Edwood vous parle de

 

Star Wars

 

        Sur le net il y a essentiellement deux types de sites : les sites de cul et les sites sur Star Wars, voire des petits malins qui mélangent les deux et qui font ainsi exploser leur compteur en quelques heures. Comme je m'étais fendu d'une page sur bit-bit, autre sujet très prisé sur le web, je vais rédiger une page sur Star Wars, qui, je suis sûr, va intéresser plein de monde. Comme la majorité des dernières générations d'occidentaux, je suis un enfant de Star Wars et de Disney. Les premiers films dont on se souvient, ce sont les Aristochats et le Retour du Jedi, c'est bien connu. Lucas et Disney sont des trusts de l'imaginaire enfantin, les Microsoft de l'entertainment pour les moins de 20 ans (et plus... en fait...). On ne va pas le cacher, on a aimé Blanche-Neige et on a aimé Star Wars. Quand on avait huit ans, on était à genoux devant les incroyables rebondissements dramatiques de l'Empire Contre-Attaque (même si pas mal de choses nous passait un peu au-dessus de la tête... quoique...). Et l'univers proposé par Star Wars était assez enthousiasmant, même si vilement "emprunté" au monde médiéval et au monde asiatique (déjà !), mais de cela, on s'en foutait pas mal, on prenait ce que l'on nous donnait et on était content.

 

    Même si je généralise sans doute un peu, aujourd'hui, vous qui me lisez, votre livre de chevet n'est plus Oui Oui à la Plage, ou alors vous faites dans le Lourd Power et c'est un autre problème. Et pourtant il doit en rester parmi vous pour classer la trilogie Star Wars au top des meilleurs films du monde. C'est sensiblement la même chose. Star Wars et Oui Oui, même combat. Star Wars c'est du cinéma d'éveil de qualité pour les petits, comme Oui Oui c'est de la lecture d'éveil pour les tout petits. Mais bon, un jour on découvre Jules Verne et Conan Doyle. Puis Stendhal et Victor Hugo. Et puis Hegel et Kant (oui, je sais, y en a qui s'arrêtent en route...). Pour le cinéma, c'est un peu pareil. J'en vois qui s'excitent derrière leur écran, là, tsss tsss, il faut se calmer, oh, vous allez tomber de votre siège ! Mais oui, je sais que mon argumentation est pleine de failles et alors ? Je fais ce que je veux, je suis chez moi.

    Alors, oui, parfois je verse une larme sur la collection verte, voire sur le club des cinq. Et oui, j'éprouve une nostalgie complaisante pour Star Wars, une belle période de mon enfance, avec une poignée de jouets moches à pleurer, un peu de musique pompière et quelques thèmes pseudo psychanalytiques de base ("tu es mon frangin, je vais te rouler une pelle", "je suis ton père et je suis méchant, tue ton père, mais symboliquement, parce que merde, quoi, il y a du bon en lui", etc...). Oui, c'est consternant. Mais pas quand on a 10 ans. La Princesse Leia transporte une sexualité prude pour les petits (avec une imagerie années 80 réjouissante a posteriori), Han Solo fait dans le viril gentillet et Luke prône une homosexualité bon teint qui amène gentiment les enfants vers la puberté. Le père castrateur n'est jamais très loin et les mères sont évacuées sans ménagement. Le tout donne un bon film éducatif et amusant. Et tout cela est très bien.

 

        Le problème c'est qu'il y a un problème (comme qui dirait). Ce problème c'est le culte voué à Star Wars, qui sort vraiment de la cuisse, non pas de Jupiter, mais de monsieur Marketing. Star Wars a été vendu et survendu, son impact sur les enfants a été entretenu comme un gourou entretient sa secte : par l'aveuglement. Vous avez aimé Star Wars un jour, vous aimerez Star Wars toujours ! Ce totalitarisme hérité de la religion, du nazisme et de Disney, est mis en place par Lucas et ses suiveurs avec une innocence qui force presque l'indulgence. Aujourd'hui, se séparer de Star Wars, pour beaucoup de gens, est aussi difficile (voire même plus difficile) que de quitter le domicile familial ou que de fonder une famille. On sera indulgent, car Lucas, à l'inverse de Hubbard, n'a pas jugé bon d'officialiser une nouvelle religion sur la base de son "œuvre". Mais cette secte Star Wars existe, en puissance, elle est là, ses adeptes sont déjà prêts à m'assassiner, un contrat est sur ma tête, Rushdie c'était rien à côté de ce qui m'attend, ils vont m'enlever, me séquestrer, me faire agenouiller devant un Dark Vador en carton grandeur nature, ils vont me faire abjurer, comme Galilé, je vais être obligé de me renier pour éviter le bûcher. Et si ça se trouver, il est déjà trop tard, ils sont là, en bas de chez moi, avec 25 fusils, 16 pistolets automatiques, 6 arbalètes, 5 pitbulls, 3 fourchettes, un bazooka et 68 sabres lasers en plastique. Déjà que les fans de Matrix voulaient ma peau, voilà que je vais me mettre la moitié du monde sur le dos, en plus, et ça fait un sacré poids...

        Et le pire c'est que j'aime Star Wars, quoi, oui, merde à la fin ! J'aime Star Wars, comme on aime des souvenirs d'enfance, avec tendresse. J'ai le vieux coffret vidéo d'époque, usé jusqu'à la rupture de bande. J'ai le machin pyramidale en VO. J'ai encore les vieux jouets et les disques. Je connais tout par cœur et c'est bien chouette. Mais bon, Star Wars, on peut et on doit vivre sans. Au niveau du cinéma, à part sur le plan marketing, ce n'est pas si révolutionnaire que cela. Oui, l'Empire Contre-Attaque est une forme de chef-d'oeuvre. Mais on a fait mieux depuis. Et de toute façon, si l'on devait devenir fanatique de tous les bons films, on ne serait pas sorti de l'auberge. Quand il y aura autant de sites consacrés aux Innocents ou à Metropolis, qu'à Star Wars, on en reparlera. Le fanatisme Star Wars ne tient pas à la qualité intrinsèque des films, évidemment. Il tient à la manière dont ils sont vendus. C'est un cliché de dire cela, mais c'est ainsi.

 

        Je vois arriver une série d'objections et je les attaque de face. "Star Wars c'est original", oui, bien sûr, et mon œil ? Je sais, c'est un peu court. Mais quand on connaît Planète Interdite, La Forteresse Cachée ou les légendes arthuriennes, on rigole de l'originalité de Star Wars. Ce film a eu de la chance, il est arrivé au moment où il le fallait, un peu comme Titanic. C'est sociologique Star Wars, c'est pas artistique. "Oui mais si on a gardé une âme d'enfant ?" Oui, et alors ? Moi aussi j'ai gardé une âme d'enfant, et cela ne veut pas pour autant dire que je fais des fixations. Garder une âme d'enfant ne veut pas dire mettre des posters de Oui Oui dans sa chambre que je sache ? "Star Wars c'est un super divertissement." Oui et alors ? (bis). Il y a eu beaucoup d'autres supers divertissements depuis et plus réussis encore. "Star Wars est doté d'un univers incroyable". Oui, alors là ça devient n'importe quoi. L'univers Star Wars c'est une branlette permanente d'une communauté en voie de sectarisation qui se frotte abondamment l'imagination à la moindre débilité qui sort sous le label Lucas. On ne compte plus les romans (débiles), les JDR (encore plus débiles) et autres dérivés mercantiles qui visent des gens ayant perdu tout sens critique et qui disent "amen" à la moindre connerie portant le nom Star Wars. Franchement, quoi, on peut passer à autre chose, non ?

    De films réussis et diantrement sympathiques, on est arrivé à une industrie sectaire et grotesque. Effectivement, on peut laisser les fans de Star Wars en paix, faire preuve de tolérance et laisser les gens faire ce qu'il veulent dans leur coin. Mais bon, y en a marre quand même. Je n'aime pas ce genre de trusts, surtout dans le domaine cinématographique... quoique Star Wars n'a plus rien à voir avec le cinéma depuis 1983.

   

 

        PS : Je ne me réfère pas ici aux Editions Spéciales très laides et inutiles ressorties en salle il y a quelques années. De même je ne mentionne pas ce dégueulis de pellicule qu'est La Menace Fantoche, argument terrible et finalement assez indigne par son évidence même, contre le "mythe" Star Wars. 20 ans plus tard, Lucas a essayé de piéger une nouvelle génération dans ses filets (les petits d'aujourd'hui, élevés à la Playstation, seront moins sensibles à la première trilogie, donc il fallait un remake version Dreamcast). Résultat : la même chose qu'en 77, mais en nettement moins bien, en moins naïf. Car on pourra dire ce que l'on veut. Le coup des droïdes ou de Chewbacca en 77, c'était de la naïveté enfantine à la limite de la poésie (à la limite...), le Jar Jar en 99, c'est juste pathétique (et cela a un certain charme... pervers, le charme...). Il y a des choses qui ne se déroulent qu'une seule fois et ce n'est pas en sortant des milliers de produits dérivés, ce n'est pas inondant le monde de bouquins mal écrits, de jouets laids, etc... que l'on retrouvera l'émerveillement de la première vision de l'Empire Contre-Attaque. Face à cette injustice inhérente au temps qui passe, face à leur propre vieillissement, les fans s'enferment dans un "univers" autarcique, dangereux, totalitaire et idiot (oui, idiot !). Un fan de Star Wars ne courre qu'après des instants passés, au lieu de profiter du présent (je parle des fans de Star Wars, mais ça marche pour plein de mono-maniaques).

Mais je généralise un peu. Regardez : Dark Forces et Jedi Knight en jeux vidéos, c'était vachement bien.