul et de Palace, sans la TV pas de Monty Python's Flying Circus et pas de Twin Peaks. Ce qui fait un tantinet mal, voire même qui est désespérant. Car donc, sans TV pas de sommets de l'humour drôle et pas d'avancées folles dans l'univers de l'art qui fait rêver, qui fait peur, qui fait réfléchir. Et sans TV impossible de voir s'effondrer au ralenti les tours du World Trade Center (Fight Club ? Où ça Fight Club ? Preuve s'il en est que Fight Club c'est bien, mais en film, pas en vrai). Donc on aura toujours besoin de la TV, quelque part, un peu, parfois.

        Mais il faut savoir s'en passer. Et Dieu merci il est possible d'être un enfant de la TV et de vivre sans, bien, fort bien, très bien même. Alors il faut avoir d'autres occupations dans l'existence. Je ne sais pas, par exemple, tenez : lire, écrire, sortir, aimer, écouter, voir, étudier, dormir... Tellement à faire et si peu de temps à consacrer aux séries TV. Avec la TV, comme avec toutes choses ou presque, il y a du bon et du mauvais. Mais le plus précieux, c'est le temps que je passe avec vous, avec elle, avec moi-même, avec eux, mais pas avec la télévision. Et pas avec internet, mais ça j'en ai déjà parlé. Et puis si la télé vous manque, il restera toujours la possibilité de glisser l'édition spéciale de Raging Bull dans le lecteur ou la VHS de Heavenly Creatures dans le scope, et le reste, le reste n'est que Démons et Merveilles (belle conclusion, car la série Démons et Merveilles de Jim Henson est la plus belle chose que la télévision ait créé).

 

        La vraie conclusion ? Ce sera la scène finale de Poltergeist (qu'il est bon d'être prévisible). Quand le père de Carol Ann éjecte le poste de la chambre d'hôtel, évacuant symboliquement tous les drames et toutes les horreurs qu'ils viennent de traverser. La caméra de l'entité bicéphale Tobe Hooper-Steven Spielberg s'éloigne lentement alors que monte le thème sublimissime de Goldsmith. Qui a besoin de la télévision ?

 

Edward D. Wood Jr. ("Video killed the radio star")